Exposition du 5 décembre 2015 au 30 janvier 2016, à la Galerie Annie Gabrielli.
Vernissage le vendredi 4 décembre 2015.
(Fermeture du 21 décembre au 2 janvier)
Humaines, trop humaines, une conversation photographique à cinq voix
Humaines, trop humaines est le titre retenu par la galerie Annie Gabrielli pour sa première exposition collective in situ, déclinant ainsi au féminin pluriel l’Humain, trop humain de Friedrich Nietzsche, recueil d’aphorismes sur l’Homme et contre l’idéalisme, et hommage à l’esprit libre qu’était Voltaire.
Nécessité est alors de se demander ce qui lie les cinq démarches artistiques mises en présence et cette citation philosophique. Il semble a priori fortuit de trouver un dénominateur commun à ces démarches tant leur aspect se révèle protéiforme.
Au travers des photographes choisies, ce sont deux continents qui sont représentés, l’Asie (Chine et Japon) et l’Europe (Belgique et France), irrigués par des propos différents qui, toutefois, se recoupent par endroits. De la sorte, la question de l’intime se cristallise par le biais du journal chez Annabel Werbrouck (Journal d’une femme à Berlin) et par celui du souvenir et de la remémoration dans le travail de Delphine Sauret ; celle du document est partagée par Kyoko Kasuya et Morgane Gille. Alors que la première, en écho à la catastrophe de Fukushima qui a meurtri son pays, abolit les frontières et les distances en proposant un ensemble de clichés, accompagné de textes, sur les paysages avoisinant les sites nucléaires français (La Zone), la seconde s’empare de documents d’archives sur un quartier de Nîmes pour produire des images recomposées et hybrides, qui mettent à mal la vér(ac)ité portée par la photographie, et qu’elle présente sous forme d’ouvrage. Le travail de Wang Pei, quant à lui, se situe dans le voisinage de celui d’un socio-ethnologue critique. En effet, la mise en regard et en scène de photographies de mariages chinois témoignent de leurs permanences, et des codes qui les innervent (La vie similaire), tout autant que des écarts qui existent entre vie quotidienne et parenthèse lisse et idéale du jour des noces (La vie parallèle).
Mais, qu’il s’agisse de travail intimiste, de travail de type documentaire ou de travail plasticien, chaque aspect participe à une même intention : s’interroger sur la création et le médium photographique. La légèreté du sujet de Pei Wang se teinte de gravité dans la sérialité, la déshumanisation des photographies de Kyoko Kasuya trouve une incarnation dans la voix de l’auteur, l’objectivité de l’archive se charge de facticité dans le traitement de l’image avec Morgane Gille, l’autofiction de Delphine Sauret devient universelle par les choix techniques et plastiques effectués, et le récit porté par les instantanés de vie de la série d’Annabel Werbrouck résonne bien au-delà de la femme berlinoise qu’elle a choisie pour héroïne anonyme.
Dans la galerie, d’un mur à l’autre et d’un ensemble à l’autre, ces voix individuelles et personnelles se croisent, se répondent et se complètent dans une conversation qui s’inscrit pleinement dans les préoccupations de la photographie plasticienne contemporaine.
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