L’expressionnisme est un courant artistique apparu au début du XXe siècle, en Europe du Nord, particulièrement en Allemagne. Il a touché de multiples domaines artistiques : la peinture, l’architecture, la littérature, le théâtre, le cinéma, la musique, la danse, etc. L’expressionnisme fut condamné par le régime nazi qui le considérait comme un « art dégénéré ».
L’expressionnisme est la projection d’une subjectivité qui tend à déformer la réalité pour inspirer au spectateur une réaction émotionnelle. Les représentations sont souvent fondées sur des visions angoissantes, déformant et stylisant la réalité pour atteindre la plus grande intensité expressive. Celles-ci sont le reflet de la vision pessimiste que les expressionnistes ont de leur époque, hantée par la menace de la Première Guerre mondiale. Les œuvres expressionnistes mettent souvent en scène des symboles, influencées par la psychanalyse naissante et les recherches du symbolisme.
Au début du XXe siècle, ce mouvement, profondément ancré dans l’Europe du Nord (en particulier l’Allemagne), est une réaction à l’impressionnisme français. Alors que l’impressionnisme est encore à décrire la réalité physique, l’expressionnisme allemand lui ne s’attache plus à cette réalité et la soumet aux états d’âme de l’artiste.
L’expressionnisme rompt aussi avec l’impressionnisme à travers une forme très agressive : des couleurs violentes, des lignes acérées. Il s’inscrit alors dans la continuité du fauvisme qui commence à s’épuiser et dont les principaux représentants s’éloignent plus ou moins brutalement. Pour autant l’expressionnisme n’est pas vraiment un mouvement ou une école mais davantage une réaction contre l’académisme et la société. Les artistes expressionnistes resteront souvent isolés.
Les premiers éléments annonciateurs de l’expressionnisme apparaissent à la fin du XIXe siècle, en particulier dans la série d’Edvard Munch intitulée Le Cri ainsi que dans l’évolution des travaux de Van Gogh et de James Ensor. Le critique d’art Wilhelm Worringer, en 1908, est le premier à parler d’expressionnisme.
L’expressionnisme éclot par ailleurs alors que la technique photographique se perfectionne et que le rapport de l’art à la réalité s’en trouve profondément modifié. L’art pictural perd sa fonction de moyen privilégié de reproduction de la réalité objective ce qui renforce sa composante subjective et lui permet progressivement de s’affranchir des normes.
Plusieurs groupes peuvent être rattachés à l’expressionnisme, tels que la Nouvelle Association des artistes munichois (NKVM) et la Sécession de Berlin dont sont issus par rupture, respectivement Der Blaue Reiter et Die Brücke. En 1918, le Novembergruppe en cristallise la portée politique. Après 1933, le mouvement, dans sa dimension formelle, a influencé nombre d’autres artistes, comme les expressionnistes abstraits aux États-Unis, puis les néo-expressionnistes.
Otto Dix
Otto Dix (né à Untermhaus, près de Gera, le 2 décembre 1891 – mort à Singen le 25 juillet 1969) est un peintre et graveur allemand associé aux mouvements de l’expressionnisme et est un des fondateurs de la Nouvelle Objectivité.
Otto Dix est issu d’un milieu ouvrier (son père travaillait dans une mine de fer), mais reçoit une éducation artistique par sa mère, qui s’intéressait à la musique et à la peinture. Après avoir suivi les cours du professeur de dessin Ernst Schunke pendant sa jeunesse, Dix prend des cours à Gera de 1905 à 1909 auprès de Carl Senff, qui doute de l’avenir de son élève en tant que peintre. Une bourse d’étude fournie par le prince de Reuss lui permet d’entrer à l’École des arts appliqués de Dresde, où il étudie entre 1909 et 1914. Johann Nikolaus Türk et Richard Guhr figurent parmi ses professeurs. Dix s’essayera au cubisme, au futurisme et plus tard au dadaïsme.
Quand la guerre éclate, il s’engage comme volontaire dans l’artillerie de campagne allemande. L’année suivante, il reçoit une formation de mitrailleur et participe à de nombreuses campagnes en Champagne, dans la Somme ou en Russie dont il sortira vivant. Il a alors en tête des images d’horreur qu’il essaie d’oublier en peignant, comme en témoigne Les Joueurs de skat en 1920.
Son œuvre la plus aboutie témoignant des expériences traumatisantes vécues lors de la guerre est le portefeuille de cinquante eaux-fortes, Der Krieg, publié en 1924. Il compose également son triptyque La Guerre entre 1928 et 1931. Le but de cette œuvre n’est pas de provoquer angoisse ou panique, mais de « simplement transmettre la connaissance du caractère redoutable de la guerre, pour éveiller les forces destinées à la détourner ».
De 1919 à 1922, Dix étudie également à Düsseldorf, avant d’adhérer au mouvement réaliste et satirique Neue Sachlichkeit (Nouvelle objectivité). Il enseigne ensuite les beaux-arts à Dresde à partir de 1927.
Après la prise du pouvoir par les nazis en 1933, Dix, alors enseignant à l’université, est l’un des premiers professeurs d’art à être renvoyé, persécuté parce qu’il est considéré comme « bolchévique de la culture » par les nationaux-socialistes. La même année, menacé de prison et de camp d’internement, il commence une « émigration intérieure » dans le sud-ouest de l’Allemagne (à Randegg en 1933 puis à Hemmenhofen en 1936), près du lac de Constance, où il se met à peindre des paysages.
En 1937, ses œuvres sont déclarées « dégénérées » par les nazis. Quelque 170 d’entre elles sont retirées des musées et une partie est brûlée ; d’autres sont exposées lors de l’exposition nazie « Art dégénéré » (Entartete Kunst). À titre d’exemple, la toile intitulée La Tranchée, peinte en 1918, a probablement été détruite par les nazis.
En 1938, Dix est arrêté et enfermé pendant deux semaines par la Gestapo. Durant ces temps difficiles, il peint une représentation de Saint Christophe dans le style des grands maîtres à la demande de la brasserie de Köstritz.
Il participe par obligation à la Seconde Guerre mondiale. Il sert sur le front occidental en 1944-1945. Il est fait prisonnier en Alsace par les Français.
À la fin de la guerre et jusqu’à sa mort, Dix s’éloigne des nouveaux courants artistiques allemands. Il ne s’identifie ni au réalisme social en vogue dans la République démocratique allemande, ni à l’art d’après-guerre dans la République fédérale d’Allemagne. Il reçoit pourtant de hautes distinctions et des titres honorifiques de ces deux états.
Otto Dix meurt le 25 juillet 1969 à Singen, près de Constance, des suites d’un infarctus.