Le dernier billet de mon cher François montre une illustration de Charles Altamont Doyle que je ne connaissais pas (qui rappelle fortement "A Dance around the Moon"), avec ce commentaire piquant sur l'auteur, " qui voyait des fées partout et a fini sa vie alcoolique et fou".
Une curieuse association d'idéesm'a fait penser à un autre peintre, de la même époque, qui voyait lui aussi des choses étranges tournoyer dans le ciel au-dessus de tours perçant le ciel, et qui a aussi fini à l'asile : Charles Méryon (1821-1868). Méryon est obsédé notamment par les corbeaux, que l'on retrouve dans plusieurs de ses oeuvres les plus connues :
Charles Méryon, l'Abside de Notre-Dame de Paris, 1854
Charles Méryon, Le Stryge, 1853
Mais c'est sûrement dans le Ministère de la Marine, une de ses dernières oeuvres, que s'exprime vraiment sa vision fantasmagorique :
On ne voit pas très bien, mais Méryon introduit des éléments maritimes dans l'espace aérien : baleines, navire, etc.Certes, le propos des deux artistes n'est pas du tout le même. Méryon, à Paris, dessine " les clochers montrant du doigt le ciel, les obélisques de l'industrie vomissant contre le firmament leurs coalitions de fumée, les prodigieux échafaudages des monuments en réparation, [...] le ciel tumultueux, chargé de colère et de rancune, la profondeur des perspectives augmentée par la pensée de tous les drames qui y sont contenus " (Baudelaire, 1859).
Tandis, que Doyle, en Angleterre, se consacre plus spécifiquement aux fées.
C'est là que j'admire le savoir de mon docte ami François. Tout béotien en histoire de l'art que je suis, un tableau me fait penser à un autre, mais j'aurais bien du mal à expliquer pourquoi et comment... Tant pis, c'est au moins un prétexte pour vous parler de celui dont Hugo parlait en ces termes à Baudelaire : "Depuis que vous connaissez Méryon, dites-lui que ses eaux-fortes, avec seulement ombres et éclairages, lumière et obscurité, m'ont ébloui".
N.B. : Personnellement je suis tombé sous le charme de Méryon lorsque je me suis intéressé de près à l'auteur des Fleurs du Mal. A ce sujet, je boucle la boucle en vous conseillant de lire (ou relire) le billet consacré aux illustrations des poèmes de Baudelaire sur ce même blog, où l'on voit des images qui, dans mon esprit, rejoignent aussi l'esthétique d'un Méryon. De Doyle à Méryon, de Méryon à Baudelaire, de Baudelaire à Rops... Oui, tout se tient.