Il neige sur certaines régions du Québec. Chez nous il pleut. Ma ville est trop hot.
...et tellement pas en même temps...
Ma mère m'envoie une photo de la vue de sa rue. Un léger tapis de neige a ébloui ses yeux ce matin-là.
Au travail à ce moment, debout depuis 3 h du matin, je me trouve à être dehors dans le Vieux-Port. Je lui renvoie ma réalité du moment, sous la pluie.
Nous ne sommes que 273 kilomètres plus au sud. La neige se fait tardive cette année. Hier marquait la date limite au Québec pour mettre ses pneus d'hiver. À partir d'aujourd'hui un chauffeur au volant d'une voiture possédant des pneus d'été, coincé par un policier, devra payer 200$ d'amende. Je me demande si ce n'est pas par pneu.
Avec l'absence de neige, je soupçonne que plusieurs n'ait pas fait faire (ou fait) leur changement.
J'adore la neige, mais la pluie tout autant. Toutefois à ce temps-ci de l'année, je préférerais la neige. Ce serait nettement plus de circonstances. Je me rappelle un travail universitaire ou pour faire mon original, je n'avais pas simplement écrit la date sur la page fronticipe d'un travail remis. mais j'avais plutôt écrit "14ème jour de décembre sans neige" avec une certaine amertume aigrie. Ce n'est pas le cas cette année, on en a eu, un peu, pas longtemps.
Mais c'est pas joli un automne en décembre sans neige.
Ce qui l'est toutefois c'est la musique de Leonard Norman Cohen, auteur-compositeur-interprète, peintre, poète, écrivain. Minimaliste comme une pluie fine, parfois acoustique, parfois baroque, parfois jazz, parfois folk, parfois country, parfois oriental et méditerranéen, toujours juif, Cohen est jouissif. Et sa musique est définitivement une musique dite, de pluie. Et d'hiver.
Ne se l'imagine-t-on pas souvent en col roulé?
À cheval entre le spleen et le parfois obligatoire temps confiné à la maison, la pluie et la neige ont le même effet qu'une certaine musique de Cohen. La musique de Cohen a parfois la chaleur d'un gilet de laine, la chaleur d'une jupe de velours cordé ou de tricot. On sent parfois l'odeur du bois qui brûle sur des morceaux de l'ancien enfant de Westmount près de Snowdon. Il a, plus jeune, la voix nasillarde de celui qui aurait voulu être sous le parapluie de Dylan. Plus vieux, la voix sombre de celui qui a vaincu plus de 80 hivers.
En écrivant ceci, les gouttes perlent sur les vitres derrière moi et ce sont des accords somptueux sur la musique de Cohen. Avec une ironie sans précédent, c'est justement une référence à un hiver absent que Leonard me chante au même moment avec Winter Lady. Plus loin, une femme est si ensorcelante qu'elle fait geler un eskimo.
Cohen chante comme un ivrogne en fin de chanson, La première fois, c'est comique, puis la seconde, c'est comme si la blessure était grande ouverte.
Et saignante.
Comme une pluie en décembre.
Je me suis gâté l'an dernier en me rachetant la totalité de ses albums.
En fait pas tout, 11 disques entre 1968 et 2004, pour quelque chose comme 5$ par cd.
C'est un achat que je ne regrette en rien.
Les jours de pluie, comme les jours d'hiver.
Je regrette toutefois qu'on ait pas encore de neige.
"Quand devrait-on écouter nous de la musique de Noël, papa?" m'a demandé mon fils.
Quand il neigera.
D'ici là, on prie avec Leonard.
Pour quelques flocons.