Nous n'en avons peut-être pas conscience mais les professionnels de la Nuit sont innovants. Ils apportent chaque année de nouveaux concepts pour répondre à l'évolution des goûts et des habitudes des consommateurs.
Une manifestation réunissant des patrons d'établissements français et les 20 principaux fournisseurs prestataires fournissant spiritueux, soft drinks, décor, technique, tout ce qui permet de faire la Nuit, avait été pensée autour d'une succession de visites pour trouver de nouveaux lieux et permettre aux prestataires de présenter de nouveaux produits. Elle avait été appelée G20, ce qui témoigne de l'humour et de la répartie que l'on peut avoir dans ces professions qui tiennent à tenir bon face aux anti-tout.
Je n'ai pas suivi ce périple de 48 heures, au cours duquel 100 dirigeants venant de toute la France et 20 fournisseurs se sont rencontrés au cours d’un "Innovation tour" d’établissements parisiens de référence, passant par l'Hôtel du Collectionneur, et poursuivant par une tournée des lieux tendances avec les Bains, la Mezcaleria, le Comptoir général, Bermuda Onion, la Brasserie Barbès, Très Honoré, le restaurant de l'Opéra, la VIP Room, le Mojito Habana.
Par contre j'ai assisté à la remise d'une série de trophées (dont vous trouverez la liste en fin d'article) récompensant les plus belles créations ou innovations, au cours d'une soirée qui s'est déroulée au Lido. Parce que s'arrêter c'est mourir, continuer c'est innover.
La fin des années 80 a été incarnée par des figures qu’on pourrait qualifier de mythiques, comme Régine ou Castel, même s'il y avait quelques établissements plus démocratiques, comme le Palace, pour élargir la cible.
Les peoples de l’époque s’appelaient Gainsbourg, Bardot, Sagan et autres célébrités. On ne pouvait entrer que si on était membre du club. La plupart de ces lieux branchés exigeait une carte. A moins de montrer patte blanche au "physio" qui filtrait les entrées, un peu à la tête du client et selon la beauté de la femme, pouvant dire oui un soir, et non le lendemain. C’était un temps de folie à rire, boire et danser aux côtés des stars jusqu’au petit matin. On va dire que je caricature mais c'était vraiment cela. Il suffit de lire Eva pour en retrouver la trace.
Dans les années 90, le paysage se diversifie avec les BAM et les RAM. En effet, les Bar à ambiance musicale et les Restaurants à ambiance musicale offrent à leur clientèle un cadre plus festif. Les habitudes de consommation se modifient en même temps que l’offre de patrons français et innovants. Les DJ montent sur les podiums. Le plaisir de se rencontrer dans un cadre choisi prime sur le désir de picoler dans une ambiance glauque. L’alcool n’est plus la première motivation de la Nuit.
Le champagne a perdu un peu en magie alors que surgissaient des produits de plus en plus premium. Le cocktail est devenu un art et dès le début des années 2000, les mixologues ont rejoint les DJ parmi les personnalités de la Nuit.
La Nuit est devenue de plus en plus conceptuelle. Des établissements surgissent. D'autres meurent. Quelques-uns parviennent à passer le cap et à renaitre de leurs cendres.
Le premium s’impose dès l’apéritif avec un produit transformé à forte valeur ajoutée, positionné haut de gamme (dont le prix est de ce fait généralement plus élevé que celui de ses concurrents). Il est souvent associé avec quelque chose à grignoter, à la fois pour satisfaire un objectif de santé publique mais aussi pour le plaisir. En résumé, on consomme l’alcool moins et mieux.
Sont apparus parallèlement les superpremium qui qualifient les alcools plus forts et plus vieux.
Une autre caractéristique est le changement qui a affecté les patrons qui sont devenus des gestionnaires et des chefs d’entreprise à part entière, avec souvent plusieurs établissements, quitte à être moins charismatiques. On connait peu leur nom aujourd'hui. Il n’y a guère que Jean Roch, qui a monté sa propre chaîne baptisée VIP Room à continuer incarner une référence des nuits parisiennes et tropéziennes.
D'une manière générale, le public a d’autres besoins. On venait voir des personnalités qui, comme jean Castel, accueillaient personnellement "chez eux" les fêtards. On vient maintenant plus simplement boire un verre entre amis, dans une ambiance sécurisante, glamour et audacieuse, comme me l'a expliqué Jean-Paul Viart, le rédacteur en chef de Paris Nuit.
Forcément, ces patrons ont pris conscience de l’attente de distraction et de qualité que leur clientèle manifeste à leur égard. C’est pourquoi, chaque année depuis 21 ans, on récompense les établissements qui se distinguent par leur innovation.
Trophée du Jeune Entrepreneur : Sylvain Chérubin – Lyon
Trophée de la Terrasse : Le Milk – Gaby Sune – Montpellier
Trophée de l’Insolite : Le quai des Bananes – Rémy Dauchy – Lille
Trophée de la Création et de l’Innovation : Le Road House Café – Stéphane de Coster – Doussard
Trophée Qualité & Service : L'Arc – Félix Wu – Paris
Trophée de la Prévention : Le Duplex Club – Cédric Cappadoro – Biarritz
Trophée de l’Evénement Hors les Murs : La Folie Douce by Majectic – Luc Reversade – Cannes
Trophées d’Honneur 2015 : La Ville de Lyon pour sa gestion dynamique et festive de la nuit - et Marie Garreau pour l’organisation de ses soirées "Chérie Chéri"
L'avaleuse de sabre Lucky Hell, qui s'est produite sur d'autres scènes avec Dita Von Teese, a fait sensation avec ses tatouages et ses armes blanches. Elle est arrivée sur un sofa rouge, dans une ambiance orageuse et ses talons ont claqué sur le sol en provoquant des gerbes de gouttelettes argentées.
Igor et Lulia, deux acrobates équilibristes et contorsionnistes, venus de l'Est, nous ont sidérés avec leur duo You and me, créé pour le festival du Cirque de demain en 2010, savant équilibre de force et de sensualité.
Nous avons aussi été bluffés par la maitrise des patineurs Solenne Bachelet et Maxime Combès qui forment sur la glace depuis 4 ans le couple adagio du Lido. J'étais si près d'eux que j'ai tremblé en constatant les risques qu'ils prenaient sur cette piste carré de seulement 7 mètres de coté. On croit avoir vu le clou du numéro et ce n'est rien comparativement à l'enchaînement suivant.
Le clown Housch Ma Housch, primés à de multiples occasions, nous a enchanté avec son accent ukrainien, sa drôlerie et sa poésie.
Les chorégraphies cadencées menées par les célèbres Bluebell Girls et Lido Boys s’enchaînent à un rythme effréné. Les chapeaux extravagants et les costumes majestueux sont ornés des plus belles plumes et scintillent de mille feux. On se laisse porter à poser un autre regard sur l’Art Nouveau, à faire escale au pied de notre célèbre Dame de fer, ou encore à admirer les défilés haute couture...