La gorge nouée par la douleur, les yeux vitreux, Isabelle Gaston a demandé à l'assassin de leurs deux enfants de le regarder droit dans les yeux avant de lui dire:
"Tu m'as brisé le coeur, mais tu ne briseras pas ma résilience"
Guy Turcotte a pleuré de bout en bout pendant son allocution, puis, a échappé des mots.
Pas comme on échappe un crayon et qu'on le reprend tout de suite après.
Comme on échappe une peinte de lait ouverte. Avec gâchis.
Il a dit:
"Je n'ai jamais voulu te faire mal"
Ce qui représente 100% du contraire de tout ce qui a motivé ses gestes depuis le début de cette histoire d'horreur.
100% du contraire de ce qu'il a pensé avant de commettre l'irréparable.
100% DU CONTRAIRE.
C'est pire que de la tautologie, c'est dire des mots en pensant que quelqu'un va les croire, mais qui sont entièrement le contraire de la réalité.
C'est regarder un mur blanc que tout le monde regarde et dire à haute voix:
"Regardez-moi ce mur noir"
Guy Turcotte n'en voulait pas à ses enfants, il en voulait à celle qui l'avait trompé. Il lui avait dit: Tu veux la guerre, tu vas l'avoir".
Mais elle était forte et indépendante. Le moyen ignoble qu'il a trouvé pour lui faire mal va le placer à l'ombre pour longtemps (on l'espère) mais assombrira aussi son nom de famille pour des années à venir. Celui qui s'appelle Guy Turcotte de nos jours doit vouloir changer son nom légalement. Il traîne un poids nettement inutile pour rien.
Dans l'excellent film de Todd Solondz, Happiness, qui traite de sujets extrêmement graves sous le couvert de la comédie, Un personnage important du film, dangereux, se vend aux policiers qui viennent le voir en fin de film en faisant une association mentale qui le trahit. C'est d'une grande habileté de la part du scénariste Solondz qui comprend très bien les mécanismes de la psyché.
Quel type d'association mentale fait Guy Turcotte, en prétendant qu'il n'a jamais voulu lui faire mal?
Si il n'est pas en train de manipuler ceux qui auront le dernier mot sur son verdict, il est alors complètement dissocié de la réalité.
Dans les deux cas, il est excessivement dangereux, lui aussi. Sans l'ombre d'un doute.
Dans ce même film de Todd Solondz, le même personnage confesse que chaque matin il se lève heureux, mais que chaque fois, il sombre peu à peu dans la dépression, constatant qu'il doit vivre dans la réalité.
Guy Turcotte ne saisit plus rien du réel pour dire une chose du genre.
Ou son intelligence le fait continuer à manipuler.
Je penche pour cette seconde option, mais je ne prétend pas en savoir plus que les autres.
Toujours dans Happiness, (une émotion, le bonheur, qui n'habitera plus jamais Isabelle Gaston) un personnage qui souffre sa famille depuis longtemps, consulte un médecin qui lui dit que si il prend à nouveau du sel, son état de santé est si mauvais qu'il pourrait en mourir en très peu de temps.
Plus loin dans le film, avec humour, il y a cette scène familiale pathétique autour de la table où ce même personnage, le père de cette famille dysfonctionnelle, prend alors le sel et noie son assiette de sel. Seuls les spectateurs du film peuvent comprendre cette blague. Mais la subtilité peut nous échapper car on préfère souvent les poursuites en vaisseau spatial et les gens qui se tirent dessus au détriment de la psychologie.
Pour quel public Turcotte a échappé ses mots?
A-t-on tous mordu?
Ce qui ne m'échappe pas en ce moment c'est que les dégâts de Guy Turcotte continuent.
Une longue réalité carcérale le guette.
De nouveaux murs pour cercler sa vision nocive de notre planète.
Toujours tiré de Happiness:
"...Until the day you die, you, not me, will always be shit"
Isabelle Gaston lui aurait dit ceci que ça aurait été tout aussi juste.