« Il est illusoire de croire que le renouvellement de notre vie politique puisse s’instaurer sur la base de vieux partis, de vieux professionnels politiciens, avec de vieilles idées électoralistes de bas étage, de vieux fonctionnements, de vieilles stratégies ridicules, qui nous ont conduit là où nous sommes, précisément : une trop grande déconnexion de ce système politique avec les attentes populaires, qui ont entraîné de tels résultats, à savoir un FN bien trop fort, et une abstention, un désintérêt et un dégoût encore plus forts… La solution ? Redonner de l’espoir, des perspectives, une réponse concrète aux attentes populaires « .
L’une des conséquences positives de la fulgurante émergence de Podemos en Espagne, si peu de temps après sa création, est de revitaliser le débat en France sur le nécessaire renouvellement du paysage politique. Il y a urgence, en effet. Il était temps de s’y pencher, quand il est déjà presque trop tard… On focalise beaucoup cependant sur l’âge des militant(e)s de ce jeune mouvement espagnol, en établissant un parallèle avec la France, qui n’est franchement pas à notre avantage. Surtout quand on prend connaissance de ce genre de réaction lamentable de l’un de ces principaux acteurs au gouvernement, illustration bien caricaturale et terriblement grotesque qui démontre si besoin en était encore leur pathétique déconnexion. La proportion considérable de vétérans, voire de dinosaures dans notre propre classe politique, est en effet flagrante. Si j’en avais le temps et la patience, je m’amuserais d’ailleurs, comme ce fut ma première intention, à établir tout simplement un tableau des principales personnalités politiques françaises les plus visibles par parti principal, avec pour chacune la date de leur entrée dans la vie politique. Cela se passerait de commentaires, la preuve par l’absurde serait donnée. Tant d’entre eux ont atteint la limite de péremption… Tant qu’on a trop vus ! Tant qui lassent et ne convainquent plus ! Évoquant cela, on pourrait me faire un procès en racisme anti-vieux, ce qui n’est pas mon propos. Dans mon esprit, une personne âgée peut être un apport tout aussi nouveau, appréciable et respectable qu’un jeune dans un mouvement politique. A condition qu’elle n’ait pas fait carrière d’élu permanent, un problème spécifique de l’hexagone. Non, ce dont il s’agit, si procès il y a, c’est bien celui de la professionnalisation excessive de la politique dans notre pays, contre laquelle je m’élève fortement, profondément. C’est une défaillance majeure de notre vie démocratique, qui l’est si peu, tant certains s’accrochent ostensiblement et sans le moindre scrupule, gauche comme droite, à leurs postes, leurs fonctions, leurs misérables cumuls de mandats, leurs intérêts personnels, qu’ils soient économiques ou en termes de pouvoir, de prestige… Ce qui empêche tout renouvellement et décrédibilise gravement, jusqu’au rejet, la politique dans notre pays. Podemos a établi des règles strictes qui interdisent ce phénomène, ainsi que le pantouflage et les conflits d’intérêts, dont on aurait avantage à s’inspirer pour renouveler notre manière bien française de faire de la politique ici. Mais il y a une autre dimension de l’émergence si rapide de Podemos qui me semble avoir été trop peu médiatisé, sur lequel je voudrais terminer ce probablement trop long billet, en termes de perspective de travail pour la gauche du PS. Il s’agit de prendre en compte dans notre réflexion le fait que Podemos est né de la désillusion de militants provenant d’un regroupement de partis de gauche autour du Parti communiste espagnol. Le parallèle avec le FDG ici est évident, tant son état de décomposition électorale et fonctionnelle est bien réel, incontestable. En Espagne, nos cousins politiques ont refusé le catastrophisme et la soumission au système, comme les échecs de leurs précédents engagements. Ils se sont regroupés et ont imaginé un plan de reconquête de l’électorat populaire très précis, condensé, pragmatique, avec une stratégie concrète. Et si donc, notre avenir passait par cette même remise à plat, cette même recomposition, cette même finalité ? Il devient urgent en effet de redonner de l’espoir à la politique, de proposer un avenir meilleur, là où les partis politiques agonisants ne font que proposer un accompagnement du libéralisme, un élément particulièrement constitutif du désespoir que le PS génère. Si regroupement et appel de l’unité à gauche il y a, ce ne doit surtout pas être autour d’un PS totalement décrédibilisé, qui a montré ses cruelles limites, et son pitoyable bilan. Il s’agit à présent, le temps nous est compté, de proposer une véritable alternative populaire, proposant à tous des mesures simples et pouvant réellement être mises en œuvre, dans tous les domaines de la vie quotidienne : logement, emploi, santé, éducation, formation, mobilité, écologie… Nous nous devons à présent d’être aussi facilement compréhensibles que le FN. Y a-t-il meilleur moyen de lutter contre ? Mais avec des mesures socialement acceptables, économiquement alternatives, qui contiennent des garde-fous contre le libéralisme prédateur et l’austérité imposée, qui soient bénéfiques pour tous, sans discriminations. Retrouver, enfin, l’intérêt commun, collectif, plutôt que celui de quelques uns. La bienveillance envers tous plutôt que la haine de l’autre. La différence est de taille. Notre ambition doit être à proportion. Surtout, en regard de 2017, ne pas laisser la seule perspective de renouvellement au FN.