Il est 17h30, maintenant je n'ai plus l'ombre de l'espoir d'un démenti : David Bowie est parti. J'ai versé quatorze litres de larmes entre midi et deux et pourtant j'ai toujours du mal à le croire.
Autant vous le dire de suite : ce billet ne vous apportera rien, il m'a juste servi à exprimer ce que cet artiste génial représentait à mes yeux. Aucun autre artiste ne me fera plus jamais cet effet-là...
Ce matin, je reprenais le travail après 7 mois d'arrêt maternité. La principale épreuve à encaisser aujourd'hui aurait dû être la séparation, la toute première séparation, avec LaLutine. Je m'étais préparée à cela, aussi quand je me suis levée ce matin, j'étais plutôt confiante. Je me suis douchée et habillée. Il me restait seulement 5 minutes avant de partir et j'avais la brosse à dents dans le bec quand j'ai reçu un sms de ma tante : " David Bowie est décédé !!!
J'ai failli m'enfoncer la brosse à dents dans le palais.
Je n'y ai pas cru. J'étais sonnée. Je me suis rincée la bouche, j'ai enfilé mon manteau et mes chaussures, j'ai démarré la voiture et je suis partie pour mon premier jour de travail dans ma nouvelle société. J'ai allumé la radio, je ne captais qu'une station et l'information tournait en boucle.
Putain, c'est pas une blague. Une boule s'est logée dans ma gorge, j'ai eu une première montée de larmes mais rien n'a perlé. La matinée s'est passée et à chaque fois que j'arrêtais de parler à quelqu'un, j'avais Starman, Life on Mars ou China Girl qui tournait dans la tête.
Ce midi, profitant exceptionnellement d'une pause déjeuner de deux heures, je suis rentrée à la maison. Le temps de profiter de LaLutine, de manger et de me précipiter sur la télé. Une chaîne, deux chaînes, trois chaînes en parlent. Ca y est, je réalise, j'ouvre les vannes, je pleure pleure pleure sans discontinuer. C'est la première fois que LaLutine me regardera avec des yeux tristes, et ça me fend le coeur encore davantage.
Car voyez-vous, David Bowie c'était c'est le seul artiste, et je dis bien LE SEUL, auquel je sois réellement attachée. Pas pour les paroles de ses chansons, pas pour la diversité de personnages qu'il a incarnée, pas pour son physique ou son histoire. Non non, la raison tiendra en un seul mot :
Ma mère était une fan absolue du blondinet, depuis son plus jeune âge. Je ne suis même pas sûre qu'elle affichait 13 ou 14 ans au compteur quand elle l'a connu, et elle en est tombée amoureuse instantanément. Elle avait économisé une petite centaine de francs pour aller le voir en concert à Caen alors qu'elle n'avait que 17 ou 18 ans. Elle achetait ses vinyles puis plus tard, elle se précipitait sur tous ses CD. A sa mort, j'ai récupéré toute sa CDthèque et ses disques vinyles 33 et 45 tours : Bowie, Bowie et encore Bowie ( et Pink Floyd et Phil Collins aussi ).
J'aime dire que j'ai été élevée au " bibowie " . Il a bercé absolument toute mon enfance. Ma mère était heureuse ? Elle écoutait Bowie. Elle avait le moral dans les chaussettes ? Elle écoutait Bowie. Elle avait envie de danser ? Elle écoutait Bowie. Bien sûr pour éviter la saturation totale de nos esgourdes , elle variait de temps en temps avec d'autres artistes. Mais vers la fin de sa vie, lui et Bashung étaient ses rayons de soleil musicaux. Tous les soirs, je rentrais du travail et 9 fois sur dix, c'était un CD de Bowie qui passait, et elle chantait. A tue-tête quand son putain de cancer lui laissait assez d'énergie pour y mettre tout son coeur, ou plus bas d'une voix presque inaudible quand elle était dans un jour...down dirons-nous.
