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Claude Choplin, syndicaliste policier : «Taubira veut vider les prisons alors qu’il faut les remplir»

Publié le 09 janvier 2016 par Lecriducontribuable

enquêtes du contribuable politique de la villeEntretien extrait desEnquêtes du contribuable #14«Politique de la ville : les racines du mal».En kiosque. Numéro disponible sur notre boutique en ligne. Cet entretien avec Claude Choplin a été réalisé avant les attentats du 13 novembre 2015.

➜ Quelle est la situation dans les cités en matière de sécurité ?

Elle est calamiteuse. Les dizaines de milliards injectés dans les quartiers difficiles depuis une quarantaine d’années n’ont pas servi à grand-chose. Il suffit de voir ce qui se passe à Marseille et ailleurs pour se rendre compte que les délinquants prolifèrent. Démolir des barres d’immeubles pour reconstruire des logements plus coquets à la place est une bonne chose. Mais cela ne sert à rien si l’ensemble des services publics n’est pas rétabli dans ces secteurs, à commencer par l’ordre républicain.

➜ Est-il exact que votre hiérarchie vous demande de ne pas intervenir pour éviter les émeutes ?

C’est souvent le cas. Il s’agit d’éviter de provoquer des incidents générateurs d’autres plus importants. On ne rentre pas dans certains immeubles, car cela pourrait être interprété comme une provocation ! Cette situation procure aux malfrats un sentiment d’impunité.

Que ceux-ci s’en prennent à nous, on peut à la limite le comprendre puisque nous sommes là pour stopper leurs trafics, mais ils caillassent aussi les pompiers. C’est l’État dans son ensemble qui est insulté. Aujourd’hui, pour intervenir dans certains quartiers, il faut intervenir en masse. À Marseille, une descente dans la Castellane mobilise, au bas mot, une centaine d’hommes.

➜ Comment ces bandes sont-elles organisées ?

Elles sont fortement hiérarchisées. Une poignée de caïds fait régner la loi. Ils sont épaulés par des guetteurs, des rabatteurs… souvent mineurs ce qui les rend intouchables d’un point de vue pénal, ou presque. Tout ce petit monde vit des trafics de drogue et d’armes en provenance d’Europe de l’Est. Lorsque l’on saisit de la drogue, on trouve souvent des armes de guerre. La photo de famille, c’est drogue, argent et armes.

➜ Que pensez-vous de la politique judiciaire de Madame Taubira ?

Elle est tout bonnement catastrophique comme l’ont montré les dernières manifestations des forces de l’ordre à Paris suite à l’agression d’un de nos collègues par un voyou qui aurait dû se trouver derrière les barreaux.

La situation actuelle, c’est d’un côté le ministère de l’Intérieur qui tente de ramener l’ordre et, de l’autre, le ministère de la Justice qui promeut le laxisme. Les juges et les policiers ne communiquent pas assez, c’est dommage.

Il faudrait que les juges se rendent compte de la façon dont les choses se passent sur le terrain. Les peines qu’ils prononcent ne sont pas assez sévères. Elles sont fixées dans le bas du bas de l’échelle pénale, alors qu’il faudrait faire le contraire. Madame Taubira veut vider les prisons. Elle se trompe, il faut les remplir.

➜ Êtes-vous partisan de la création de nouvelles places de prison ?

La position de la FPIP est que quelqu’un qui a commis un délit doit être mis derrière les barreaux. Il faut construire de nouveaux établissements afin de séparer les caïds des primo-délinquants. Pour l’instant, tout le monde est mélangé et cette mixité est un désastre. Il faut séparer les détenus pour éviter les effets de contamination.

De même, les peines prononcées doivent être appliquées, les réductions de peine doivent devenir une exception et les conditions de sortie n’être accordées qu’au compte-gouttes.

➜ Observez-vous un parallèle entre délinquance et islamisation dans les cités ?

Pas exactement mais un politique faisait récemment remarquer que les cités ne produisent plus seulement des délinquants, mais aussi des terroristes.

Il suffit d’aller sur le terrain pour mesurer la facilité avec laquelle des jeunes désœuvrés et échappant à toute forme d’autorité parentale peuvent verser dans la délinquance avant de passer à la vitesse supérieure, histoire de se raccrocher à quelque chose.

En laissant la situation pourrir, en manquant de fermeté, l’Etat a sa part de responsabilité dans cette déliquescence généralisée.

➜ Comment stopper la délinquance dans les quartiers difficiles ?

Il faut que les forces de l’ordre aient les moyens d’intervenir, ce qui passe d’abord par un renforcement des effectifs.

Sous la majorité précédente, le nombre de fonctionnaires affectés au maintien de l’ordre, tous corps confondus, a baissé d’environ 13 000 personnes, alors que la délinquance suivait le chemin inverse. C’est de la folie ! Que l’État fasse des économies certes, mais pas sur ses missions régaliennes. Il faut reconstituer les effectifs pour qu’il soit à nouveau possible de constituer des patrouilles permettant aux policiers d’intervenir dans des conditions de sécurité acceptables.

➜ Pensez-vous que les conditions de légitime défense des forces de l’ordre sont encore adaptées à la situation actuelle ?

Non. Les voyous sont armés de plus en plus lourdement. Il faut qu’un fonctionnaire de police soit en situation de légitime défense dès lors qu’il se trouve face à un individu armé et que certains médias cessent de transformer les bourreaux en victimes.

➜ Le rapprochement entre police et gendarmerie vous semble-t-il positif, par exemple pour ramener l’ordre dans les quartiers ?

Je pense que le regroupement entre la police et la gendarmerie doit être stoppé ou accéléré. Pour le moment la situation n’est pas satisfaisante. On entretient deux entités au sein d’un même ministère. Chacune reste attachée à son statut. Pour accélérer le mouvement, il faut créer une académie au sein de laquelle tout l’effectif sera formé de la même manière. En ce qui la concerne, la FPIP est favorable à la création de cet établissement unique.

 Propos recueillis par Didier Laurens

Cet entretien avec Claude Choplin a été réalisé avant les attentats du 13 novembre 2015.

«Politique de la ville : les racines du mal », Les Enquêtes du contribuable #14 décembre 2015/janvier 2016. En kiosque. Vous pouvez commander en ligne ce numéro: 5,50 €€ (port compris).


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