Des charniers au Burundi

Depuis le mois d'avril, le Burundi connaît une crise politique, provoquée par l'obstination de son président actuel, Pierre Nkurinziza, de briguer un troisième mandat, en violation des principes constitutionnels. Dans le pays, il y a eu des protestations, des oppositions tous azimuts, pour dénoncer cette donne qui, visiblement et indubitablement, représente un obstacle suprême à l'essor de la démocratie et au vivre-ensemble dont ont besoin les populations. Lesquelles souffrent à présent le martyre.

Comme en témoigne le récent rapport publié par le Haut-Commissariat des Nations-Unies aux droits de l'homme, où l'on fait mention des violations des droits de l'homme à grande échelle. " Nous avons reçu de nombreuses allégations selon lesquelles lors des opérations de recherche des 11 et 12 décembre dans les quartiers de Musaga, Nyakabiga, Ngagara, Citiboke et Mutakura, à Bujumbura, les forces de police et de l'armée auraient arrêté un nombre considérable de jeunes, dont beaucoup auraient ensuite été torturés, tués ou emmenés dans des destinations inconnues ", note la structure onusienne. Des témoins rapportent " qu'au moins neuf charniers existeraient à Bujumbura et dans ses environs ".

Le pire, la dimension ethnique des exactions apparaît " dans le témoignage d'une des victimes d'abus sexuels qui a déclaré que son agresseur lui aurait dit qu'elle payait le prix d'être tutsie. " Un autre témoin indique que dans le " quartier de Bujumbura appelé Nyakabiga les tutsis avaient été systématiquement tués, et les hutus épargnés. "

Là, il ne serait pas exagéré ni disproportionné de souligner qu'il y a les risques d'une rwandaïsation du conflit. Puisque ce sont quasiment les mêmes groupes ethniques qu'on cherche à opposer, à diviser, à travers des stratagèmes nauséabonds ourdis par quelques vils princes de l'establishment politique désirant s'accrocher au pouvoir. Non, le Burundi ne doit pas devenir le nouveau Rwanda du XXIe siècle.

D'autant qu'on peut encore agir diplomatiquement et militairement afin de permettre à cette superbe aire géographique africaine d'échapper au chaos, à une dégénérescence définitive.

Guillaume Camara