Le joueur du Barça a beau assurer que la concurrence ne le gêne pas, il semble très agacé quand on évoque Patrice Evra et ses qualités offensives, si précieuses à Manchester United.
«La concurrence de Patrice Evra ? Elle ne me dérange pas. C’est une
bonne pression. Elle ne date pas d’aujourd’hui. Je connais ses qualités
depuis longtemps. Il a gagné pas mal de choses. Mais moi, je suis pour
la concurrence, ça fait grandir un groupe. Et si elle existait à tous
les postes, cela serait énorme pour l’équipe de France. Maintenant, ça
fait plus d’un an qu’on me parle de Patrice Evra mais pas des autres
joueurs… Mais bon, ça ne me dérange pas… »
Eric Abidal a beau jouer les durs indifférents, il ne convainc personne de sa sérénité, quant à la rivalité sportive à laquelle le contraint le joueur de Manchester. L’homme est de ces gens fiers qui, au fond, n’aiment pas se voir ainsi discutés. Déjà, au mois de mai, il avait évoqué le gaucher vainqueur de la Ligue des Champions. « C’est bien pour lui d’avoir gagné cette finale », avait-il déclaré sur les ondes de RMC. « Mais après, je pense que c’est différent en équipe de France. Il y a un sélectionneur, et c’est lui qui fait l’équipe. »
Justement, la question de la concurrence se pose plus que jamais après le match assez pâle face à la Roumanie. Et le joueur du Barça ne peut ignorer combien l’on soupèse sa prestation de Zurich, à l’aune du dynamisme, de la pétulance d’un Patrice Evra en pleine forme. Qui rêve de cavalcades en bleu, après en avoir livré de si enivrantes en rouge.
Ce n’est pas la première fois que le gaucher né à Lyon cueille en maugréant la perspective d’une mise en concurrence et assure qu’il se sent assez fort pour la battre en brèche. Suspendu pour le match contre le Togo lors de la Coupe du monde 2006, il avait dû céder sa place à Mickael Silvestre. Lequel avait tenu il est vrai des propos un peu présomptueux compte tenu de ses propres limites. « Je veux mettre Eric sur le banc », avait-il déclaré de façon inconsidérée. « C’est la loi du sport. La concurrence est saine entre nous. Mais il n’y en a qu’un qui joue et je n’ai pas envie de rester sur le banc jusqu’à la fin de la compétition. »
Repères égarés.
Les paroles parurent très vite déplacées au cours d’un match où il prouva surtout le contraire de ce qu’il avait clamé. Ce fut lui, l’imprudent Silvestre, qui cira le banc de touche jusqu’au bout. Abidal accueillit la prestation de son rival avec une froideur sarcastique, ce qui fit dire à l’élève d’Alex Ferguson qu’il ne comprenait pas l’humour du titulaire. Ambiance… « Il se donne à 100 %, moi aussi. Je ne suis en guerre avec personne. »
Bref, qui veut reléguer le colosse du Barça sur le banc, a tout intérêt à assurer. Est-ce le tour de Patrice Evra ? « Je ne pense pas que le jeu de Pat soit fondamentalement différent du mien », assure Abidal, qui se retranche derrière la chaleur et la prudence roumaine pour expliquer la mièvrerie de sa prestation. « Monter pour monter ça ne sert à rien. Si l’équipe adverse est bien place, on ne peut pas déborder derrière la tribune ».
On lui reproche sa relation difficile avec Malouda ? Lui assure qu’il a perdu ses repères, les deux hommes étant partis dans des directions différentes après leurs succès lyonnais, l’un en Espagne, l’autre en Angleterre. « Nous sommes arrivés tous les deux dans des équipes au jeu différent de celui de Lyon. Il faut que l’on travaille pour retrouver nos automatismes. Ce sera mieux que ce que l’on a montré lundi. Mais s’il doit y avoir du changement, il faut l’accepter. Pour le collectif il faut savoir faire des sacrifices. »
Article de Thierry Vautrat, Sud Ouest