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A la recherche de la nouvelle Terre

Publié le 14 décembre 2015 par Valentine D. @sciencecomptoir
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Vue d’artiste d’une exoplanète habitable. (crédits : NASA)
Si le changement climatique rendait notre planète impropre à la survie humaine, nous serait-il possible de déménager sur un autre astre ? Les destinations les plus probables se résumeraient alors à la Lune, Mars ou une immense base artificielle en orbite dans l’espace. Mais ce scénario se heurte à de nombreux problèmes à court et moyen termes. Décryptage.

La Lune, la Station spatiale internationale et bientôt Mars : quelle que soit leur destination, les missions spatiales habitées incluent toujours un billet retour pour leurs astronautes. Toutefois, comme le formule le pionnier de l’astronautique Constantin Tsiolkovski, « La Terre est le berceau de l’humanité, mais on ne passe pas sa vie entière dans un berceau ». Et si nous envisagions d’occuper un objet céleste de façon permanente et autonome ? N’y a-t-il qu’un pas de séjour temporaire à installation définitive ?

« A l’heure actuelle, on est vraiment loin d’avoir la capacité d’envoyer des Hommes sur des autres mondes et de pouvoir les y maintenir en vie » indique Hervé Cottin, astrochimiste, Professeur des Universités à l’Université Paris-Est Créteil et membre de la Société Française d’Exobiologie. Notre planète bleue est « un monde unique parmi ceux qu’on connaît » : ses caractéristiques physico-chimiques particulières y ont permis l’apparition de la vie il y a quelque 3,5 milliards d’années.

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Des mondes par millions

Malgré son caractère unique, la Terre ne serait pas la seule planète habitable dans l’univers. D’après une étude parue en 2013 dans la revue PNAS [1], 40 millions de planètes habitables orbiteraient autour d’étoiles similaires au Soleil dans notre Galaxie ; la plus proche d’entre elles serait située à 12 années-lumière de la Terre, soit plus de 750 000 fois la distance Terre-Soleil. Difficile de concevoir une visite de ces planètes : la durée du voyage et l’énergie à dépenser pour le trajet réduisent le choix de la destination.

En définitive, « les lieux où l’Homme peut aller se comptent sur les doigts d’une main : la Lune, certains astéroïdes dits géocroiseurs [qui passent près de la Terre, NDLR], les points de Lagrange [régions d’équilibre orbital aux propriétés particulières] et puis il y a Mars » énumère Francis Rocard, astrophysicien et responsable du programme d’exploration du système solaire au CNES (Centre national d’études spatiales).

Un environnement hostile

La Lune et Mars, potentielles terres d’accueil qui sont pourtant loin d’être accueillantes. A l’exception de notre planète, aucun objet du système solaire n’est habitable spontanément ; pas même Mars, qui l’aurait toutefois été par le passé.

Ces endroits sont très hostiles, comme l’explique Roland Lehoucq, astrophysicien au Commissariat à l’énergie atomique de Saclay : «Sur Mars, l’atmosphère est très ténue et irrespirable par un humain, il y a très peu d’eau et la température moyenne est de -60 °C. Sur la Lune, c’est encore pire : il n’y a même pas d’atmosphère et encore moins d’eau que sur Mars ! » Sans parler de l’exposition aux radiations, que l’on subit en permanence dans l’espace et qui, trop intenses, sont létales à court terme.

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« Aucune autonomie possible »

L’espace est un milieu très hostile. Y vivre exige la construction d’une base et la mise en place d’un système dit de « support vie » avec régulation thermique et recyclage de CO2 pour la production d’oxygène : un dispositif déjà en service sur la Station Spatiale Internationale et qui nécessite une maintenance permanente.

A la première panne, les équipements non renouvelés condamneraient les colons à une mort certaine. « La base ne peut pas survivre sur le plan autonome, analyse Francis Rocard. Il faut remplacer ses systèmes, l’alimenter en certains fluides venant de la Terre… Il n’y a malheureusement aucune autonomie possible sur Mars. »

Et pour demain ?

La colonisation spatiale paraît donc peu plausible à l’heure actuelle. Hervé Cottin, quant à lui, se projette dans plusieurs siècles et imagine l’Humanité « maintenir un petit écosystème pour rendre une partie de la Lune ou de Mars habitable sous un dôme, avec des moyens technologiques qu’on n’a pas ou qu’on n’imagine pas. » Mais cet environnement resterait fragile : la moindre défaillance pourrait être fatale.

Reconquête de la Lune, par Christophe Martin (Licence CC).
Reconquête de la Lune, par Christophe Martin (Licence CC).

A l’échelle de plusieurs siècles, la perspective de vivre dans des superbases spatiales serait plus probable que celle d’habiter des bases au sol. De telles colonies orbitales ont été imaginées dès les années 1970 par Gérard O’Neill : ces mondes artificiels pourraient accueillir plusieurs milliers à plusieurs millions d’individus. Hervé Cottin voit « des espèces de vaisseaux gigantesques avec des niveaux de sécurité et des redondances » permettant d’empêcher une destruction en cas d’impact de météorite. Protégées des rayonnements par un bouclier magnétique, ces bases orbiteraient autour de la planète rouge ; des expéditions martiennes en scaphandre pourraient être organisées ponctuellement à partir de ces stations.

Dans un millénaire, d’immenses vaisseaux transporteront peut-être des équipages humains jusqu’à une exoplanète habitable, à l’issue d’un voyage interstellaire de plusieurs générations. « Il n’y a aucune impossibilité technique, juste un léger problème de financement, de matériel et d’énergie, objecte Roland Lehoucq. Une base comme ça pèse des millions de tonnes : à 20 000 dollars le kilo mis en orbite, elle coûterait des dizaines de milliers de milliards de dollars rien que pour l’envoyer en orbite basse. »

Il semble ainsi difficile de concrétiser le moindre projet de colonisation spatiale d’ici plusieurs centaines d’années. « Si la Terre devient vraiment invivable, elle sera aussi notre cimetière. »

Références :

[1] Petigura, E. A., Howard, A. W., & Marcy, G. W. (2013). Prevalence of Earth-size planets orbiting Sun-like stars. Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS). vol. 110 no. 48, 19273-19278. doi:10.1073/pnas.1319909110

Je remercie chaleureusement Francis Rocard, Hervé Cottin et Roland Lehoucq de m’avoir accordé un entretien et d’avoir bien voulu relire cet article.

D’autres billets dans la même veine viendront bientôt sur ce blog. Si vous avez aimé cet article, vous aimerez peut-être mon billet sur le satellite LISA Pathfinder, ou la genèse de ROBUSTA, nanosatellite étudiant. Ailleurs sur l’internet mondial, je vous conseille la série de vidéos « Comment envoyer l’Humanité dans l’espace ? » de Dirtybiology, et l’excellent blog Ça se passe là-haut (dans son intégralité).

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