Il existe par conséquent un véritable flou autour de ce fameux syndrome lorsqu’on explique aux gens qu’en fait, ils font fausse route dans leur approche & leur compréhension de cette particularité.Difficulté supplémentaire : ils ne savent pas quel mot poser sur l’autisme…
« Maladie » ? Est-ce une maladie ??? (question qui m’est souvent posée…) Il faut dire que les articles de presse où l’on accole le terme de maladie à l’autisme sont légion !Alors encore une fois : non, l’autisme n’est pas une maladie. C’est un trouble neuro-développemental
Pour reprendre les termes de la Haute Autorité de Santé, l’autisme est un trouble précoce du développement du système nerveux central. Le terme de « trouble » a toute son importance, car il est la traduction exacte du mot anglais disorder.Il est erroné de parler de maladie, plus encore de maladie neurologique dans l’état actuel de nos connaissances, puisque il n’y a pas d’anomalies ou de lésions du tissu nerveux. Pas plus que de maladie mentale cachée derrière l’autisme.Estampillée « Trouble Envahissant du Développement » (d’où l’acronyme que vous avez probablement déjà croisé : TED), en référence au caractère extensif, précoce & durable d’anomalies dans plusieurs domaines du développement, la notion d’autisme a été progressivement amenée à se définir comme « Troubles du Spectre Autistique » (d’où le sigle TSA).Le syndrome d’Asperger, au même titre que le syndrome de Rett ou que l’autisme dit de haut niveau, est un TED, & un TSA ! En aucun cas une « maladie » telle qu’on la pense & qu’on la définit Mais justement, ce fameux autisme de haut niveau vient lui aussi ajouter de la confusion à la confusion.
D’abord de par son nom : lorsqu’on parle de « haut niveau », beaucoup comprennent « sudouement », confusion extrêmement fréquente avec le haut potentiel intellectuel, c’est à dire un Quotient Intellectuel ≥ à 130.
Or, l’autisme dit de haut niveau est appelé ainsi seulement par opposition à l’autisme sévère (également appelé autisme de Kanner), dont les sujets ont quelque fois un QI ≤ 70 (selon les données existantes, tous TED confondus, 30% des autistes seraient dans la zone de déficience intellectuelle).Ainsi, dans le cas de l’autisme dit de « haut niveau », il n’est question que de QI situé dans la norme, c’est à dire > à 70 sur l’échelle de Wechsler, pas particulièrement de QI ≥ à 130. Il faut bien garder à l’esprit que 68% de la population a un QI situé entre 85 & 115, & en élargissant à 2 écart-types de la moyenne (qui est placée à 100), on a 95% de la population entre 70 & 130. C’est la norme.
Et donc, lorsque l’on parle d’autisme de haut niveau, on pointe du doigt des personnes avec autisme, mais sans déficience intellectuelle, donc de fait, situées dans cette norme.A propos de capacités cognitives, il en va de même avec le syndrome d’Asperger. Il n’est pas rare de lire ou d’entendre que les Aspies sont toujours, ou très souvent, surdoués. Mais c’est faux
La définition de ce trouble met en avant l’absence de déficience intellectuelle, point ! Cela signifie uniquement que le QI est > à 70 sur l’échelle de Wechsler, pas qu’il est > à 130.
Si certains Aspies présentent un haut QI (≥ à 130), voire un très haut QI (≥ à 145), il est important de rappeler que la plupart d’entre eux ont des scores situés dans la norme, sans plus.Mais au delà des questions de scores aux tests psychométriques, ayant au fond peu d’importance, le syndrome d’Asperger se manifeste très différemment d’une personne à l’autre. Je dis souvent qu’il y a autant d’autismes que d’autistes
Certains Aspies seront dotés d’un talent exceptionnel dans un domaine très précis, d’autres auront des facultés hors norme dans un ensemble plus large ; mais une chose les unit tous : leurs difficultés à interagir socialement & à évoluer parmi les personnes neurotypiques.Pourtant, de nombreux adultes touchés par le syndrome d’Asperger n’ont jamais atterri entre les mains de psy, & la plupart ignorent même totalement qu’ils sont Aspies.
Parce que leur besoin de solitude, leur manies, ce que j’appelle leurs « bizarreries » ou encore leur grande naïveté, s’ils ne sont pas trop accentués, peuvent tout à fait donner l’impression qu’ils sont seulement des originaux…
Quant aux adultes d’aujourd’hui qui ont consulté à l’époque de leur enfance ou leur adolescence, ils ont flotté entre divers diagnostics :
« Les symptômes du syndrome d’Asperger ont été longtemps confondus avec la déficience légère, l’obsession-compulsion, l’hyperactivité ou la schizophrénie. »Il y a à peine une 20aine d’années, les psychiatres élargissaient la définition de l’autisme en y incluant les autistes loquaces, en considérant cependant toujours ces derniers comme déficients mentaux. C’est véritablement à l’émergence du syndrome d’Asperger que la communauté médicale s’est ouverte à la perspective d’une intelligence chez certaines personnes autistes En 1943 le pédiatre autrichien Hans Asperger est le premier à avoir décrit le syndrome qui portera son nom par la suite, en notant dans sa thèse les caractéristiques de l’autisme chez des enfants dont l’évolution du langage semblait normale. Cette description sera publiée l’année suivante dans le journal « Archiv für Psychiatrie und Nervenkrankheiten » (Archives de la psychiatrie & des maladies nerveuses).
