Plus de 10 % de la population active en Suisse (plus de 300′000 personnes) travaillent à plein temps pour un salaire net de l’ordre de Fr. 3′200.– par mois. Ceci dans l’un des pays les plus riches du monde, et alors que les petits, moyens et gros ospels gagnent en une année le salaire de plusieurs vies d’employés.
En plus, ces salaires particulièrement bas sont pour l’essentiel ceux de femmes salariées. S’agissant du canton de Vaud et des salariés à temps partiel maintenant, les statistiques indiquent que près de deux tiers d’entre eux ont une revenu mensuel qui n’atteint pas Fr. 3′000.–
Dans une agglomération comme Lausanne, plus de 8 % de la population active doit faire appel à l’aide sociale, quand celle-ci veut bien sortir de son ghetto de paperasses envahissantes et de normes complètement dépassées. L’initiative vaudoise pour laquelle des signatures sont actuellement récoltées vise à remplir un objectif: un salaire minimum de Fr. 3′500.– nets par mois treize fois par an pour quiconque travaille à temps plein.
Quand on se tient près des stands de récolte de signatures, on peut entendre des propos affligeants d’égoïsme, du style, "je ne trouve pas ça juste, on a le salaire qu’on mérite" ou "pourquoi uniformiser, ce n’est pas l’Etat qui les paye ces salaires mais les entreprises". Un débat vieux comme le SMIC français qui pourtant semble être une avancée sociale indiscutable et remise en question ni par la gauche ni par la droite.
Les coûts sociaux pompent dans les impôts. Les bas salaires restreignent la consommation. Economiquement donc, ils sont quelque part une aberration. Mais les chiffres absolus ne sont pas un credo.
Ce qui doit l’être c’est le sens du bien commun et de la possible vie en Suisse avec un niveau de prix que nous connaissons et un pouvoir d’achat qui ne cesse de s’éroder depuis le début des années 90 au moins. Qui peut aujourd’hui faire face aux dépenses courantes de la vie avec Fr. 3′000.– par mois ? le moine ou le gardien de cabane du CAS, peut-être.
Mais dans une société qui voudrait que la famille soit une valeur (économique aussi s’agisant de la pyramide des âges de retraite), il est impératif de contraindre par des voies étatiques l’entrepreneur à payer décemment ses employés. Un salaire minimum est insupportable entend-on dans telle ou telle branche ou dans telle ou telle entreprise. Cette affirmation est inexacte et surtout montre que l’entreprise en question est mal gérée et ne dégage pas les marges qu’elle devrait.
La société en Suisse et singulièrement dans le canton de Vaud ne doit plus fabriquer de working poors supplémentaires. C’est pourquoi l’initiative "pour un droit à un salaire minimum" doit impérativement être signée (délai fin juillet 2008). Le texte proposé est des plus raisonnables et tient compte des particularités de chaque branche économique. Ce texte est le suivant:
« Acceptez-vous que la Constitution du Canton de Vaud soit complétée comme suit ? »
Article 58 Politique économique
3 (nouveau) Il institue un salaire minimum cantonal, dans tous les domaines d’activité économique, en tenant
compte des différences régionales, des secteurs économiques ainsi que des salaires fixés dans les conventions
collectives, afin que toute personne exerçant une activité salariée puisse disposer d’un salaire lui garantissant
des conditions de vie décentes.