Le premier long-métrage du duo de jeunes réalisateurs, Quentin Reynaud et Arthur Delaire, Paris-Willouby est un tendre road-movie qui nous entraîne sur les routes cahoteuses de la famille contemporaine.
Alors qu’ils apprennent le décès d’un grand-père qu’ils n’ont pas vu depuis des années, les Guilby Lacourt, une famille recomposée, quitte Paris dans leur vieille voiture, destination Willouby. Dans le microcosme du vieux tacot, les ressentiments des uns et des autres ne peuvent que s’exprimer. Claire (Isabelle Carré que l’on a vu dans Ange et Gabrielle), Maurice (Stéphane de Groodt que l’on a vu dans Barbecue), Marc (Alex Lutz que l’on a vu dans, et qui a réalisé, Le Talent de mes amis et qui a fait la voix de Oh dans En route !), Lucie (Joséphine Japy), Alexandre (Solal Forte) et Prune (Aminthe Audiard) vont devoir apprendre à vivre ensemble.
Lucie Guilby (Joséphine Japy), Alexandre Le Tallec (Solal Forte) et Prune Guilby (Aminthe Audiard)
On ne compte pas moins de trois branches familiales chez les Guilby Lacourt. Le couple a en charge leur enfant commun, Prune, et le fils de Claire, Alexandre. Lucie, la fille de Maurice a été déposé par sa mère en dehors des droits de visites pour aller rejoindre un amant. Au milieu de tout ceux-là, comme une cerise sur le gâteau, le frère de Claire, Marc, écrivain sans inspiration,squatte une chambre de la maison où il reçoit parfois sa compagne, Angélique (Jennifer Decker que l’on a vu dans L’hermine). Tout va bien, vous suivez ? À droite et à gauche, les films sur le sujet ont souvent pour but de dénoncer une certaine déréliction de la famille ou du moins l’incapacité de s’écouter dans notre monde moderne. Il n’en est rien dans Paris-Willouby qui pose sur cette famille un regard apaisé ce qui le rend fort agréable. Malgré les apparences chaotiques, les ego des uns et des autres à gérer, l’amour filial flotte dans l’air comme une douce musique réconfortante. Chacun à leur manière, les personnages sont touchants. D’autant que les acteurs sont très justes. Nous avons d’ailleurs des félicitations à adresser à la jeune Aminthe Audiard qui, l’air de rien, tient quasiment le rôle principal et avec un certain brio. C’est que la petite dernière qui ne comprend pas tout, certaines disputes anciennes la dépassent forcément, est le ciment de cette famille.
Maurice Guilby (Stéphane de Groodt)
Alex Lutz confirme son talent d’acteur, dont nous doutions avec Catherine et Liliane, mais qui nous avait surpris dans Le talent de mes amis, sa propre réalisation. Isabelle Carré et Stéphane de Groodt forme un vieux couple crédible avec tout l’attirail conventionné. Et ce que l’on aime, à la suite du poète, ce sont ces couples attachant qui « s’offre le temps qu’il reste de jeunesse à l’été finissant ». Vous ne trouverez pas Willouby sur une carte de France, c’est un lieu fictif inventé par les réalisateurs, le lieu de la réconciliation familiale où flotte un l’on ne sait quoi de magique. Un rien de magie y règne dans l’imagination de la famille après qu’ils aient constaté que le village se loge dans la vallée des vaches perdues et que celle-ci fassent des apparitions fantomatiques. Au milieu des micro-drames permanents, Paris-Willouby est finalement une comédie douce-amère bercée par le rêve d’une meilleure entente entre génération et invitant au pardon. Bien sur, chacun regarde midi à sa porte, bien sur, les enfants peuvent parfois se sentir abandonné et les parents dépassés mais être s’aigrir ne résous rien. Les révélations divulguées petit à petit sur la vie du grand-père sont un véritable crève-cœur émouvant qui donne à relativiser nos vieilles rancœurs tenaces.
Maurice Guilby (Stéphane de Groodt), Prune (Aminthe Audiard) et Claire Lacourt (Isabelle Carré)
Souvent drôle, constamment émouvant, sur la brèche entre le drame familial et le road-movie comique, Paris-Willouby est une belle surprise.
Boeringer Rémy