D'après CONTE DE NOËL (25 décembre 1882)
Médecin près de Caen, j'eus l'occasion en décembre 1882 d'assister à un miracle. Cette année-là, la chute des flocons blancs commença trois jours avant Noël. En une nuit, toute la plaine fut ensevelie.
Un matin, un de mes patients, le père Brunet trouva un œuf posé sur la neige. Médusé, il le porta à sa femme :
-" Tiens, v'là c' que j'viens d' ramasser ! "
Méfiante, Jeanne Brunet l'examina :
-" Un œuf ? Par ces temps ? Dame ! " Puis elle le fit cuire et le mangea.
-" Eh bien ! Qué goût il a ? ", demanda son mari. Elle ne répondit pas.
Pendant les deux heures qui suivirent, elle put vaquer à ses occupations habituelles mais vers quinze heures, elle fût secouée de tremblements, de la tête aux pieds. Elle poussait aussi d'horribles cris. Jeanne était devenait folle. Le père Brunet fut obligé de l'attacher sur son lit.. Il me fit venir. Le remède que je prescris ne lui apporta aucun soulagement.
Le curé du village fut appelé. Il accourut, tenta d'exorciser sa paroissienne mais il eut beau étendre les mains, il n'arrivait pas à chasser l'esprit malin. Il se signa et me confia :
-" Comme demain c'est Noël, je vais la faire venir ce soir à la messe de minuit. Le Seigneur fera peut-être un miracle en sa faveur. "
Après souper, malgré ses horribles spasmes, on réussit à vêtir et conduire la folle à l'église.
Après le gloria, le prêtre s'avança dans la nef, éleva l'ostensoir devant la démoniaque et le présenta à son regard effaré. Elle le contempla avec étonnement. Puis soudain, ses yeux se sont fermés. Hypnotisée, elle s'endormit.
Oh, non ! Pardon ! Il faut dire : '' grâce à sa contemplation, le mal disparût. Satan était vaincu par le Christ victorieux. ''
Le curé remonta à l'autel et on ramena Jeanne chez elle.
Elle dormit quarante-huit heures d'affilée.
Elle n'a jamais su qu'elle avait été possédée !