S’endormir dans les eaux de l’origine,
Téter le sein nourricier de la nuit.
Mourir, c’est embrasser le monde bien-aimé.
Qui n’aime pas devient
La lande abandonnée.
Qui ne s’est pas ouvert
Sera pierre fermée.
Qui méprisa rejoint
La cendre secouée.
Mourir, c’est perdre pied sur le bord de l’écueil,
Puis chavirer dans la mer étrangère :
S’enliser dans le marais du silence.
Mourir, c’est passer dans le monde mal-aimé.
Chaque homme se destine
A la mort qui lui plaît.
Mourir, c’est s’accomplir,
Mourir, c’est s’engloutir.
La mort est ta patrie,
La mort est ton exil.
Mourir, c’est devenir le monde où tu vivais.
***
Claude Vigée (né en 1921) – La corne du grand pardon (1954)