Par arrêt n°375998 du 27 novembre 2015, le Conseil d'Etat a jugé que la responsabilité d'un syndicat de communes en charge de la collecte des déchets n'est pas engagée à raison de l'interruption temporaire de collecte en porte à porte dans une rue. Analyse.
Dans cette affaire, des riverains d'une voie difficile d'accès pour le véhicule de collecte des déchets ont recherché la responsabilité pour faute d'un syndicat de communes à raison
L'obligation de collecte : une obligation de moyenL'arrêt rappelle tout d'abor, la règle, inscrite au code général des collectivités territoriales, selon laquelle les communes doivent assurer la collecte des ordures ménagères, notamment en porte à porte :
"2. Considérant qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 2224-13 du code général des collectivités territoriales : " Les communes, la métropole de Lyon ou les établissements publics de coopération intercommunale assurent, éventuellement en liaison avec les départements et les régions, la collecte et le traitement des s des ménages. / Les communes peuvent transférer à un établissement public de coopération intercommunale ou à un syndicat mixte soit l'ensemble de la compétence de collecte et de traitement des s des ménages, soit la partie de cette compétence comprenant le traitement, ainsi que les opérations de transport qui s'y rapportent.(...) " ; qu'aux termes de l'article R. 2224-23 du même code : " Dans les zones agglomérées groupant plus de cinq cents habitants permanents, qu'elles soient comprises dans une ou dans plusieurs communes, les ordures ménagères sont collectées porte à porte au moins une fois par semaine. Dans les autres zones, le maire peut prévoir par arrêté soit la collecte porte à porte, soit le dépôt à un ou plusieurs centres de réception mis à la disposition du public."
L'interprétation de ces articles par le Conseil d'Etat est la suivante :
"qu'il résulte de ces dispositions qu'un syndicat de communes, auquel la compétence relative à la collecte des s ménagers a été transférée, est tenu de prendre les dispositions nécessaires pour qu'il soit procédé au ramassage porte à porte de ces s au moins une fois par semaine dans les zones agglomérées groupant plus de cinq cents habitants permanents, qu'elles soient comprises dans une ou dans plusieurs communes ;"
La collecte des ordures ménagères dans les zones agglomérées de plus de cinq cent habitants permanents doit être réalisée en porte à porte au moins une fois par semaine. Toutefois, il s'agit d'une obligation de moyen. Le Conseil d'Etat juge en effet que le syndicat de commune est tenu, non à une obligation de résultat mais est "est tenu de prendre les dispositions nécessaires".
Reste que le contrôle exercé par le juge sur les motifs pour lesquels cette collecte en porte à porte n'a pas été effectué, est effectué sur pièces et très rigoureux.
Le contrôle des motifs de l'interruption temporaire de la collecte en porte à porte.
L'arrêt précise :
"3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'interruption temporaire, à compter du mois d'octobre 2009, de la collecte des s ménagers au droit de la propriété de M. et Mme A...a été décidée par le syndicat des communes du P. en raison de la configuration particulière de la rue du Vallon qui forme un virage très étroit, de la présence d'un débord de toiture important d'un bâtiment situé sur cette rue, ainsi que de la présence de lierres sur un mur communal et de plantations débordant de la propriété de M. et Mme A... ; que, pour juger que la responsabilité du syndicat des communes du P. n'était pas engagée à raison de l'interruption temporaire de la collecte porte à porte des s ménagers dans la rue du V., le tribunal administratif de Strasbourg a relevé qu'afin de permettre le passage du véhicule collecteur dans cette rue, le syndicat avait accompli les diligences nécessaires pour obtenir l'élargissement du virage, l'enlèvement des lierres gênants du mur communal et la réduction du débord de toiture, ainsi que la réalisation par M. et Mme A...des travaux d'élagage de leurs plantations en juillet 2011, après qu'ils eurent été mis en demeure d'y procéder ; que les juges du fond ont également relevé que la collecte des ordures ménagères n'avait pas cessé entre octobre 2009 et juillet 2011 et était assurée à partir de points de collecte situés en amont et en aval de la rue du Vallon ; que, par suite, le tribunal administratif de Strasbourg n'a pas méconnu les dispositions de l'article R. 2224-23 du code général des collectivités territoriales, ni dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en jugeant que ces éléments n'étaient constitutifs d'aucune carence fautive imputable au syndicat des communes du pays de B. ;
4. Considérant que la recommandation R. 437 émise en mai 2008 par la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés préconise, de manière générale, de ne pas recourir, lors des opérations de collecte des s ménagers, à la marche arrière en raison des dangers qu'une telle manoeuvre fait courir aux agents chargés de la collecte et aux tiers ; que, pour écarter toute carence fautive imputable au syndicat des communes du Pays de Bitche, le tribunal administratif a retenu que celui-ci avait pu tenir compte de cette recommandation pour s'abstenir de prescrire au conducteur du véhicule de collecte de s de réaliser dans la rue du V. des manoeuvres susceptibles d'exposer la sécurité des agents chargés de la collecte et des tiers ; qu'en se fondant sur un tel motif, les juges du fond n'ont pas commis d'erreur de droit ni dénaturé les pièces du dossier qui leur était soumis ;
Ainsi, au termes de cet arrêt, l'interruption de la collecte des ordures ménagères en porte à porte ne révèle pas une faute du syndicat de communes en raison :
- du caractère temporaire de cette interruption ;
- de la mise en place de points de collecte à proximité ;
- de l'impossibilité de manœuvre dans la rue malgré le fait que le syndicat a "accompli les diligences nécessaires" ;
- du risque d'accident du travail.
Le principe reste donc celui de la collecte en porte à porte dans les zones désignées au CGCT. Toutefois, dans des circonstances très précises, la personne publique en charge de la gestion du service public local des déchets ne commet pas de faute en raison d'une interruption temporaire et dûment motivée de cette collecte en porte à porte.
Arnaud Gossement
Cabinet Gossement Avocats