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La chambre secrète

Publié le 11 juin 2008 par Mlle A
La chambre secrète

Gamin, je restais des heures, l'oreille collée à la porte de cette pièce. Fermée à clef. J'avais beau secouer la poignée, rien n'y faisait. J'essayais de voir par le trou de la serrure quels lourds mystères elle recelait. Mais il y faisait trop sombre. Du jardin, je fixais ses volets clos, essayant de deviner ce qu'il cachait. Quand je demandais à ma grand-mère pourquoi la porte était fermée, elle me regardait, et  sèchement répondait "C'est des histoires d'adultes". Alors j'attendais, patiemment. De grandir. Savoir pourquoi les gens baissaient le regard en passant devant cette porte.

Pendant ce temps, j'échafaudais des scénari. Et s'il s'était passé une chose horrible à l'intérieur ? Et si quelqu'un était mort dans cette pièce ? Et si un monstre y vivait ? Et si... quelqu'un était enfermé dedans ? Cela expliquerait que Mamie y entre parfois. Je l'avais surprise un jour, alors que je venais chercher un pull parce qu'il commençait à faire froid dehors. Elle se croyait certainement seule. Elle était entrée. Et y était restée longtemps. Je n'osais pas m'approcher, de peur qu'elle ressorte, mais je n'avais qu'une envie, écouter à la porte. Voire y entrer. Comprendre.

Et puis j'ai eu douze ans. Ce jour-là, papi et moi revenions d'une cueillette de mirabelles, j'étais tout crotté. J'ai grimpé les escaliers trois par trois, je me sentais voler. Et puis soudain, j'ai stoppé net. Une clef. Il y avait une clef sur la porte. La porte interdite. Je me suis approché. Il n'y avait personne dans le couloir. C'était ma chance. J'ai essayé d'ouvrir la porte. Elle s'est ouverte d'une facilité déconcertante. J'aurais cru qu'elle aurait résisté, protégeant un peu plus le secret qu'elle habitait. Et pourtant, je ne m'attendais pas à ce que j'ai découvert. La pièce était entièrement vide. Planté sur le seuil, j'accusais la déception. Quand mes yeux se sont habitués à l'obscurité cependant, j'ai vu le papier peint. J'étais dans une chambre d'enfant. De petite fille. Mais mon père est fils unique. En ouvrant un peu plus la porte, j'ai buté contre quelque chose. J'ai regardé derrière la porte. Une chaise, avec une peluche de lapin, rose, élimé, posé dessus. C'est donc là que grand-mère devait s'asseoir, quand elle venait. J'ai m'y suis assis. Et j'ai regardé longuement cette pièce, à mon tour. Comme je commencais à me sentir triste, je me suis levé et suis sorti. J'ai refermé la porte. Laissé la clef dessus. Je n'en ai jamais parlé.


Ecrit dans le cadre du KaleÏdos-coop.

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