On ne cesse de le répéter, inlassablement, sur tous les toits, et à raison : on a un gros faible pour les concerts acoustiques. Il n’y a rien de mieux qu’une guitare branchée, en simple et pur accompagnement, et que cet artiste qui, souvent seul sur scène, se livre sans pudeur. C’est le parti pris par Lissie lors de son dernier passage à Paris, dans la salle chaleureuse (et grinçante) du New Morning. De longs cheveux rapidement tressés, un tee-shirt noir troué, un jean qui tombe et son bandana bleu roulé autour du cou, l’américaine n’accorde guère d’importance à sa tenue de scène. Ça tombe bien, car elle n’est pas là pour s’afficher, mais pour nous interpréter une compilation de titres extraits de ses derniers albums. De Bully à When I’m Alone, en passant par Everywhere I Go, Mississippi, In Sleep, Further Away et Shameless, elle reprend sans fioritures et extravagance ses classiques, chantonnés par moment avec la salle, toute acquise à sa cause, sans pour autant oublier de nous présenter les nouvelles chansons de My Wild West : Hero, Don’t You Give Up On Me, Ojai… Mais surtout The Sun Keeps Rising, une chanson absolument bouleversante à propos de sa tante, décédée d’une sclérose (ALS), plus que touchante pour quiconque a perdu un proche et se reconnaît dans ce texte brut. Elle ne parvenait pas à finir de l’écrire, à mettre les bons mots… À côté de ça, Lissie rayonne, si solaire quand elle parle, et se confie comme à une bande d’amis : elle est heureuse de revenir au basique guitare-voix, même si son groupe lui manque quand elle se retrouve seule en tournée, elle tente quelques phrases en français, alterne entre vin rouge et eau, nous fait l’éloge de Ryan O’Reilly qui lui apporte son capo oublié en coulisse, rigole en se remémorant l’époque où elle vendait son miel et de la tequilla sur son stand de merch’, et nous parle de son Midwest… son déménagement de la Californie à Iowa – que l’on confond trop souvent avec l’Ohio et l’Idaho – pour se rapprocher de ses terres natales de l’Illinois où elle a acheté une ferme et s’épanouie. Elle, elle nous rend tellement heureux.
En première partie, c’est un anglais au nom de famille très irlandais qui se présente sur scène. Accompagné de sa seule guitare, Ryan O’Reilly va chanter pendant une demi-heure ses chansons folk comme seuls les anglo-saxons savent écrire. Le jeune homme installé à Berlin désormais, ne serait pas épargné par les problèmes techniques. Pour surmonter les larsens qui déchirent les oreilles des auditeurs, il va tout simplement se débrancher pour deux chansons en total acoustique. La voix titille les aiguë et les notes les plus graves avec une aisance déconcertante. Et avec puissance. D’amour, il en question dans les chansons du chanteur, mais pas que. Ryan O’Reilly est un folksinger, et qui dit véritable folksinger dit protest-song. Des chansons accueillies avec un enthousiasme nourri par toute la salle, conquis par cet jeune homme au visage enfantin et joues rosies. Un réel délice musical.
Texte : Sabine Swann Bouchoul et Emma Shindo | Photos : Emma Shindo