Titre original : The D Train
Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Jarrad Paul, Andrew Mogel
Distribution : Jack Black, James Marsden, Kathryn Hahn, Jeffrey Tambor, Mike White…
Genre : Comédie/Drame
Date de sortie : 5 janvier 2016 (sur OCS)
Le Pitch :
Un père de famille nostalgique du passé préside un comité d’anciens élèves dans le but d’organiser une fête en souvenir du bon vieux temps. Devant le peu d’enthousiasme soulevé par son initiative, il se met en tête d’aller débusquer à Los Angeles un homme qui jadis, était l’élève le plus populaire du lycée, dans l’espoir que sa présence aura pour effet d’attirer l’attention sur la fête…
La Critique :
Jack Black mène de front deux carrières : d’un côté la musique et de l’autre le cinéma. Avec son excellent groupe, Tenacious D, il a offert au rock and roll trois albums et tourne régulièrement sur les scènes du monde entier où il dispense une musique à la fois hyper généreuse, référentielle, comique et redoutable d’efficacité. Devant les caméras, Jack Black n’a jamais tenu à se cantonner à la comédie pure et dure qui a caractérisé ses débuts dans la troupe de Tim Robbins, et navigue entre humour et drame, sans jamais vraiment jouer la sécurité quand il occupe le devant de la scène. En cela, son rôle dans The D Train est particulièrement révélateur.
À priori, le film de Jarrad Paul et Andrew Mogel, qui signent leur deuxième long-métrage, est une pure comédie à l’américaine. Dans les faits, il s’agit tout aussi bien d’un drame doux-amer, qui ne s’interdit pas des éclats de rire, mais livre avant tout une réflexion très touchante sur l’effet du temps et sur la nostalgie qu’éprouvent ceux pour qui le présent ne tient pas toutes ses promesses. Jack Black y incarne ainsi un homme désireux de réunir tous ses anciens camarades de lycée lors d’une grande célébration qui l’imposerait comme une sorte de star. Ce qu’il n’a jamais été à l’époque d’ailleurs. Le truc, c’est que ce grand gamin d’une quarantaine d’années est terriblement frustré. Sa femme aimante et son rôle de père n’arrivent pas à lui faire oublier que les choses auraient pu se passer autrement et peu à peu, s’ancrent durablement dans on esprit des rêves inaccessibles de popularité, auprès d’anciens copains de classe qui, même devenus adultes, ne cessent de l’exclure. Lui vient alors cette idée un peu folle : aller chercher à plusieurs centaines de kilomètres le mec le plus génial du lycée pour revenir en héros auprès des siens, et conférer à sa fête un surplus indispensable de prestige…
The D Train affirme ni plus ni moins qu’il n’est pas toujours bon d’aller fouiller dans le passé. Même si il raconte quelque chose de finalement assez léger, le long-métrage tente néanmoins de creuser un peu plus ses thématiques. Ainsi, le but de la manœuvre du protagoniste principal est en effet d’organiser une fête, mais l’essentiel est ailleurs. Le vrai désir de ce type frustré est d’obtenir une reconnaissance après laquelle il a toujours couru, au point de ne pas accorder plus d’importance que cela à ses réussites, autant personnelles (sa famille), que professionnelles. Ce qu’il va logiquement mettre en péril quand il va se lancer dans son grand périple.
Avec The D Train, Jack Black prouve largement qu’il est tout à fait capable de nuancer son jeu. Un bon pied de nez à tous ceux qui ne voient chez lui qu’un comique un peu outrancier. Ici, encore une fois, il est parfait. Ambigu, troublant, émouvant et bien sûr drôle, son personnage est aussi pathétique qu’attachant et parvient sans forcer à encourager une certaine empathie. En face, James Marsden, alias le type le plus populaire du bahut, incarne à lui tout seul le temps qui passe et qui ne fait pas forcément de cadeau. Sa performance est parfaitement dans le ton et illustre tout aussi pertinemment les intentions d’un script intelligent, aux effets très bien dosés. Kathryn Hahn, de son côté, est une nouvelle fois impeccable dans la peau d’une femme délaissée, pour laquelle on éprouve immédiatement une solide sympathie. Il en est d’ailleurs de même pour le personnage joué par Jeffrey Tambor.
Si le côté dramatique du scénario tire plus souvent la couverture, la comédie se fraye néanmoins un chemin, et s’impose tout naturellement à quelques moments clés. L’avantage avec un acteur comme Jack Black, c’est qu’à tout moment il peut inverser la vapeur sans avoir besoin d’en faire des tonnes. Grâce à lui, les ruptures de ton qui émaillent le récit passent comme une lettre à la poste et les gags s’avèrent souvent très drôles, y compris quand ils s’inscrivent dans un contexte pas vraiment humoristique à première vue.
Chronique tendre et sincère, The D Train est également très attachant. Évoluant en dehors des sentiers battus, il met en avant une histoire simple qu’il arrive à sublimer grâce à la simplicité et à l’honnête de son propos, et le talent de ses acteurs. Sa propension à réussir quelques envolées plutôt audacieuses lui permet aussi de se démarquer plutôt deux fois qu’une, sans forcer le passage à coups de gros clichés et autres gimmicks un peu trop encombrants.
@ Gilles Rolland