Ce 1er roman est étrange, onirique, avec une construction particulière faite de flashback et de retour au présent. Les personnages principaux sont Etta, Otto et Russel. Il se déroule au Canada à la campagne, mais à travers le destin d’Otto, on évoque aussi la France, ses plages et la 2nde guerre. Otto est un des membres d’une famille nombreuse les Vogel, il prend sous son aile Russel qui devient comme un membre de la famille. Suite à un accident Russel va garder une séquelle à la jambe qui l’empêchera de suivre son ami à la guerre. Il devient un des membres de cette fratrie pauvre, dirigée par une mère courageuse et où les travaux à la ferme sont organisés selon l’âge et la taille des enfants.
L’auteur évoque la vie rude, le travail à la ferme pour les petits, l’impossibilité d’aller à l’école, la difficulté d’apprendre à écrire pour Otto. Elle évoque aussi l’amitié indéfectible entre les 2 hommes, la violence de la guerre et ses blessures, cette crinière blanche que Otto porte dès la jeunesse. J’ai apprécié les passages sur la ferme et l’enfance des héros, le personnage de Winnie la petite sœur qui s’éloigne de son destin et s’engage pour devenir infirmière.
Etta, elle est institutrice, elle a envie de faire bouger les choses, elle s’installe dans la petite école d’Otto et Russel qui ont pourtant le même âge qu’elle et qui continue à venir. Avec Otto au départ se crée une complicité qui nait à travers les lettres qu’elle corrige et qu'il lui envoie pour tenir pendant la guerre. Puis il forme un couple. Leur histoire d’amour est attendrissante, leurs blessures en font un couple charmant. J’ai aimé les souvenirs d'Etta autour de son enfance ; des débuts de sa relation avec Otto. Ses lettres en fil rouge qui tissent leurs liens.
Le personnage de Russel est à la fois protecteur et il doit s’effacer devant ce qui est intéressant. Il parvient à surmonter son handicap, à s’occuper de sa ferme. Son amour désespéré pour Etta, son amitié pour Otto qu’il ne comprend pas toujours.
Les pensées des personnages se mêlent à leur souvenir et à leur présent, Etta à 83 ans malgré la maladie Alzheimer décide de marcher vers la mer et s’en va seule un jour. Elle laisse à Otto des recettes et lui donne l’interdiction de la suivre. Elle marque les informations dont elle doit se souvenir sur un carton. Au cours de sa marche, elle se lie avec un coyote James, fruit de son imagination ? Réel comme cette marche ? On ne le sait mais peu importe.
Car c’est là la force du roman par petite tranche, nous retransporter dans la vie difficile, les méandres amoureux et ceux de la vieillesse. Cette marche vers la mer qui permet à Etta de faire un bilan de sa vie, de ses choix, de ses relations avec Otto et Russel. Elle devient un symbole pour un pays qui la regarde marcher et à chaque fois, une source d’inspiration pour les gens. Les réflexions échangées avec James m’ont fait penser au petit prince. Les souvenirs de poussière comme autour de l'école, de la fascination pour l'eau, des animaux en papier machés, des talents de danseur de Russel et Etta vont rester dans ma mémoire.
Ce roman est comme un conte initiatique, il est difficile à décrire, ce sont plus des impressions, des images comme dans un voyage qui reste, des mots. Alors faites cette expérience de lecture singulière et découvrez le monde poétique d’Etta, Otto, Russel et James.
PS: merci à Net Galley et aux éditions les escales pour le voyage.