La France est l’un des plus gros consommateurs d’anxiolytiques d’Europe. Prescrites couramment dans le traitement de l’anxiété et des troubles du sommeil, on sait que les benzodiazépines peuvent aussi, en cas de prise à long terme accroître le risque de maladie d’Alzheimer. Cette nouvelle étude, présentée dans la revue Alzheimer’s and Dementia, associe précisément les benzodiazépines à demi-vie longue à un risque de démences accru de 60%.
Alors que la démence touche actuellement environ 36 millions de personnes dans le monde, l’impact de la consommation à long terme de tranquillisants et de somnifères sur le risque de développement d’Alzheimer doit être surveillé. Une précédente étude de chercheurs de l’Inserm, publiée dans le BMJ, avait déjà alerté sur cet effet des psychotropes et appelé au respect des bonnes pratiques de prescription et d’observance, c’est-à-dire une période courte de traitement. Cette nouvelle étude précise que le risque de démence est associé précisément avec les benzodiazépines à demi-vie longue, qui mettent plus de 20 heures à disparaître de l’organisme. Dans cette étude, les personnes prenant des benzodiazépines à demi-vie longue ont un risque de démence augmenté de 60%.
La Haute Autorité de Santé a déjà souligné, en prévention de la iatrogénie des psychotropes, que les benzodiazépines à demi-vie longue (zolpidem et zopiclone) sont considérées comme inappropriées chez les sujets âgés, du fait d’un sur-risque iatrogénique. Elles sont pourtant très prescrites dans cette population : Sur les 2 millions de Français de plus de 65 ans consommant de façon chronique des BZD en 2007, la moitié se voit prescrire des BZD à demi-vie longue, y compris après 85 ans. Au global, 10% de sujets âgés y seraient exposés.
Ici, il s’agit d’une étude de cohorte, l’étude des 3 Cités, qui a suivi durant 8 ans, 8.240 personnes, âgées de 65 ans, interrogées sur leur consommation de médicaments.
830 cas de démence ont été diagnostiqués
L’analyse montre que,
· les utilisateurs de benzodiazépines au départ présentent un risque accru de 10% de démence (à 8 ans),
· les utilisateurs de benzodiazépines à demi-vie longue, un risque nettement accru de démence (HR : 1,62) vs benzodiazépines à demi-vie courte (HR : 1,05).
· Les utilisateurs de psychotropes ont également un risque accru de 47%, démence.
Attention aux benzodiazépines à demi-vie longue et aux psychotropes : » Il y a clairement une différence de signal entre benzodiazépines à durée de vie longue et celles à durée courte. Or les premières ont déjà été identifiées comme dangereuses chez les personnes âgées, notamment en raison du risque de chutes, et nous avons été étonnés de voir qu’elles étaient encore fréquemment consommées » déclare Christophe Tzourio, neurologue, directeur du centre de recherche Inserm U897 et professeur d’épidémiologie à l’université de Bordeaux.
Des résultats qui suggèrent une vigilance renforcée des médecins et des autorités de santé, pour éviter cette consommation de benzodiazépines à demi-vie longue chez les personnes âgées. Un rappel des indications a d’ailleurs récemment donné lieu à une communication de l’Académie nationale de Médecine.
Sources:
Communiqué Inserm 02.12.2015 La consommation de benzodiazépines est associée à un risque de survenue de démences
Alzheimer’s and Dementia November 19, 2015DOI :10.1016/j.jalz.2015.10.006 Benzodiazepine, psychotropic medication, and dementia: a population-based cohort study (Visuel Fotolia)
HASOct, 2011IPC AMI n°3 : BENZODIAZÉPINE À DEMI VIE LONGUE CHEZ LE SUJET ÂGÉ
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