Le pot de départ : rite d’adieu ou nouveau départ ? C'est le thème de ce roman de Julien Aime.
Ce rite de passage, il le suit avec un étonnement désabusé. Il fait suite à une série de vexations et de mise à l’écart si caractéristiques des fins de carrières et qui ont pour conséquence une prise de distance et un désintérêt pour son travail.
Le pot de départ, c’est « le bal des faux cul », un moment un peu ringard avec ses usages propres, ses codes et surtout la certitude qu’après cette longue mise au placard qui a précédé, on n’est guère regretté et que la vie professionnelle continue sans vous.
Prise de distance du monde du travail dont on ne fait déjà plus tout à fait partie, inquiétude face au gouffre de la retraite et de son inactivité, c’est un virage majeur de la vie à passer.
Sa femme, attentive et prévenante, lui propose un stage de préparation à la retraite, à faire en couple, dans un manoir campagnard et qu’il accepte à contre cœur.
Ce cadre tout juste sexagénaire qui cache sa peur de vieillir sous une solide misanthropie nous donne des descriptions savoureuses des ravages de l’âge … de ceux qui l’entourent.
On se trouve dans un huis clos de stéréotypes de seniors, depuis le hâbleur ventripotent, en passant par le désespéré solitaire, la quinqua liftée, le couple bourgeois ou le couple BCBG tristounet. Tout ce petit monde s’observe, puis pris dans l’ambiance s’aperçoit que finalement, l’âge les réunit et passe de bons moments ensemble.
Ce stage de préparation à la retraite, malgré ses aspects infantilisant et un tantinet grotesque, va faire que Jean Michel va se poser un certain nombre de questions. Il réalise le vide de sa vie, qui était totalement occupée par le travail. Il mène déjà une vie de vieux, mais ne s’en rendait pas compte.
Côtoyer les autres provoque un effet miroir de son propre vieillissement. Il reste encore inquiet, mais on sent qu’il a fait du chemin et que finalement, un nouvel avenir est devant lui.
Voilà un excellent livre à lire. Sous des aspects légers et des descriptions savoureuses qui déclenchent le sourire, il évoque bien toutes les étapes à passer pour vivre une retraite sereine, des étapes universelles et qui s'appliquent à tous. Le désintérêt au travail, les jeunes qui poussent, le refus de se voir comme « vieux », la prise de conscience de l’âge qui passe, la vie de couple à réinventer, puis la porte entre-ouverte vers un nouvel univers.
Et l’auteur ? C’est vrai qu’en lisant ce livre, je me suis demandé quel quinqua ou sexa avait bien pu écrire cela. Avec tant de détails plus vrais que nature, il fallait bien que l’auteur soit passé par là. Et bien non. L’auteur, Julien Aime n’a que 32 ans. C’est l’expérience de la retraite de son père qu’il a vécu par procuration et qui l’a interpellé. Sa plume a fait le reste et c’est un ouvrage qui se lit vite mais où l’essentiel est dit. Il a d’autres livres en préparation, on les attend avec impatience.
Et pour moi qui suis une prosélyte du stage de préparation à la retraite, moment de réflexion indispensable sur soi et son avenir pour les 20 années à venir, cela met de l’eau à mon moulin.
Le Pot de départ de Julien Aime, éditions Baudelaire, 15,50 €