La vie en Rosalie de Nicolas Barreau chez Héloïse d'Ormesson

Par A Bride Abattue @abrideabattue
C'est le troisième ouvrage que je lis, après le formidable Sourire des femmes qui valut à Nicolas Barreau la notoriété en France. Son éditeur, Heloïse d'Ormesson publia alors très vite Tu me trouveras au bout du monde. Le style était moins affirmé, en toute logique car c'était son premier roman paru en 2008 en Allemagne.
Je ne sais pas si La vie en Rosalie a été écrit avant ou après le Sourire des femmes. Comme dans ses précédents romans, Nicolas Barreau y construit une histoire mutine dont le charme est un peu anachronique. On est toujours dans le 6ème arrondissement de Paris que cet auteur franco-allemand semble affectionner plus que tout. On retrouve ainsi l'hôtel des Marronniers, le pont des Arts ... Les personnages n'ont pas la même identité mais on a l'impression de lire un épisode d'une longue et unique série.
Rosalie Laurent tient une jolie papeterie à Paris où elle confectionne et vend des cartes poétiques. Un jour, un vieil homme entre et renverse un présentoir. Séduit par le talent de la jeune femme, il lui propose d’illustrer un conte, Le Tigre bleu. Ravie de cette heureuse collaboration avec un auteur célèbre et qui a bercé sa jeunesse, elle expose l’ouvrage publié dans sa devanture. Un professeur de littérature anglo-saxonne, fraîchement débarqué des États-Unis, surgira dans son magasin et, après avoir lui aussi renversé un présentoir, soutiendra mordicus que l’histoire du Tigre bleu lui appartient. Max Marchais serait-il un plagiaire ? Les deux jeunes gens, d’abord hostiles, vont faire cause commune pour enquêter et mettre au jour un secret qui les liera à tout jamais.
Elle s'appelle Rosalie mais elle ne voit la vie qu'en bleu. Elle fait office d'écrivain public en écrivant des cartes de voeux personnalisées et uniques dans sa boutique Luna-Luna. Comme on n'est jamais si bien servi que par soi-même elle s'en fait une, pour chacun de ses anniversaires, qu'elle jette du haut de la Tour Eiffel. Elle a un autre rituel qui est de noter tous les soirs le meilleur et le pire moment de la journée.
L'auteur nous prévient très vite (p. 11) qu'une histoire de tigre bleu dissimule un secret qui va impacter sa vie. Autant dire qu'on lira l'histoire en question (p. 67) sans songer au hasard. Comme le dit Nicolas Barreau, faisant semblant de ne pas y croire : il n'y a pas de hasard, il n'y a que des rendez-vous.

Il nous incite à croire que l'on est constamment dans la répétition. L'enfance est le sol sur lequel nous marcherons toute notre vie, écrit-il à propos d'un écrivain dont il ne révèle pas le nom. Une recherche rapide m'a permis de découvrir que c'était une parole d'une romancière brésilienne, Lya Luft, tirée d'un livre dont le titre semble prémonitoire, Pertes et profits.


Nicolas Barreau distille ses idées fixes au fil de ses romans. Ne jamais abandonner ses rêves est sans doute la plus fondamentale.
La lecture est agréable mais sans réelle surprise, parce qu'on connait désormais bien la manière qu'à cet auteur de nourrir de coïncidences le destin du couple qu'il met en scène, ce qui, en fin de compte, nuit au suspense. On sait d'avance que Rosalie et Robert devront surmonter plusieurs malentendus avant d'être réunis. On se doute qu'avec deux prénoms qui sonnent comme une allitération iront forcément très bien ensemble ...
Nicolas Barreau est le pseudonyme de quelqu'un qui travaille dans le monde de l’édition et qui se cache, ce qui empêche tout dialogue avec lui (ou elle ...) et qui nuit sans doute à la remise en question. C'est dommage parce que le Sourire des femmes nous a rendu exigeants.

La vie en Rosalie de Nicolas Barreau chez Héloïse d'Ormesson, traduit de l'allemand par Sabine Wyckaert-Fetick, en librairie le 14 janvier 2016