« Moi, je ne pouvais détacher les yeux du journal, dans sa poche. Peut-être allait-il le déplier et me désigner la photo de l’homme que nous avions vu monter dans l’automobile d’Ansart et me dire qu’on avait repêché son corps qui flottait sous le pont de Puteaux. Mais cette perspective me laissait indifférent. C’est plus tard, vers trente ans, que j’ai commencé à ressentir de vagues remords en songeant à certains épisodes du passé, comme l’équilibriste qui éprouve un vertige rétrospectif une fois qu’il a traversé le gouffre, sur son fil. »
Patrick Modiano, Un cirque passe, Gallimard ed, p.140. 1992