Ma maman, elle était encore là quand Bashung est décédé, d'un cancer lui aussi et elle l'a pleuré longtemps alors que ce putain de crabe la rongeait elle aussi. Aujourd'hui malgré mon infini chagrin, je suis au moins contente d'une chose : elle n'aura pas vécu la mort de son idole. Et peut-être même que là-haut dans les étoiles, elle le retrouvera. Elle retrouvera son Major David.
Alors pourquoi suis-je autant peinée finalement ? Pourquoi la perte de Michael Jackson à côté de celle de Bowie me semble minime ?
Parce que plus tard, pendant l'adolescence, à l'heure où mes potes écoutaient de la techno et des sons électroniques, j'étais la seule à mettre du Bowie à fond les ballons dans la voiture en rentrant de boîte de nuit. Qu'à l'époque, deux ou trois se fichaient de moi quand ils constataient que je connaissais les paroles par coeur ( plus tard, ils ont failli par basculer du côté Bowie de la Force ).
Pour tout vous dire, ma mère avait organisé ses propres funérailles avant de partir. Elle avait répertorié tous ses souhaits dans un carnet, elle avait compilé des textes qu'elle aimait, elle avait choisi son cercueil et le crématorium où elle allait être incinérée, et surtout elle avait préparé un CD. Evidemment Bowie occupait une très large place sur la galette. J'ai très peu de souvenirs de la cérémonie, j'étais tellement amorphe et à côté de la plaque que je ne me souviens quasiment de rien. Je me rappelle une chose : Thursday's Child qui clôturait les funérailles, je crois que c'est à ce moment-là que mes jambes m'ont lâchée.
Aujourd'hui, cinq années après le décès de ma maman, je suis toujours incapable de l'écouter. Je la pose ici, pour ceux qui ne connaitraient pas ce titre :
Depuis le 12 décembre 2010, David Bowie était en quelque sorte ma bouée de sauvetage. Il m'aura fallu deux ans pour passer des torrents de larmes à une nostalgie beaucoup moins amère et douloureuse en écoutant ses chansons. Deux ans où j'ai dû beaucoup travailler pour être plus sereine et résiliente.
Musclor connaissait peu Bowie. Grâce à la CDthèque de ma mère, il a pu découvrir ( et aimer ) quasiment tous ses titres et pas seulement les emblématiques. Pendant ma grossesse, c'est l'artiste que LaLutine a le plus entendu alors qu'elle ne mesurait guère plus qu'un flageolet. On s'est même fait un karaoké dans le lit avec Musclor et mon gros bide , un karaoké 100% Bowie.
Aujourd'hui, nous sommes le 11 janvier 2016 et Bowie est parti....Parti pour la même raison que ma mère il y a 5 ans. J'avais pensé lui écrire sur sa page Facebook, simplement pour le remercier d'avoir été la Lumière dans la vie de ma maman partie trop tôt. Et puis je m'étais ravisée, jugeant moi-même la démarche pathétique voire désespérée pour capter une seconde d'attention de la rockstar alors que je souhaitais simplement lui témoigner de ma gratitude et de l'amour de ma mère disparue. Aujourd'hui je regrette un peu de ne pas avoir osé.
Aujourd'hui, nous sommes le 11 janvier 2016 et Bowie est parti... C'est pas une mauvaise blague, c'est la vérité, il est devenu poussière d'étoile, il a rejoint ma maman quelque part, peut-être sur Mars, et peut-être qu'il danseront ensemble sur Let's Dance ou chanteront Under Pressure avec Freddy à s'en péter les cordes vocales.
Aujourd'hui, nous sommes le 11 janvier 2016 et Bowie est parti, etsi je suis si triste, c'est parce que j'ai le sentiment de perdre ma maman une seconde fois.
http://lalutotale.com/2016/01/11/mon-coeur-en-poussiere-detoiles/ Blablabla Inclassable ! adieu,artiste,Bowie,chanteur,David Bowie,décès,disparition,fan,hommage,RIP,rock lalutotale@hotmail.fr Administrator La Lu Totale