Laïcité : derrière la polémique des Français (eux aussi) divisés

Publié le 22 janvier 2016 par Délis

La polémique sur la laïcité qui agite une partie de la gauche n'en finit plus de se durcir. Derrière elle se cache toute la difficulté de répondre à une question dans cette France traumatisée par les attentats de janvier et novembre 2015 : qu'est-ce que la laïcité ?

Le deuxième baromètre de la Société inclusive pour la Fédération des PEP apporte des éléments de réponses éclairants, sur ce qu'elle est aux yeux des Français.

Si l'égalité rassemble, la question des contours de la laïcité divise

Si l'importance de la laïcité dans l'identité de la France suscite un quasi consensus (85% des Français la considère comme un élément important de l'identité de la France), ses contours en revanche semblent flous, comme le montre la dispersion des réponses apportées. Pour plus d'un Français sur 4 (26%), la laïcité c'est avant tout assurer l'égalité entre tous les citoyens français sans distinction de religion, tandis que pour 2 Français sur 10 (21%), c'est avant tout permettre la liberté de culte et de conscience y compris celle de croire ou de ne pas croire. Viennent ensuite la perception d'une laïcité qui aurait avant tout pour vocation d'interdire le port des signes religieux dans les lieux publics (10%), de séparer les religions et la politique (10%), de faire reculer l'influence des religions dans la sphère publique (9%), d'assurer la neutralité de l'Etat (7%), de lutter contre le communautarisme religieux (6%), d'assurer l'égalité entre les religions (6%) et enfin d'interdire le port des signes religieux dans les administrations et bâtiments publics (5%).

Dans le détail, la manière dont les Français définissent la laïcité illustrent deux définitions qui s'affrontent et qui viennent attester d'une lecture politique de celle-ci : l'une considérant la laïcité comme un principe " émancipateur " nécessaire à l'expression de la liberté religieuse et de l'égalité entre les citoyens, l'autre la considérant davantage comme un principe restrictif, voire punitif notamment concernant l'expression de la religion dans la sphère publique.

La première définition est davantage partagée par les Français de gauche, qui déclarent pour plus d'un tiers d'entre eux (34%) que la laïcité est avant tout un moyen d'assurer l'égalité entre tous les citoyens versus 18% chez les Français de droite et 11% chez les sympathisants Front national. Le constat est similaire bien que moins marqué concernant la perception d'un principe permettant d'assurer la liberté de culte et de conscience. Vision émancipatrice qui se retrouve en outre dans le rôle donné à l'école : près des deux tiers des sympathisants de gauche (63% versus 49% pour la moyenne des Français) considèrent en effet qu'aujourd'hui c'est l'école qui défend le mieux la laïcité.

La seconde, pour sa part, est partagée de manière plus importante à droite et surtout parmi les sympathisants Front national, qui pour 23% d'entre eux considèrent que la laïcité c'est avant tout interdire le port des signes religieux dans l'espace public, versus 16% à droite et 5% à gauche. A ce prisme punitif s'ajoute le sentiment partagé par près d'un sympathisant frontiste sur 2 (48%) que personne ne défend aujourd'hui la laïcité, versus, 35% des Français qui partagent cet avis.

Une lecture générationnelle des principes républicains et de la laïcité

Sans doute plus individualistes mais aussi plus sensibles au fait qu'on leur laisse la liberté de s'exprimer et de s'émanciper au sein de la société française, les 18-24 se distinguent de l'ensemble des Français et de leurs aînés lorsqu'il s'agit de définir les principes républicains les plus importants et les contours de la laïcité.

Ainsi, pour une majorité d'entre eux (56%), la liberté d'expression est le premier des principes républicains alors que pour l'ensemble des Français c'est avant tout l'égalité entre les citoyens (52%). Le constat est identique lorsque les 18-24 ans définissent la laïcité puisque ils sont 28% versus 21% pour l'ensemble des Français et 16% des plus de 65 ans à considérer qu'elle est avant tout un moyen de permettre la liberté de culte et de conscience.