Autoportrait Guacolda
Dans le parcours de peintures, gravures, tressages, broderies que Guadolca présente actuellement à l'ECLA de Saint-Cloud, un mot-clef relie secrètement toutes ces productions dans une même grille de lecture révélant une démarche créative cohérente. Ce mot : " trame", riche de tant de significations, élucide chaque facette d'une œuvre pour laquelle un fil conducteur guide le cheminement d'une expérience à l'autre.
Au fil des mots
Déjà l'introduction de textes dans l'agencement d'un tableau détermine un point de départ significatif. Car ces mots écrits à la main dessinent le premier fil d'Ariane de cette œuvre multiforme. Au fil des mots Guacolda tisse la trame d'une narration discontinue dont les lignes façonnent le premier fil rouge d'une aventure à suivre sur d'autres territoires. Depuis quelques années son dessin, dans un tracé continu où l'œil s'égare, participe à cette trame vivante presque en mouvement à la manière de l'expérimentation scientifique des précurseurs du cinématographe.
Rouge tendre, dessin à l’encre sur papier japonais
Il fallait s'attendre à voir ce trait ondoyant jaillir du papier, acquérir sa liberté textile pour vagabonder à sa guise. Ce travail récent ouvre une voie nouvelle dans la figuration de Guacolda. L'exposition accorde une place majeure à cette fibre rebelle qui, au-delà de la broderie, anime un caractère, conforte l'expression vivante de son modèle avec une présence insoupçonnée. Parfois cette figure textile prend appui sur la trame d'un papier japonais. Plus loin la transparence d'un papier bulle plastique tendu devant une fenêtre permet à l'artiste de jouer entre la trame régulière de ce support diaphane et ce sillon textile insoumis. Au-delà d'une simple broderie, Guacolda joue avec la gravité pour donne à ce trait matérialisé par le fil une liberté inédite, le laissant ruisseler en cascade le long de la silhouette. On pressent que ce lien va initier de nouvelles conquêtes tant son développement prolifique sur le plan du support incite l'artiste à lui accorder davantage encore la primauté sur le dessin au bénéfice d'une destinée en volume.
Entrelacements
Dans ses œuvres de tressage, Guacolda nous avait déjà familiarisé avec cette inclination à jouer avec les entrelacs pour mieux révéler la trame d'une histoire, celle qui réunit les hommes à travers le temps dans cette interrogation sans cesse renouvelée sur leur présence au monde.
Détail entrelacements Guacolda
Ce substrat culturel participe à un jeu de trames, associant l’enchevêtrement des supports peints et la référence historique qu'elle implique (toile de Jouy notamment). Découpes puis entrelacements de deux systèmes de signes donnent naissance à une troisième œuvre, complexifiée, obligeant le regardeur qui a perdu ses repères à s'interroger sur cet exercice perturbant où l’œuvre de l'artiste contemporain rejoint la manœuvre millénaire du tisserand de Mésopotamie. Le protocole mis en œuvre par Guacolda chaîne ainsi tous les aspects de cette même stratégie : trame de l'écriture sur le plan du tableau, trame peinte sur la toile, trame issue de ces entrelacs minutieux entre l'histoire de l'art et la création originale, trame enfin avec le jaillissement de cette fibre libérée de la broderie et engagée dans une odyssée nouvelle au fil de l'art.
Photos: 1 et 2 de l'artiste et 3 de l'auteur
"Figures"
Carte blanche à Guacolda
Du 18 novembre au 18 décembre 2015
ECLA Le Carré
3 bis, rue d’Orléans
Saint-Cloud