Je poursuis deux démarches entreprises en 2015. La découverte des productions littéraires produites depuis le continent africain et l’exploration du catalogue des oeuvres littéraires numérisées. Et je dois dire que je suis relativement surpris par les différentes oeuvres que j’aborde chaque fois. Souvenez-vous Tachetures du Guinéen Hakim Bah ou Vol à vif du Malgache Johary Ravaloson… Actuellement, je suis partagé entre deux lectures, celles de L’ombre du pont de l’Ivoirien Josué Guébo et Madame à campagne de Michèle Rakotoson. Le péché de l’auteur ivoirien Seydou Koné s’inscrit dans cette dynamique.
Il s’agit d’un livre qui été édité initialement aux éditions Edilivres et Balafons avant de faire l’objet d’une coédition numérique aux NENA (Nouvelles Editions Numériques Africaines). Le sujet est intéressant. Le jeune auteur ivoirien a choisi de traiter la stérilité masculine en Afrique. On est dans un pays qui ressemble à la Côte d’Ivoire. Seydou Koné de raconter l’histoire d’une amitié. Bamba et Baro Yacou se connaissent depuis l’arrière pays. Ils ont fait le collège et le lycée ensemble. Ils abordent l’université avec ses joies, sa nouveauté, ses difficultés. Ils couvrent leur cycle universitaire en lettres en deux fois plus de temps que prévu. Et pour cause, le campus est en proie à des violences et au racket des étudiants de l’ADE. Entre les lignes de Seydou Koné, j’ai cherché à reconnaître le campus de Cocody. A tort surement puisque dans les années 90, il y avait de nombreuses cités universitaires. La description du campus ne ressemblait en rien à ceux que j’ai connus. L’insalubrité. La violence.
Les deux amis entrent dans la vie active. Bamba se lie à Akouba. Si ce couple se construit sur des bases qui semblent solides, des dissensions commencent à transparaître quand le couple apprend l'infertilité venant de Bamba. On est à mi-parcours du roman. Et c’est la première lacune de ce travail. Les descriptions qui introduisent n’ont pas une valeur ajoutée pour le sujet traité. On s’attend à l’abord de cette phase du roman à un meilleur traitement des personnages. Comment chaque acteur évalue la situation? Comment Akouba réagit-elle? Quel chemin de maturation prend son désir d’enfant et finalement de quelle manière Bamba en vient à proposer le « péché » selon le terme de Seydou Koné. Tout cela est traité sans profondeur pour laisser la place au discours moralisateur de l’écrivain. Car le titre n’est pas neutre. Au-delà du pacte que Bamba et Baro Yacou ont tissé pour faire face au défi de la stérilité, tout dans le propos de Bamba n’est que jugement et surprise. Son regard sur les jeunes filles de ses années « lycées » ou des jeunes femmes du campus est chargé de misogynie. Il y a une dénonciation d’une forme d’absence d’éthique et de la corruption dans la société qu’il décrit. Malheureusement cet aspect de la narration prend le pas sur l'ensemble du roman.
Il est intéressant d’observer l’orientation que va proposer Seydou Koné. Je laisse aux lecteurs le soin de la découvrir.
Le roman présente aussi des lacunes sur le plan de l’écriture. Il n’y a pas un effort chez cet auteur de peaufiner son oeuvre, de soigner son écriture, d’assurer ses transitions. Même l’inter-textualité faisant référence à Amadou Koné, son oncle est laborieuse. Le sujet original ne fait malheureusement pas une oeuvre d’art. C’est l’erreur de de Seydou Koné, mais le potentiel et l’originalité sont là. Alors wait and see.
Seydou Koné, Le péchéEditions Edilivres - NENA - Balafons