Le livre des secrets – Deepak Chopra

Par Moglug @Moglug

Suivre les conseils de mes amis m’amène parfois à des lectures incongrues, en voici un nouvel exemple. Il y a 10 ou 15 ans je dévorais les écrits d’un certain James Redfield et de fil en aiguille m’attardait occassionnellement sur des ouvrages de développement personnel. C’est ainsi que j’en suis venue à lire Le livre des coïncidences de Deepak Chopra – en 2009 je crois (?), soit bien longtemps après ma phase Redfield – et, pour tout vous dire, j’avais trouvé cet écrit assez fade et surfait, voire grossier dans son approche du hasard.

En 2015, un très vieil ami m’explique qu’il aime lorsqu’il voyage choisir des livres au hasard, en fermant les yeux, dans les Relay SNCF. C’est ainsi qu’il a eu la chance de lire d’affreux polars et de découvrir Deepak Chopra, cet auteur justement si friant de coïncidences opportunes ! Et l’ami de me soutenir que le livre en question n’est pas si mal, qu’on y apprend plein de choses, bla bla bla…. Et moi, de me laisser convaincre.

Je suis désolée, je me dois d’admettre que Le livre des secrets n’a pas contribué à dévoiler les dimensions cachées de ma vie – quoique, en y repensant, je bénéficie d’un nouvel élan énergétique plutôt bénéfique depuis quelques semaines… ;)

Deepak Chopra voudrait dans un premier temps amadouer son lecteur par moults exemples de notre lien au grand Tout illustrés en premier lieu par ces minuscules cellules à l’origine de toute vie. Pourquoi pas, les anecdotes sont surprenantes sans être impossibles, je soupçonne toutefois l’auteur d’enjoliver considérablement les arguments scientifiques. Ce premier point étant révélé et ma connexion au cosmos enfin rétablie, il s’empresse d’enfoncer quantité de portes ouvertes : suivez le courant, ne résistez pas à ce qui arrive, ouvrez-vous à l’inconnu, ne niez pas ce que vous ressentez, etc. Personnellement, j’ai déjà lu/vu/entendu plus d’une fois ces maximes pré-mâchées, et je n’ai pas l’impression d’apprendre grand chose. Le rappel n’est toutefois pas désagréable et toujours bénéfique, parfois obscur ou tiré par les cheveux – « Le mental fragmenté ne peut vous conduire à l’unité, mais vous devez l’utiliser tout au long du chemin ». Il importe me semble-t-il que chacun fasse son tri, et ne gobe pas l’entièreté du discours comme une vérité établie. Deepak Chopra figurant parmi les cent personnalités les plus influentes du monde selon le Time – et d’après la quatrième de couverture – , il n’est sans doute pas nécessaire d’en faire un plus grand gourou qu’il ne l’est déjà… Son commerce éditorial semble déjà suffisamment lucratif.

Le livre des secrets est également ponctué de plusieurs petits topos visant à exercer notre réflexivité. Ses moments de questionnements, de prise de conscience et éventuellement de remise en question sont globalement assez bénéfiques, et il est difficile de ne pas être interpellé par l’un ou l’autre exercice. Pour ma part, j’en ai noté un en particulier, intitulé « Ecrire pour catalyser ». Il a pour but de nous aider à nommer des sentiments refoulés pour s’en libérer en utilisant l’écriture automatique. Il s’agit de débuter son texte par l’une des phrases suivantes : « Je sens vraiment ___ maintenant », « Ce que j’aurais dû dire, c’était ___ », «  Je brûle d’impatience de dire à quelqu’un que je ____ », « Personne ne peut m’empêcher de dire la vérité au sujet de ___ » , « Personne ne veut m’entendre dire cela mais____ ». Il est ensuite conseillé de ne pas s’arrêter et de coucher sur papier tous les mots qui viennent. Le but avoué étant d’atteindre un sentiment interdit, l’exercice peut être réitérer plusieurs fois pour permettre une connaissance de soi de plus en plus profonde.

J’ai eu quelquefois l’occasion d’expérimenter assez spontanément l’écriture pour formuler un mal-être, une question, un ressenti, et j’ai constaté presque malgré moi que cette manière d’écrire pouvait être déclencheur d’un véritable lâcher-prise par rapport à un problème donné. Ce blog même – et la lecture en général par l’altérité qu’elle suscite – sert de prétexte à l’écriture, et j’ai pu parfois prendre conscience de ses effets bénéfiques et de la prise de distance qu’il permet, dès l’instant où le sujet abordé m’est un tant soit peu intime.

Il y a quelques jours, j’ai revu l’ami qui m’avait conseillé ce livre et ai souhaité lui en reparler. Avec toute la mauvaise foi du monde, il en a conclu : « Ah bon ? Tu l’as acheté, il ne fallait pas, il n’est pas si bien que ça… »

Une lecture mitigée pour moi aussi finalement, mais qui m’interpelle sur la production foisonnante des publications sur le développement personnel. Ces ouvrages me semblent souvent grossiers, voire simplistes. Toutefois, les chiffres montrent qu’ils se vendent, et moi-même, parmi ces quelques 300 pages passablement ennuyeuses, j’ai pu dénicher quelques phrases clés qui me font avancer. N’est-ce pas cela finalement un livre de développement personnel : plusieurs centaines de pages pour trois mots-clés qui vous taperont à l’oeil ? Je suis assez curieuse de lire vos avis sur la question. Trouvez-vous votre compte dans ce registre éditorial ? Tous les livres de développement personnel se valent-ils ? Auriez-vous des conseils de titres de qualité en la matière qui sortiraient du discours prémâché ? La psychologie sans vis-à-vis avec un tiers a-t-elle du sens ? Le livre est-il un tiers ? S’il est un tiers, et pour reprendre Régine Detambel et sa bibiothérapie créative, un bon roman n’est-il pas plus subtil et plus efficace ?

Sept questions pour un seul livre en conclusion de ce billet, n’est-ce pas le signe que Deepak Chopra aurait – au moins partiellement – gagné son pari ?


Le livre des secrets : dévoilez les dimensions cachées de votre vie
Deepak Chopra, traduit de l’anglais par Bernard Dubant
J’ai lu, 2014, 345 p.
Première traduction française : Guy Trédaniel, 2005
Première publication : The book of secrets : unlocking the hidden dimensions of your life, Harmony Books, 2004