Cette recherche de l’University College London (UCL) révèle les clés d’un secret que beaucoup aimeraient détenir, l’espoir d’une vie sans douleur ou le début de la "recette pharmaceutique" miracle d’une forme d’insensibilité. Un secret caché chez certaines personnes nées avec une mutation génétique rare et qui sont incapables de ressentir la douleur. L’idée est donc de tenter de recréer ce trait d' »analgésie absolue » -même si de précédentes tentatives n’ont pas été couronnées de succès. Zoom sur une expérience hors du commun, sur des souris modifiées pour porter la même mutation, dans la revue Nature Communications. Un immense espoir pour les millions de patients souffrant de douleurs chroniques dans le monde.
Des chercheurs de l’Université d’Oxford avaient déjà suggéré, dans la même revue, que les seuils de tolérance de la douleur sont liés à des modifications épigénétiques c’est-à-dire au mode d’expression de certains gènes. En identifiant ces gènes, on identifierait de nouvelles cibles pour de nouveaux analgésiques.
Ici, les chercheurs de l’UCL et du Wellcome Trust marquent une étape vers un médicament de l’analgésie absolue. En cause, ces canaux qui permettent aux signaux de passer le long des membranes des cellules nerveuses. Les auteurs rappellent qu’en 2006, un canal sodique » Nav1.7 » a été identifié comme particulièrement important pour la signalisation dans les voies de la douleur. Les personnes privées de Nav1.7 ne ressentent pas la douleur. Des médicaments qui bloquent Nav1.7 ont depuis été développés, mais ils n’ont montré que peu d’effets…
· Ces inhibiteurs des canaux sodiques sont utilisés comme anesthésiques locaux, mais ne sont pas appropriés pour la gestion de la douleur à long terme car ils peuvent provoquer un engourdissement complet et peuvent avoir des effets secondaires graves au fil du temps.
· Les analgésiques opioïdes comme la morphine sont très efficaces pour réduire la douleur, mais l’utilisation à long terme peut entraîner une dépendance. Une fois le corps habitué au médicament, des doses plus élevées sont nécessaires pour obtenir le même effet, les effets secondaires deviennent plus sévères, et, finalement, le médicament n’est plus efficace.
En revanche, les personnes nées sans Nav1.7 ressentent encore mais pas la douleur ! La nouvelle étude révèle que les souris et les humains qui manquent de Nav1.7 produisent également des niveaux de peptides opioïdes naturels plus élevés :
· lorsque les chercheurs donnent de la naloxone, un antagoniste opioïde, à des souris dépourvues de Nav1.7, ils constatent qu’elles ressentent à nouveau la douleur.
· Lorsqu’ils donnent la naloxone à une femme, âgée de 39 ans présentant cette mutation rare, la patiente ressent la douleur pour la première fois de sa vie.
C’est la confirmation du rôle clé de Nav1.7 dans la douleur humaine, explique le Pr John Wood, auteur principal de l’étude. Son idée, combiner de faibles doses d’opioïdes avec des inhibiteurs de Nav1.7., afin de reproduire l’insensibilité à la douleur des personnes atteintes de ces mutations rares. Et le test se montre déjà concluant sur des souris non modifiées. » Utilisé en combinaison avec des inhibiteurs de Nav1.7, la dose d’opioïde nécessaire pour prévenir la douleur est très faible « , explique l’auteur qui espère de premiers essais cliniques dès 2017. Un immense espoir pour les millions de patients souffrant de douleurs chroniques dans le monde.
Source : Nature Communications
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