Expédition 48°Nord : 3 semaines à vélo et plus de 2 mois de navigation en pleine mer.
Voilà plus de 65 jours que Jean Gabriel Chelala navigue sur l’Atlantique à bord de son cyclomer, de 7,50 mètres conçu spécialement pour l’expédition 48°Nord, propulsé par la seule force de ses jambes. Le jeune aventurier, qui n’avait aucune connaissance maritime en début d’année, a désormais à son actif plus de 2 mois d’aventures en mer, de solitude et de rencontres extraordinaires et bien sûr de pédalage qui lui a permis de parcourir environ 2.700 milles (4.345km). C’est sans compter les 2.000km qu’il a déjà parcouru à vélo entre Paris et la pointe sud du Portugal avant de se lancer dans la traversée de l’Atlantique. « Je suis à la fois content et soulagé de voir que le plus gros de cette deuxième étape est derrière moi. J’essaie de ne pas trop penser à l’arrivée même si je ne peux pas m’empêcher de passer mon temps à comptabiliser les milles parcourus et les milles restants. Je me concentre pour ne penser qu’à la journée en cours tout en espérant avoir de bonnes conditions météo pour avancer le plus rapidement possible ».
Il faut dire que le frêle esquif ultra léger est extrêmement tributaire des courants et des vents. Même si l’embarcation est propulsée par la force humaine et non par une éolienne, le vent est déterminant et joue sur la moyenne de navigation, voire sur le moral du navigateur surtout dans un contexte d’effort constant sur une longue durée. « Tous les matins, mon réflexe est de scruter le ciel et de mesurer la vitesse du vent. Je ne sais jamais le temps qu’il va faire dans l’après-midi, ni même le lendemain. Je croise les doigts du matin jusqu’au soir pour que le vent ne me laisse pas tomber. Aussi surprenant que cela puisse paraître, au milieu de l’océan, la mer est parfois d’huile, sans aucun bruit, sans un souffle de vent. Dans ces moments-là, je suis complètement désarçonné, les bras m’en tombent, je passe au stade de l’énervement, je crie à pleine voix pour tout expulser, ... Évidemment cela ne sert à rien, mais cela a le mérite de me soulager sur le coup, avant de retourner tranquillement pédaler ! ».cliquer sur l'image pour suivre le parcours quotidien de Jean Gabriel Chelala
Pour illustrer les effets de la solitude, le jeune globe trotteur raconte. « Il y a quelques jours alors que je pédalais, j’ai aperçu un voilier à quelques miles. Fou de joie, j’ai essayé de prendre contact par radio VHF, j’ai envoyé des signaux avec mon miroir, j’ai soufflé dans ma corne de brume, mais je n’ai eu aucune réaction à mes signaux. Ma déception a été telle… Ce n’est pas le fait de ne pas avoir pu parler mais surtout le fait que je n’ai pas eu de réponse, un simple signal pour montrer qu’il m’avait vu m’aurait suffi. J’en avais les larmes aux yeux. À ce moment-là, je me suis vraiment senti abandonné, comme un naufragé qu’on oublie et qui ne peut plus se reposer que sur l’espoir que quelqu’un le recherche et le trouve. Je me rends compte que je ne suis pas d’un naturel solitaire. Évidemment, c’est le cas de tout être humain de vouloir côtoyer son prochain, mais pour moi, l’épreuve est beaucoup plus grande que l’effort physique, ou la lutte contre la peur de l’inconnu. Même si j’évolue actuellement dans un milieu extrême, voire hostile, dans lequel il faut être très vigilant, j’ai l’impression de m’adapter bien mieux au fait que de manquer de contact humain. Je suis impatient de pouvoir échanger sur cette question avec d’autres aventuriers dès mon arrivée ». Quoi qu’il en soit, dans une semaine, le jeune navigateur aura rejoint le courant nord équatorial qui devrait lui donner un coup de pouce vers sa destination, …
Pour Mayeul Riffet, Jean Gabriel a bénéficié pour l’instant d'un alizé plutôt bien établi, sans gros phénomènes perturbateur comme les ondes d'Est, une sorte d'ondulation des isobares qui se détache du continent africain pour traverser l'Atlantique d'Est en Ouest et qui coupe les ventilateurs pendant plusieurs jours. « À l’approche de l'arc Antillais et du Golfe du Mexique les choses devraient se corser sérieusement et la trajectoire de Jean Gabriel risque d'être nettement plus chaotique à certaines périodes. Les courants vont devenir plus fort et l'alizé qui rencontre lui aussi ses premiers obstacles sera perturbé par phénomène de friction. En fait, le golf du Mexique est un fabricant de cyclogenèses. Ces dépressions remontent ensuite vers l'Atlantique Nord, juste sur la route de Jean Gabriel. Sans représenter forcément un danger, il faudra être attentif et savoir se positionner en fonction, mais ce serait un miracle d'échapper totalement à ces dépressions. Mais le danger à venir très prochainement concerne la période dans laquelle on se trouve en ce moment, période de tempêtes tropicales et de cyclones, avec des eaux déjà très chaudes pour la période, 27/28°, … La saison s'annonce active et désormais il va falloir être très vigilant, car il va y avoir de l'action dans les jours à venir, .... ».
Le parcours de l’expédition 48°Nord, 30.000km à vélo et en cyclomer.
13 janvier 2008 : départ de Paris
7 février 2008 : arrivée à Lagos au sud du Portugal après avoir parcouru plus de 2.000kms à vélo
7 mars 2008 : départ de Sagres (Portugal) en cyclomer en direction de Jacksonville (Etats-Unis) 4.000 miles nautiques (6.500km) à parcourir
21 mars 2008 : escale technique à Safi (Maroc) suite à des problèmes de communications satellites
12 avril 2008 : départ de Safi (Maroc) en cyclomer
21 avril 2008 : escale technique à Punta Mujeres (Iles Canaries) à cause du safran arraché
27 avril 2008 : nouveau départ des Canaries en cyclomer
Arrivé à Jacksonville, Jean Gabriel devra remonter sur son vélo jusqu’en Alaska (8.000km), puis en fonction de la saison, ce sera la traversée du Pacifique en direction de la Sibérie (2.200 miles nautiques soit 3.500km) et une dernière étape à vélo (10.000km) le ramènera dans la capitale française.