Cependant, il faut admettre que, pour l'instant, la seule avancée en la matière tient dans l'évolution des discours mais bien peu dans les actes. Entre autres raisons de l'immobilisme persistant, le syndrome « NIH » – « Not Invented Here », qui veut que tout ce qui n'est pas conçu et développé en interne serait méprisable, parce que de mauvaise qualité, coûteux, inadapté aux spécificités locales… – prévaut toujours dans bien des établissements, notamment dans leurs directions informatiques.
Pour la banque néerlandaise ABN AMRO, cette culture obsolète a vocation à être éradiquée mais, naturellement, une telle transformation ne peut se faire en un jour. Alors, c'est avec une première initiative apparemment triviale que le mouvement est enclenché. En l'occurrence, il s'agit de déployer une solution de gestion de finances personnelles (« PFM ») fournie par la jeune pousse suédoise Tink, d'abord auprès de 10 000 « cobayes », avant d'envisager une généralisation à l'ensemble de la clientèle.
Si, comme je le suggère, la démarche peut sembler manquer d'ambition, elle n'en est pourtant pas moins représentative d'une véritable recherche de valeur. Il suffit, en effet, de s'attarder sur la manière dont la plupart des banques mettent en œuvre leurs fonctions de suivi de budget – à base de catégorisation plus ou moins efficace et de graphiques sans imagination – pour réaliser qu'elles ne répondent pas à la demande des consommateurs d'outils leur permettant de piloter leurs finances personnelles.
En comparaison, le recours à un service tiers fait immédiatement bénéficier de l'expertise nécessairement supérieure d'une entreprise dont le PFM est la seule raison d'exister – ce qui se reflète directement sur la qualité de l'exécution (par exemple sur les classifications) et sur l'expérience utilisateur (Tink étant particulièrement audacieuse dans ce domaine). Incidemment, l'externalisation est également un moyen habile de fournir aux clients de la banque une solution multi-établissements sans soupçon de conflit d'intérêt.
Le foisonnement actuel de startups FinTech constitue une opportunité extraordinaire pour les institutions « historiques » de mieux maîtriser leur mutation numérique. Une fois acquise l'idée que des acteurs tout juste émergents sont capables de délivrer – rapidement et à moindre coût – des produits et services parfaitement adaptés aux nouvelles attentes des consommateurs, bien mieux que ce que peuvent espérer réaliser leurs équipes internes, la route vers la banque du XXIème siècle leur sera ouverte.