La villa Cavrois est considérée comme l’un des chefs-d’œuvre de l’architecture moderne de l’entre-deux-guerres, alliant novations technologiques et esthétique, conçue par Robert Mallet-Stevens.
Une demeure familiale
Paul Cavrois est un industriel du Nord, près de Roubaix, qui a fait fortune dans le textile et décide en 1929 de se faire construire, à Croix, une maison capable de rivaliser avec toutes les maisons bourgeoises de la région.
Il rencontre l’architecte Robert Mallet-Stevens à qui il confie un cahier des charges précis décrit par l’architecte dans Une demeure 1934 :
« Demeure pour une famille nombreuse. Demeure pour une famille vivant en 1934 : air, lumière, travail, sports, hygiène, confort, économie ».
L’architecte ajoute à ces contraintes de Cavrois les technologies avancées de l’époque : chauffage central, éclairage, ventilation, ascenseur, téléphone et T.S.F. (radio).
C’est peu dire que cette approche est novatrice dans la France des années 30.
Mallet-Stevens imagine alors une œuvre d’art totale (1800 m2 de surfaces habitables), qui constitue un cas exemplaire de construction homogène entre architecture, décor et mobilier.
C’est un manifeste technique et esthétique dans le soin apporté aux matériaux et aux équipements ; Mallet-Stevens contrôle tout : les briques de la façade, les poignées de porte, chaque revêtement de mur, la construction des meubles, le choix des chaudières …
Tout.
Visitons-la ensemble…
L’entrée dans la villa impressionne, car la maison est située au milieu d’un grand parc, décentrée par rapport à la rue, et initialement accessible par une immense rotonde qui permettait l’accès aux voitures. Dans le vestibule une volée de marches en marbre blanc et contremarches en marbre noir distribue les espaces de réception. Face à l’entrée, deux boîtes à lumière en acier et verre opalin, rappelant les décors de cinéma conçus par Mallet-Stevens.
Boîte à lumière encadrant la porte d’entrée vers le hall-salon
Dans le salon, tout est fait pour mettre la lumière en valeur. La cheminée monumentale recouverte de marbre jaune, la teinte verte des murs qui rappelle le parc, les espaces immenses.
Coin cheminée habillé de marbre jaune de Sienne
Les différentes pièces ont toutes leur originalité, le poirier verni noirci de la salle à manger, le zingana de la salle à manger des enfants, l’acajou de Cuba du fumoir.
Meuble d’angle en noyer dans le hall-salon
Salle à manger des enfants
La « chambre du jeune homme » rend hommage à l’art moderne hollandais du mouvement De Stijl : murs aux couleurs vives, mobilier polychrome, plafond noir verni.
La « chambre du jeune homme »
Un escalier magistral mène à l’étage où se trouvent les chambres. La chambre des parents est un exemple révélateur de la modernité et du luxe de la maison avec une salle de bains de 60 m2 pourvue de tout le confort connu dans les années 30. Le boudoir est un concentré des savoir-faire de l’époque dans la domaine du mobilier.
Le boudoir attenant à la chambre des parents
Par ailleurs, tout le sous sol (60 m de long) abritait les parties techniques de la maison : buanderie, cuves à mazout, chaudières spectaculaires (la maison consommait 50 000 litres de fuel par an !), stockage du bois, des fruits, cave à vins, local pour les fleurs, salle pour les malles de voyage (sic), garage …….
Lorsque l’on se promène dans le jardin, si on va au bout de la pièce d’eau on voit toute l’harmonie de cette villa.
Façade sud de la villa avec la pièce d’eau
Restauration
Cette villa éclatante a failli être rasée en 1988 pour construire des lotissements... En effet elle avait subi un destin malheureux : dommages dus à la guerre, puis maison laissée à l’abandon, en proie aux pilleurs et aux vandales. En 1985, il ne reste plus guère que les murs éventrés, les sols arrachés et bien sûr tout le mobilier a disparu.
D’abord classée aux monuments historiques en 1990, Il aura fallu le travail du Centre des monuments nationaux à partir du 31 décembre 2008 pour que renaisse cette maison.
Un vaste chantier de restauration s’était mis en place dès 2003, comprenant le renfort des structures, la restauration du clos et du couvert, le jardin, les espaces intérieurs. Le volume initial des pièces et décors ont été restitués à l’identique grâce à des photographies anciennes et aux traces archéologiques du bâti.
Les éclairages, les meubles attachés aux décors comme les étagères ou les banquettes ont été restitués dans leurs matériaux d’origine, ainsi que les parquets, les huisseries métalliques, les marbres. La restauration du parc a permis de retrouver le tracé exact des allées, de replanter les espèces végétales, identifiées grâce à des photos d’époque.
La villa fait partie depuis 2012 d’un programme mondial de préservation des maisons emblématiques du XXe siècle : les « Iconic Houses ».
60 av. du Président-John-Kennedy
59170 Croix
Ouvert en été de 10h30 à 18h30 sauf mardi
En hiver, du 1er novembre au 30 avril, de 10h30 à 17h30 sauf le mardi