La réalité est particulièrement visible lors des grands choix auxquels nous sommes confrontés dans notre vie : emprunt étudiant, achat important (immobilier), préparation de la retraite… Dans toutes ces situations, au moment de sélectionner une solution et quelle que soit notre maîtrise des produits financiers, nos émotions, nos habitudes, nos préjugés… prennent le pas sur la seule logique. Plus insidieusement, les mêmes facteurs interviennent dans nos actes quotidiens et peuvent affecter profondément nos parcours.
C'est le constat que font, notamment, les acteurs (banques et autres) qui ont misé sur des services de PFM (« gestion de finances personnelles ») afin de rendre les consommateurs plus responsables de leurs patrimoine et de leurs achats. Après quelques années d'expérimentations et de peaufinages, il faut se rendre à l'évidence : les utilisateurs ne sont pas plus enclins à changer leurs habitudes de dépenses quand ils adoptent ces outils, qui ne jouent donc pas sur les « bons » ressorts psychologiques.
Alors, effectivement, peut-être est-il temps de chercher à comprendre comment l'être humain fonctionne dans sa relation avec l'argent, avant d'envisager de lui fournir des solutions susceptibles de l'aider réellement à s'améliorer. Et si les initiatives comme celle d'ING en Europe (ou celle d'American Express, aux États-Unis) émergent justement aujourd'hui, le développement de nouvelles techniques d'analyse de données (« big data » et « data science ») y est probablement pour quelque chose.
En effet, les masses d'information disponibles (dans les banques et ailleurs, sur les réseaux sociaux, dans les smartphones…) et les logiciels capables de les exploiter rendent désormais possible et réaliste d'éclairer les mécanismes entrant en jeu dans les gestes financiers de tous les jours. Bien que ses « méthodes » ne soient pas précisées, le choix des partenaires de la « Think Forward Initiative » (mixant banque, technologie et recherche) tend à confirmer qu'il s'agit bien là d'un de ses axes de travail.
En pratique, l'initiative se positionne en aval des approches existantes d'éducation financière, en capitalisant sur un connaissance de la psychologie de l'argent afin de concevoir des outils permettant d'améliorer les comportements des consommateurs. La démarche se veut pan-européenne, en partie parce qu'elle répond à un appel lancé par la Commission Européenne en novembre 2014 (qui s'inquiétait alors des effets à venir du désengagement progressif des états en matière de retraite, de santé, d'éducation…).
Derrière une présentation focalisée sur l'apport de valeur à la collectivité (dont je ne doute pas de la sincérité), il ne faut pas négliger un enjeu – critique – pour ING : la banque du XXIème siècle ne pourra satisfaire les exigences de ses clients si elle n'assimile pas leurs attentes profondes. En conséquence, l'analyse des comportements deviendra, à court terme, une discipline essentielle pour atteindre les nouveaux standards de qualité de service. L'apprentissage commence maintenant.
Le premier rapport, paru ce jour (9 décembre 2015) et intitulé « Economics in 3D », prend du recul par rapport aux finances personnelles des consommateurs, puisqu'il est consacré aux impacts des évolutions de comportements sur l'économie en général…