Non, toutes les contorsions des juristes experts qui conseillent notre Président sont vaines. Certes, on peut constater un réel progrès dans ce projet d’une déchéance de nationalité. Il n’est plus question d’inscrire dans notre Constitution un article qui, opérant une distinction parmi les citoyens français, viendrait contredire l’essence même de notre République, pour laquelle tous ses enfants sont égaux.
On envisage désormais une manœuvre qui consisterait, après avoir inscrit dans la Constitution une sanction de déchéance de nationalité, à préciser ensuite dans une loi les conditions dans lesquelles celle-ci pourrait être prononcée. Vaine acrobatie ! Supposons : une personne a commis un crime, ou même un délit, passible de déchéance de nationalité. Que fait-on alors ? On examine s’il est possible de prononcer cette sanction. Est-il bien binational ? Stop ! Comment fait-on pour le déterminer ? Eh bien, il faut le distinguer d’un Français lambda, tout simplement « mono-national ». Il faudrait donc discriminer parmi les Français, ce que notre Constitution interdit.
Une telle loi serait donc anticonstitutionnelle, tout comme l’est cet article 25 de notre Code pénal, avancé par François Hollande à l’appui de sa thèse. Cet article stipule en effet ceci : « L'individu qui a acquis la qualité de Français peut, par décret pris après avis conforme du Conseil d'Etat, être déchu de la nationalité française, sauf si la déchéance a pour résultat de le rendre apatride ». J’espère que, s’il existe encore dans notre pays des juges constitutionnels, ils seront d’accord pour reconnaître avec moi qu’il n’existe pas en France un « individu qui a acquis la qualité de Français ». La France, elle, ne connaît que des Français.
Si l’on est capable de commettre ce genre d’infamie, on est prêt à suivre les traces de l’État français de Vichy : le projet envisagé et cet article, dès son abord, sont selon moi tous les deux absolument anti-constitutionnels.