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The caca collage company : une autre histoire stéphanoise

Publié le 28 décembre 2015 par Jean-Pierre Jusselme

Une tranche de l'histoire insolente et créatrice de Saint-Etienne avec un retour sur le collectif stéphanois "The Caca-Collage Company" dont fait partie Ladamenrouge

Quelle marque est la plus connue au monde ? Coca-Cola passé en 1945 dans le langage courant. Rajouter à cela un humour scatologique (signe de bonne santé, diront les gastro-entérologues !) et l'art du collage ("les ciseaux et la colle sont les amis du collectif") et la " Company " nait en 2012 par une première campagne de détournement du mobilier urbain publicitaire.

Fondée dans la petite ville de Saint-Etienne, la Caca Collage Company n'avait pas pour vocation de devenir une grande entreprise. Et pourtant, avec plus de 2 300 salariés et un chiffre d'affaires de 432 Millions d'euros en 2014, le constat est là. La petite société stéphanoise a su dessiner et redessiner le paysage médiatique national et international. Plus qu'une simple société, aujourd'hui la Caca Collage Compagny est un empire. Rencontre avec son créateur, Monsieur Helder Perrin...

The Story of the Caca Collage Company (bande-annonce) from Etienne HUSSON on Vimeo.

"Sur un 4x3m, un espace pour la création vaut mieux qu'une pub à la con !" Dans l'espace public, la réappropriation d'une hygiène mentale se fera avec humour et création populaire. Le collectif fait de son activité de détournement publicitaire une résistance récréative et re-créatrice. Le détournement est pleinement utilisé dès les années 1960 par les situationnistes (l'Internationale Situationniste, Guy Debord, etc.). Le collectif croit à la force du détournement dans un processus de libération mentale et de recul critique nécessaire face à la publicité. Les affiches (même les inchangées) ont d'ailleurs toutes un titre donné par le collectif : ainsi, le collectif ne partage pas le dessein des publicitaires.

Adbusters ( advertising pour publicité et buster pour destructeur, casseur, éliminateur), le collectif s'inscrit dans le mouvance des " casseurs de pub " (fondée en 1989 avec un magazine Adbusters magazine et une fondation Adbusters Media Foundation). La philosophie de ce mouvement est anti-consumériste. En France, le mouvement s'est organisé dans les années 90. Casseurs de Pub est une association à but non lucratif qui publie annuellement son magazine éponyme (et donc sans pub !) : une de ses revendications est la " Rentrée sans marques ", par exemple. " Résistance à l'Agression publicitaire " (R.A.P.) est une association de loi 1901 et compte parmi ses fondateurs le professeur et écrivain François Brune, ancien diplômé de HEC. Des publications plus régulières s'inscrivent aussi dans la lutte contre la publicité, parmi lesquelles Le Publiphobe (mensuel) et La Décroissance (mensuel).The caca collage company : une autre histoire stéphanoise

Ladamenrouge se définit comme un accélérateur de modification urbaine sur St Etienne. Il y a un ou deux ans, cet artiste rencontre le collectif de la Caca Collage Company et réalise avec lui une oeuvre intitulé " Nucléair ". Dès lors, l'idée de détourner la publicité et les affiches germe dans sa tête. Armé d'autres morceaux d'affiches, de colles, de pinceaux, parfois de bombe de peinture, il cacacollise alors 4 affiches.

Adbusting : les acteurs dans l'espace public

The caca collage company : une autre histoire stéphanoiseThe caca collage company : une autre histoire stéphanoiseLes mouvements qui organisent une pensée pour se libérer des fers de la publicité ne doivent pas occulter les mouvements qui agissent dans la cité (au sens historico-politique du terme). En effet, l'action peut être très artistique ou très militante, entraîner la dégradation du mobilier ou bien être non dégradante pour ce mobilier. Les pratiques diffèrent donc. Un site internet recense toutes les actions, et met au courant des évolutions législatives ainsi que des décisions judiciaires en la matière : c'est le site de la Brigade Anti-Pub.

L'association " Paysages de France " agit sur un plan juridique afin de faire respecter les lois en termes de respect du paysage. Les Reposeurs ont agi fin 2012 sur Paris à grande échelle : ils collaient des papillons adhésifs (pour ne pas faire de pub à cette marque aux papiers jaunes que l'on colle en pense-bête) ou des grandes bandes de papier marron (pour ne pas faire de pub à une autre marque) sur lesquels ils écrivaient des slogans appelant au repos vis-à-vis de la publicité. Les Déboulonneurs agissent différemment, parfois en barbouillant ou en cassant les supports publicitaires, et des procès ont régulièrement lieu ; dernièrement (mars 2013), le tribunal de Paris en a relaxé six d'entre eux en leur reconnaissant l'état de nécessité (en citant l'article 11 de la DDHC) :

" Article 11. - La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre à l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi ". (Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen.)

La cible : le mobilier urbain dans l'espace public

"La voix est à reconquérir dans l'espace public car c'est là que l'invasion publicitaire s'impose au passant qui ne choisit pas de passer devant. Qui attend à un feu rouge se fait agresser visuellement (et surtout mentalement) par un 4x3m lui disant que la voiture vantée par la publicité est celle d'un gagnant, insinuant que la sienne est mauvaise. La publicité crée de la frustration: dans l'espace public, le collectif The Caca-Collage Company ne peut pas l'accepter. C'est pourquoi, après avoir retravaillé les affiches, il s'efforce de les reposer sur les supports publicitaires où elles ont été momentanément empruntées: la vitre de la " sucette " publicitaire est soulevée et l'affiche modifiée y est remise."

La destinée des affiches dans l'espace public

Une fois sous la vitre d'une sucette publicitaire, une oeuvre de détournement a une espérance de vie incertaine : en effet, c'est un peu le jeu du chat et de la souris, l'intérêt de la société publicitaire étant de remplacer au plus vite les productions des artistes. Le collectif The Caca-Collage Company récupère de temps à autre ses productions après une ou plusieurs journées passées sous vitrine, dans l'espace public. D'autres fois, les affiches du collectif sont retirées par la société publicitaire en moins de vingt-quatre heures.

The caca collage company : une autre histoire stéphanoise

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