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La bande passante, l’adversaire des jeux vidéo

Publié le 24 décembre 2015 par _nicolas @BranchezVous
La bande passante, l’adversaire des jeux vidéo Exclusif

L’ambition des jeux finira soit par les perdre, soit par officialiser une révolution technologique déjà lentement en marche. Car avec des titres toujours plus ambitieux en termes de textures haute définition et orientés vers la diffusion en ligne, les jeux se heurtent à la limite bien réelle de la bande passante des forfaits Internet des joueurs.

Laissons temporairement de côté les guerres de clochers entre amateurs de consoles et de PC, et admettons tout de go que les méthodes de distribution des jeux sont les mêmes, peu importe la plateforme employée. Oui, il est toujours possible d’acheter la boîte d’un jeu au magasin, mais les joueurs se tournent de plus en plus vers les services en ligne pour télécharger, puis installer les nouvelles parutions. Cette méthode fort pratique est tout à l’avantage des développeurs et des éditeurs. Le service Steam est d’ailleurs entièrement basé sur ce principe d’accès universel à ses jeux via le Web, et l’on connaît le succès de l’entreprise des studios Valve.

Passage obligé

Neutralité du Net Internet Réseau Ethernet Routeur

Le hic, c’est qu’en s’engageant dans cette voie (quasiment une obligation sur PC), le joueur devra s’attendre à rehausser son forfait Internet, soit pour éviter des temps d’attente désagréablement longs, soit des frais supplémentaires pour cause de dépassement de limite de bande passante, soit les deux.

En s’engageant dans cette voie, le joueur devra s’attendre à rehausser son forfait Internet, soit pour éviter des temps d’attente désagréablement longs, soit des frais supplémentaires pour cause de dépassement de limite de bande passante, soit les deux.

Vous n’y croyez pas? La plus récente mouture de la série Call of Duty, Black Ops 3, nécessite un téléchargement gargantuesque de 45 gigaoctets pour la version Xbox One. Sur Steam, on précise qu’il faut disposer d’au moins 60 gigaoctets d’espace disque libre pour installer le jeu.

Et cela, c’est sans compter les mises à jour, ou encore le contenu supplémentaire disponibles par la suite. Multipliez cela par deux ou trois, par exemple, si vous êtes un joueur actif, et le total de bande passante donne rapidement le tournis. Konami, de triste réputation, s’était attiré les foudres des joueurs PC en publiant une version sur disque de Metal Gear Solid V, où le disque ne contenait… que le programme d’installation de Steam et un code de déverrouillage. Autant pour la volonté d’éviter d’installer le jeu en épargnant sa connexion Internet!

Pire encore, la plupart des nouveaux titres sur console offrent la possibilité de partager son écran sur YouTube ou encore Twitch. Sur PC, Windows 10 est équipé d’un module similaire, et le fabricant de cartes graphiques nVidia, par exemple, fournit gracieusement une méthode d’enregistrement et de diffusion en ligne. Le jeu vidéo en haute définition, même raisonnablement compressé, gruge rapidement l’espace disque ou la bande passante. Vérification faite, au cours des 30 derniers jours, Steam a avalé près de 90 gigaoctets de bande passante, contre 7 pour installer World of Warships. Qu’en est-il d’Armored Warfare, ce jeu de combats de chars critiqué la semaine dernière sur Branchez-vous? Hé bien, si l’on choisit l’ensemble des textures haute définition, on dépasse les 15 gigaoctets. 

Quant à Chrome, enfin, le navigateur web a siphonné environ 170 gigaoctets, ce qui inclut l’envoi de vidéos vers YouTube, mais également le visionnement de séries vidéo sur ce même service, ou encore sur Netflix. Car oui, les jeux ne sont pas les seuls à s’abreuver aux mamelles de la bande passante : il faut compter tous les autres divertissements gourmands, comme le cinéma et la musique en ligne, qui réclament leur part.

Les Québécois en veulent toujours plus

Le divertissement en ligne : des utilisateurs de plus en plus nombreux (Photo : CEFRIO).

Le divertissement en ligne : des utilisateurs de plus en plus nombreux (Photo : CEFRIO).

Une récente étude du CEFRIO, qui se penche sur les activités numériques des Québécois, révèle que ces derniers sont de plus en plus accros aux divertissements en ligne, et que plus de la moitié des gens connectés dans la province consomment des vidéos sur différentes plateformes, une tendance qui est en croissance. Aux États-Unis, on nous annonçait en grande pompe en mai que Netflix accaparait 37% de la bande passante! Et encore une fois, la vidéo en haute définition a son prix.

Heureusement, les fournisseurs d’accès à Internet commencent (lentement) à comprendre que leurs clients sont assoiffés de données. Tous les grands noms du domaine (et des plus petits) offrent ainsi des forfaits à très haute vitesse et comptant une limite élevée de téléchargement, quand cette limite ne disparaît pas tout simplement. 

Chez Bell, l’un des forfaits vante une connexion allant jusqu’à 25 Mbit/s, pour une utilisation mensuelle de 150 Go, pour un prix promotionnel de 79,90$ par mois, en incluant la télévision et la téléphonie résidentielle. Il est aussi possible de faire sauter la limite de téléchargement en payant 10$ de plus par mois, ou d’obtenir une vitesse approchant celle du gigabit par seconde. Notez que la mensualité grimpe à 145$ après six mois.

Vidéotron, de son côté, annonce un «Super forfait illimité», avec la télé, le téléphone et l’Internet à 30 Mbit/s sans limites de bande passante. Comme chez Bell, cependant, le prix bondit après six mois, passant à 158$ du 7e au 24e mois de l’abonnement.

Un frein à l’émancipation

«Ne brisez pas l'Internet» (Photo : Bloomberg).

«Ne brisez pas l’Internet» (Photo : Bloomberg).

Aux États-Unis, la volonté de Comcast d’imposer des limites de téléchargement aux abonnés des forfaits soi-disant illimités est «non seulement néfaste pour la clientèle, mais est néfaste pour tous», titre Boy Genius Report. On y argue que l’ajout de frais pour des téléchargements dépassant les 300 gigaoctets alloués par mois vise uniquement à remplir les poches du fournisseur, et que cela n’aura aucun impact sur la «congestion du réseau». De fait, on propose de faire disparaître cette limite… moyennant un surplus mensuel de 35$ US. Chez l’Oncle Sam comme ici, les notions de neutralité du Net et d’accès facile et libre pour tous ont encore des croûtes à manger!

Les fournisseurs d’accès Internet doivent donc se réveiller et offrir des forfaits tenant compte de la consommation toujours plus importante de divertissements en ligne, y compris de jeux vidéo et des contenus qui s’y rattachent. Le diable est sorti de sa boîte, et les gens n’arrêteront pas de produire des Let’s Play, de se connecter à Twitch ou encore d’utiliser Steam, PSN ou Xbox Live pour acheter et télécharger des jeux volumineux. La situation de quasi-monopole en vigueur au Canada et aux États-Unis fait en sorte que les joueurs et les internautes en général doivent composer avec des tarifs exorbitants et prohibitifs. À titre de comparaison, le forfait Internet de base chez Orange, un opérateur français, est offert à partir d’environ 30$ CA, à une vitesse d’environ 100 Mbit/s. 

Quand on se compare, on se désole…


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