"La peur est livrée avec les enfants, ça fait partie du lot, c'est dans le paquet cadeau, on peut contenir la tristesse, la maintenir dans un endroit clos, les mains sur les oreilles et sur les yeux, mais on ne peut pas guérir de la peur"
L'autofiction, ce genre très typiquement franco français, qui a ses chefs de files- Christine Angot ou Camille Laurens- dont je reparle très bientôt , a vu arriver il y a maintenant dix ans une jeune génération parmi lesquelles Justine Levy était certainement la plus médiatique, vu son background- fille de BHL et ex de Raphael Enthoven, un philosophe très médiatisé qui l'a quitté pour Carla Bruni, des héros qui étaient donc le plus logiquement du monde les personnages principaux de Rien de grave son premier roman paru en 2005.
Malgré l'agacement que le personnage de petite fille riche qui se complait dans son malheur peut produire en moi, je dois reconnaitre que ce Rien de grave qu'on lit d'abord par voyeurisme était une vraie réussite, un roman sans concession qui nous plonge avec pertes et fracas dans les abimes d'une rupture.
Etant passé à coté des deux autres romans de Justine L, malgré son "mauvaise fille", dont on a beaucoup parlé et qui a été adapté au cinéma avec la formidable Izia Higelin dans le rôle de Louise le double littéraire de Justine, j'ai repris les aventures entre fiction et réalité de Justine/ Louise avec son dernier ouvrage en date, la Gaieté, grâce à la dernière sélection du livre de Poche de janvier 2016.
Comme dans les trois autres romans, l'auteur continue évidemment sur la voie de l'instrospection intime et le livre évoque sa lutte permanente contre la tristesse, la mélancolie qui l'assaille- douce ironie du titre- et sa peur , maintenant qu'elle est devenue mère, de la transmettre à ses enfants, vu que sa mère, qui est morte dans le troisième volet avait aussi un caractère dépressif.
L'auteur nous cache rien de son désarroi de mère "j sais juste qu'une maman malheureuse vous refile toujours un bout de son malheur, sans le faire exprès et sans le savoir.", une démarche plutôt rare et audacieuse en littérature française, car peu de romancières osent parler des doutes qui assaillent une jeune mère- à part Eliette Abecassis dans un heureux évènement qui allait encore plus loin- et on peut être touchée par la sincérité et la transparence de l'auteur qui ne cherche pas à s'épargner, avec une ironie somme tout salutaire.
Cependant, la gaieté peine à convaincre totalement, la faute à une construction de récit vraiment décousue qui nous perd entre passé et présent entre ses souvenirs d'enfance et des situations présentes pas toujours passionnantes à suivre, l'actuel et ses souvenirs....
On a en fait, assez souvent en lisant la Gaieté, du mal à comprendre où Justine Levy veut nous amener et on regretet que certains sujets interessants sur le papier ne soient finalement abordés que de manière superficielle.
Bref, une lecture qui m'aura moins emballé que Rien de grave mais qui m'aura quand même, sur certains passages donner envie de continuer à suivre l'univers de Justine Levy ou plutot celui de Louise, son double littéraire.