Pr Laurent Mottron, psychiatre & chercheur français en neurosciences cognitives, directeur scientifique du Centre d’excellence en troubles envahissants du développement de l’Université de Montréal (Cetedum)
La même année (1943), le psychiatre austro-hongrois Léo Kanner, exilé aux États-Unis depuis de longues années, publie un article, intitulé « Autistic Disturbance of Affective Contact », où il postule à partir de 11 cas d’enfants (8 garçons & 3 filles) qu’il suit depuis 1938 que plusieurs troubles qui étaient auparavant dispersés sous des appellations variables, ne forment en réalité qu’une seule problématique. L’appellation « autisme infantile précoce » est donnée l’année suivante au syndrome qui porte aujourd’hui son nom, l’autisme de Kanner.
Mais les recherches de Léo Kanner ont totalement éclipsé celles d’Hans Asperger, & malheureusement, la thèse de ce dernier sur les enfants autistes loquaces dormira dans l’indifférence la plus complète pendant près de 40 ans.C’est Lorna Wing, psychiatre britannique spécialiste de l’autisme, qui la dépoussiérera au début des années 80. Et il faudra encore attendre 1991 pour que les écrits d’Hans Asperger soient enfin traduits en anglais, par la psychologue Uta Frith, pionnière dans l’étude de la dyslexie & de l’autisme, avant d’attirer l’attention de la communauté scientifique, puis… tardivement… celle de l’Organisation Mondiale de la Santé.Aujourd’hui, on parle volontiers de « continuum autistique » afin de signifier la grande diversité de profils rencontrés dans l’autisme.
Dans ce concept, il y a 3 dimensions de troubles qui peuvent variables de par leur nature comme de par leur intensité. C’est que l’on nomme la « triade autistique » qui comprend à la fois :
- les interactions sociales
- la communication
- les intérêts & activités limités, restreints, stéréotypés
Il y a donc pour la CIM-10 huits catégories de TED séparés & indépendants avec des troubles qui leur est propre (à noter que cette classification est en cours de révision) :
- F84.0 autisme infantile l’autisme sévère
- F84.1 autisme atypique (3 sous-classes ont été proposées par l’OMS : autisme atypique en raison de l’âge de survenue, autisme atypique en raison de la symptomatologie, autisme atypique en raison de l’âge de survenue et de la symptomatologie)
- F84.2 syndrome de Rett
- F84.3 autre trouble désintégratif de l’enfance
- F84.4 hyperactivité associée à un retard mental et à des mouvements stéréotypés
- F84.5 syndrome d’Asperger
- F84.8 autres troubles envahissants du développement
- F84.9 trouble envahissant du développement, sans précision
Selon la communauté scientifique, rien ne permet de déterminer en amont quels enfants atteindront un fonctionnement de haut niveau mais une prise en charge précoce & adaptée maximisera les chances.L’autisme de haut niveau est donc dissocié du syndrome d’Asperger. Il n’est pas un autre nom que l’on aurait donné au SA, comme on parle par exemple de surdouement & de précocité intellectuelle pour une seule & même chose Ce qui caractérise l’autisme de haut niveau : un retard de langage (& bien souvent, dans les profils cognitifs, de faibles scores aux subests verbaux des tests psychométriques). Ce qui n’est absolument jamais le cas chez les personnes touchées par l’autisme Asperger qui, elles, parlent toujours en âge normal (voire bien plus précocement !) & maîtrisent particulièrement cette sphère langagière.Certains Aspies tiennent comme à la prunelle de leurs yeux à cette distinction & sont fortement agacés quand, dans les médias, on parle de syndrome d’Asperger pour des autistes qui n’ont par exemple pas été loquaces avant l’âge de 6 ans
C’est une hérésie pour ces farouches défenseurs du syndrome d’Asperger en tant qu’entité pleine & entière.Personnellement, je n’apporte pas une grande importance à cela, & je pense qu’à l’âge adulte les 2, syndrome d’Asperger & autisme de haut niveau, se rejoignent dans les grandes lignes.
Il est intéressant de souligner qu’aux États-Unis par exemple, les livres sur le SA couplent très souvent dans leur titre le « High-Functioning Autism »