Comment prouver la discrimination ?

Published on juin 11th

C’est la question qui fait débat en ce moment alors que la Halde (Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité) présentait aujourd’hui les résultats du premier “testing” de grande envergure.

Le testing, pratique qui permet de traquer les discriminations en simulant par exemple une demande d’embauche d’une personne issue d’une “minorité” ethnique ou sexuelle, a été légalisée en France par le gouvernement Villepin en janvier 2006.

Les résultats de ce testing organisé auprès de 15 entreprises du CAC 40 tirées au sort (dont Accor, Veolia, Lagardère…) et de 5 entreprises d’intermédiation financière s’est révélée décevante puisqu’elle ne donne quasiment aucun chiffre, décernant juste des bons points, sans guère de précision. 3 entreprises se retrouvent épinglées, notamment le groupe Accor. Ainsi, Louis Schweitzer, le président de la Halde, a révélé qu’«un écart apparaissait au détriment des candidats d’origine africaine pour le site AccorJobs [le site de recrutement du groupe Accor, nda]». Un rapport qu’Accor a tôt fait de contester. Chez les autres entreprises, «soit il n’y a pas d’écart et donc elles ne discriminent pas, soit cet écart n’est pas assez significatif», explique Schweitzer. En se limitant, pour l’essentiel, au CAC 40, la Halde ne s’attendait pas non plus à une pêche miraculeuse : «Ces entreprises ont toutes une politique contre les discriminations et ont l’habitude d’être surveillées. Par ailleurs, je les avais prévenues, en expliquant dès 2006 que nous procéderions à des testings», expliquait hier Schweitzer.

Des résultats pas concluants du tout d’autant plus que des erreurs ont été commises par la Halde qui aurait à plusieurs reprises envoyé des CV qui ne correspondait pas du tout aux offres d’emploi, comme le révélait le Canard Enchaîné en avril dernier. Autre faiblesse de l’entreprise de la Halde, le testing a été organisé sur les plate-formes d’offres d’emplois en ligne, moins sujettes aux pratiques discriminatoires.

L’initiative est louable car les luttes contre les discriminations ethniques et sexuelles (et d’âge, d’handicap..) sont un véritable fléau dont on ne parle que depuis peu, grâce notamment à la Halde. Mais comment distinguer la discrimination abusive, c’est-à-dire sur des critères ethniques ou sexuelles, et la discrimination “normale”, celle qui est inhérente à toute embauche. Tout choix peut être interprété comme une discrimination, comment peut-on choisir sans discriminer ?

Comment donc lutter contre la discrimination abusive (qu’elle soit d’ailleurs dite “positive” ou “négative”) ? Comment la prouver ?

C’est à cette deuxième question que devra réfléchir cette jeune institution qu’est la Halde, qu’il faut, je pense, encourager à continuer !

(Photo : lsgyarmati, “Discrimination”)