En fait, cela pourrait bien être l'affaire dont j'ai parlé au sujet de Bergson. C'est une bataille contre la philosophie dominante, qui croit en un absolu. L'enjeu est de taille, puisque s'il y a une Vérité, l'homme est déterminé. Il n'a plus qu'à se coucher. Pour William James, chaque homme construit sa vérité. Il s'agit d'un ensemble de guides de conduite cohérents entre eux, qui ont fait la preuve qu'ils donnaient des résultats "satisfaisants". De même, il n'y a rien d'absolu dans l'objet ou le sujet. L'un et l'autre sont faits de la même matière, "l'expérience". Mot qui prend à cette occasion un sens mystérieux. D'autant qu'en anglais experience est un verbe qui veut dire "éprouver". Et il n'y a pas de conscience, qui serait une sorte d'organe ou une âme. La conscience est une fonction, qui permet d'acquérir des connaissances, par l'expérience.
(JAMES, William, Essais d'empirisme radical, Champs Flammarion, 2007.)