Les éditions ZED éditent un coffret de quatre DVD reprenant des documentaires autour de la seconde guerre mondiale. Parmi eux, Das Reich, une division SS en France de Michaël Prazan raconte la traversée morbide d’une des plus féroces divisions SS composée à près des deux tiers d’Alsaciens français. Écrit avec un peu de sensationnalisme, accompagné par une musique martiale voire angoissante, constitué pour l’essentiel de documents d’époque parfois colorisés, il n’en constitue pas moins une plongée macabre rappelant ce dont l’humanité est capable dans l’horreur.
En Juin 1944, alors que l’armée hitlérienne est prise de surprise sur les plages de Normandie, l’état-major envoie la division Das Reich, stationnée à Montauban. Cette division est connue pour avoir appuyée à maintes reprises les Einsatzgruppen, ces commandos de la mort qui exterminèrent les populations slaves et juifs pendant l’invasion de l’URSS. Son commandant, Heinz Lammerding, fut un homme cynique, rompus aux techniques de tortures, qui appliqua sur son chemin les mêmes recettes qu’à l’est. Das Reich, une division SS en France passe par le menu les exactions et les crimes de guerre de ces barbares.
La Das Reich rentre dans Tulle
Avec l’accord tacite de sa hiérarchie qui explicite plusieurs fois qu’aucun moyen ne doit être exclu pour lutter contre ceux qu’ils appellent les terroristes, le général SS va laisser libre cours à son imagination de terreur. A la tête d’une division dont beaucoup de jeunes soldats n’ont pas encore vécu l’épreuve du feu, il va faire de la répression à l’égard des civils une école du bon soldat impitoyable. Face à elle, la Résistance a ordre d’empêcher son avancée et lui tends, partout où elle le peut, des embuscades. C’est Georges Guinguoin, un militant communiste, résistant de la première heure qui met les troupes françaises en ordre de marche contre les nazis dans ce qui va s’apparenter à une guérilla. C’est dans la Haute-Vienne et la Corrèze que les combats vont être les plus ardus. La division SS est mise à rude épreuve par la témérité des FTP. Quelque jours avant l’arrivé des troupes allemandes, le maquis a repris Tulle, préfecture de la Corrèze, des mains de l’ennemi. Malheureusement, la résistance ne tient pas le choc face aux blindés allemands. Le 9 juin 1944, l‘impitoyable et cruel Lammerding va mettre la ville à feu et à sang. Il fait réunir trois cent mille hommes dans la manufacture d’arme. Parmi la rafle, cent vingt hommes sont désignés. Quatre-vingts dix-neuf d’entre eux seront pendus aux fenêtres et aux lampadaires de la ville, à tour de rôle.1Onze hommes en doivent leur vie qu’au manque de corde des nazis. Parmi ces hommes, la plupart sont des civils. Par l’entremise du préfet Pierre Trouillé et du curé qui administre les derniers sacrements, les allemands désignent cent quarante neuf hommes supplémentaires destinés aux camps mais relâche les autres otages. Les corps des suppliciés sont détachés par les jeunes employés de la mairie le soir-même, à la tombée de la nuit. Ils n’auront pas le droit à un enterrement et seront jetés dans un charnier.
Le lendemain, le 10 juin 1944, une autre colonne du régiment entre dans Oradour-sur-Glane. D’après ses propres mots, Lammerding veut former les nouveaux soldats qui n’ont pas connus le front à l’Est. Il entend y faire un exemple et une leçon sur la répression des terroristes. Galvanisés par leur chef charismatique, pour leur plus grande part des fanatiques, les SS du Das Reich vont méthodiquement commettre l’un des plus grands massacre de population civile qu’est connu la France. En Ukraine, c’est une centaine de village qui ont subis le même sort, raconté avec brio par le cinéaste soviétique Elem Klimov dans Requiem pour un massacre. Les habitants sont rassemblés sur la place du marché sans explications. On y sépare les hommes et les femmes. Les hommes furent d’abord emportés en six groupes distincts auprès de six boutiques qu’on leur demanda de vider puis les militaires allemands firent feu avant de mettre le feu sur les survivants, brûlés vifs. Les femmes et les enfants furent enfermés dans l’Église. Église dans laquelle on fit exploser un engin qui asphyxia les pauvres hères. Comme pour les hommes, les SS mirent ensuite le feu aux survivants. De ce crime de guerre méthodique ne survivra que Marguerite Rouffanche, qui perdit tout et survécu en sautant par une fenêtre. La miraculé est une des rares ayant pu livrer un témoignage. On dénombra six cent quarante deux victimes. Alors qu’Heinz Barth qui coordonna les massacres fut condamné en République Démocratique Allemande à la perpétuité, Lammerding qui fut malgré tout condamné à mort par contumace en France vit son extradition refusée par la République Fédérale Allemande. En France, au procès de Bordeaux, le 12 janvier 1953, les « malgrès-nous », ces alsaciens enrôlés de force dans les SS, présents sur le banc des accusés, furent condamnés puis graciés quelques mois plus tard par les parlementaires au grand dam des partis civiles qui refusèrent longtemps qu’un homme d’État français prennent part aux commémorations à Oradour-sur-Glane. Das Reich, une division SS en France livre son analyse à travers le témoignage d’un ancien malgré-nous, Elimar Schneider. Ce dernier nous saisit d’effroi lorsqu’il avoue ne pas comprendre ce que l’on pouvait bien reprocher au SS qui combattait la peste rouge. Une seule conclusion s’impose. Celle que la justice a été entravée par la volonté politique de réconcilier artificiellement la Nation.
Das Reich, une division SS en France se conclut sur l’extermination de la division par les forces alliées. Édifiant, le documentaire permet de d’appréhender l’incompréhensible, à savoir comment un régiment composé essentiellement d’enrôlé de force peut devenir le fleuron d’une terrible machine de répression, à laquelle l’essentiel des troupes finit par adhérer en pleine conscience. Ces mouvements chaotiques de l’Histoire ne sont pas anodins et disent beaucoup sur la capacité de l’être humain à détruire et à accepter l’inacceptable. La fascisation constante de l’électorat européen fait rejaillir le spectre de ces années noires que tant semblent avoir oublié.
Boeringer Rémy
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