Beauty Foule - Martina Chyba

Publié le 11 juin 2008 par Ephemerveille

Martina Chyba est journaliste. Après un premier roman largement récompensé par le succès, elle a publié Beauty Foule, aux éditions Favre, renouant avec ses thèmes favoris : les rapports homme/femme... et la sexualité.

Dans cette satire désopilante, Martina Chyba met en scène deux personnages plutôt burlesques : Max, dépuceleur professionnel (le concept existe au Japon) et Agnès, une femme d'affaires à la libido inexistante. Le surpoids de l'un et le physique ingrat de l'autre se révèlent être de sérieux handicaps dans une société de l'apparence dans laquelle l'absurde recherche de la perfection et de la beauté représente un combat quotidien. L'auteur, quelque peu cynique, coupe court à cette mièvre beauté intérieure et annonce la couleur : chez les femmes, il y a les pommes, dont le corps est attrayant, et les poires, les laiderons solitaires. La société est rapidement divisée : il y a les bim-beaux et les bim-moches. Et justement, comment survivre dans ce monde terrifiant dont l'horreur est doublée d'une insatiable mondialisation qui consiste à faire de Wikipédia l'encyclopédie de référence et, pour les hommes laids, à s'inscrire dans des associations de dépucelage de vieilles filles aux corps tout aussi repoussants.

A l'évidence, Beauty Foule est un livre atypique. Martina Chyba propose un forme très modernisée du roman. Son ouvrage ressemble plus à un traitement de texte aux concises et pragmatiques listes a,b,c. D'une page à l'autre, elle numérote les caractéristiques déplaisantes que présentent les célibataires, du domaine de la séduction à celui du code vestimentaire. On parle ici librement de sexe. Et si Martina Chyba franchit parfois largement les limites de la grivoiserie, elle s'abstient fort heureusement de dépasser celles de l'indécence.

On pourrait croire, à la lecture de Beauty Foule, que Chyba a les préoccupations d'une héroïne de Sex and the City. Saupoudrant son texte d'une légère superficialité, irrémédiablement, elle nous fait nous poser la question de savoir si ce petit réquisitoire amène véritablement quelque chose au débat... En tout cas, s'il s'agit de s'amuser, le pari est pleinement réussi, et le côté quelque peu superficiel du livre est dû au fait que Martina Chyba dénonce et distille la futilité de ses personnages qui, malgré le trait forcé et les caricatures, ressemblent beaucoup aux "modèles sociaux actuels de l'insuccès sentimental". L'auteur n'y va pas avec le dos de la cuillère, et, si parfois, son roman, écrit au vitriol, fait preuve d'un certain talent humoristique, quelques excès nous font friser la saturation.

Néanmoins, c'est avec un bagout plutôt effronté que l'éhontée Martina Chyba signe Beauty Foule, un roman décapant, à mi-chemin entre Bridget Jones, Carrie Bradshaw et (l'horripilante) Ugly Betty.