Facebook et les groupes de soutien

Publié le 22 janvier 2016 par Raymond Viger

Les semaines ont défilé. Je commençais à connaître les membres du groupe, tandis que je m’étais présenté aux administrateurs en leur exposant l’objectif de ma présence. Une présence passive. Je voulais rentrer dans la tête de ces personnes pour comprendre ce qu’est être bipolaire.

Ces groupes sont comme un exutoire pour les membres. Ils y parlent de façon très explicite de leur quotidien et de leurs inquiétudes/expériences en hôpital psychiatrique. C’était ce que je recherchais, mais avoir accès aux pensées de plusieurs centaines de personnes pour la plupart en phase de dépression peut «plomber» un individu.

Omniprésence de Facebook

Comme d’autres, j’ai mon Facebook ouvert pendant que je suis au travail. Même si le coté divertissement est présent, et il surtout indispensable à mon métier.

Un groupe avec plusieurs centaines de membres venant de toute la francophonie, c’est 24 heures sur 24 que les messages affluents… que je sois au travail, le soir chez moi, la fin de semaine, etc. Les posts de mes amis sont entrecroisés de scarification et de dépression. Évidemment, ça ne tenait qu’à moi de régler mes paramètres pour ne plus que les messages du groupe apparaissent dans mon fil. Mais je voulais comprendre.

Sincèrement, au début tout cela ne m’atteignait pas. Mais au fil des semaines, je me suis sentie envahi par les récits de montées de violence et les épisodes suicidaires.

Cela me faisait penser aux journalistes qui ont fait le test d’aimer sur Facebook une page consacrée à l’islam radical. En quelques heures, c’est leur fil entier qui s’est transformé en message de propagande. Un des journalistes avait d’ailleurs confié être bouleversé par cette expérience.

La mienne n’avait aucun rapport évidemment et je n’étais pas parti avec l’objectif de faire une expérience.

Mais un soir, l’une des membres écrit qu’elle va se suicider, elle est prête. Les messages tentant de la dissuader vont crouler et une personne en particulier est atteinte. Elle est quasiment en crise de panique.

Le lendemain, la membre qui avait déclaré vouloir se suicider s’est excusée et a annoncé se prendre en main. Mais pour d’autres, ces quelques lignes ont été importantes et les ont affectés au point que le psychiatre de l’un d’eux lui demande de se retirer de ce groupe.

Aide en bout de ligne?

Pour mon article, j’ai fait différentes entrevues et la majorité loue les services que peuvent rendre les réseaux sociaux. Les personnes ayant une dépendance, par exemple, peuvent y trouver un soutien à 3h matin s’ils sont au bord de la rechute. Pour ceux qui sont isolés, c’est une façon d’échanger avec d’autres comprenant leur réalité.

Mais la question que je me pose est: est-ce que ces groupes peuvent biaiser la réalité et maintenir dans un certain marasme les membres? En période d’inquiétude, on veut partager, exprimer ce que nous avons sur le cœur. Mais lorsque tout va bien, les personnes ont davantage tendance à sortir de ces milieux pour profiter de leur vie. L’intervention se fait donc beaucoup entre personnes en crise. Est-ce toujours pour un bien?

Et vous, fréquentez-vous des pages de soutien? Comment le vivez-vous?

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