Avec l'explosion des investissements et l'apparition de ses premières « licornes » (startups valorisées à plus d'un milliard de dollars), la question se pose inévitablement : la FinTech est-elle en train de former une bulle spéculative ? Depuis sa position privilégiée, le CDO de la Silicon Valley Bank expose sa vision dans un article pour Finextra.
Pour aller droit au but, selon Bruce Wallace, le secteur n'est pas aujourd'hui dans un cycle d'excès, susceptible de retournement brutal à court terme. La progression extrêmement rapide des levées de fonds de la FinTech – multipliées par 3 entre 2014 et 2015 – est due avant tout au foisonnement des opportunités pour de nouveaux modèles de services financiers, portés par des acteurs technologiques et encouragés par une certaine forme de rejet des consommateurs vis-à-vis des banques historiques.
Le principal changement ayant permis cette évolution est facile à observer : tandis que, par le passé, les entrepreneurs de la FinTech (avant qu'elle ne prenne ce nom) visaient, pour la plupart, un marché B2B, commercialisant leurs solutions auprès des institutions financières, la génération actuelle vise désormais directement les clients finaux – d'abord le grand public, puis, progressivement, les entreprises. Ce faisant, la transformation s'accélère et commence à esquisser la possibilité d'une rupture profonde.
Rien n'est cependant encore joué. 2016 devrait être une année charnière, qui procurera un début de visibilité sur la concrétisation de la valeur accordée aux sociétés qui sortent de leur phase de croissance initiale (notamment celles qui sont introduites en bourse). Il sera alors possible de mieux distinguer les modèles surcotés de ceux qui se révèleront véritablement disruptifs. Dans un premier temps, ce sont les domaines des paiements et du crowdfunding (au sens large) – représentant l'essentiel (environ deux tiers) des licornes de la FinTech – qui seront sous le feu des projecteurs.
Si quelques exemples récents, à l'instar de Lending Club, peuvent déjà inspirer confiance pour l'avenir, il faudra tout de même quelques mois de recul pour acquérir des certitudes. À mon sens, il subsiste encore de sérieux doutes sur la viabilité de ces (trop) nombreuses pionnières, qui, pour attractives qu'elles paraissent, s'attaquent à des problématiques plus complexes qu'il n'y paraît – entre, par exemple, besoin de massification dans les paiements et gestion dans la durée de la confiance pour le crédit.
Pourtant, quels que soient les résultats de la confrontation des valorisations théoriques aux réalités et même si un ralentissement reste imaginable, Bruce Wallace estime que les conditions sont réunies pour que le mouvement se poursuive et s'amplifie. Un facteur incontestable de cet optimisme est la taille colossale du marché des services financiers – mesuré en billions de dollars – dont une part de plus en plus conséquente est résolument prête à migrer vers des approches différentes, focalisées sur une transparence absolue et sur l'élimination des frictions dans la relation client.