Retour sur ROSSINI-CI à l’Opéra Berlioz – Montpellier

Publié le 03 décembre 2015 par Idherault.tv @ebola34
Retour et compte-rendu sur ROSSINI-CI à l'Opéra Berlioz - Montpellier le 2 décembre 2015

RETOUR SUR ROSSINI-CI
Opéra Berlioz/le Corum
Mercredi 2 décembre - 20h

Tout le monde connaît Rossini et peut fredonner de mémoire certains de ses airs. Les thèmes principaux de " La pie voleuse ", de " Guillaume Tell ", du " Barbier ", ont même fait fureur comme musique d'ascenseur et d'attente téléphonique, c'est dire... ! Et pourtant nul ne pourra se vanter de l'avoir écouté s'il n'a pas eu le bonheur de l'entendre, interprété par Marie-Nicole Lemieux.

Les chanceux (ou les connaisseurs avertis) sont nombreux, ce mercredi soir, à attendre l'accès à l'Opéra Berlioz, au Corum, et c'est devant une salle bien remplie que le concert peut commencer. Sans surprise, l'orchestre national de Montpellier LR, sous la baguette d' Enrique Mazzola, donne une très honnête interprétation de l'ouverture de " Tancrède ". " Tancrède ", l'un des premiers opéras importants du jeune Rossini, considéré par Stendhal comme un " chef d'œuvre ", nous offre le premier moment fort de la soirée, le " Di tanti palpiti ", morceau le plus célèbre de l'œuvre.

Divine Marie-Nicole Lemieux, dont la chaleur et la puissance vocale viennent, tout d'un coup, habiter la salle Berlioz. Ayant opté pour l'élégance discrète d'une veste blanche sur un bustier et un pantalon noir, c'est aussi dans son comportement scénique qu'elle se montre réservée, classique, fixant notre attention sur un seul élément, sa voix ! La cavatine, après son récitatif, déroule toute l'exubérance de son ornementation, admirablement servie par la voix de Marie-Nicole. Un régal ! Et, après ce hors d'œuvre, le plat de résistance, " Fiero incontro ", relève du même niveau, délicieusement pimenté par la soprano Patrizia Ciofi, l'une des meilleures de sa génération. Le duo Lemieux-Ciofi, un degré de plus dans l'irrésistible progression de la qualité de cette soirée. Avec l'ouverture de " Guillaume Tell ", le maestro Mazzola et l'orchestre font une belle démonstration de leur savoir-faire. C'est net, tiré au cordeau, inspiré même. Une de ces interprétations que l'on peut qualifier de référence. La première partie s'achève sur un difficile morceau du " Semiramide ", durant lequel interviennent les chœurs. Ce " in si barbara sciagura " donne à Marie-Nicole une magnifique occasion, avec sa double cabalette, de laisser à sa voix la " bride sur le cou ". Très bon moment !

Entracte et petit tour vers les rafraîchissements. La coupe de champagne, très rossinienne, est également très appréciée. Mes voisins, un couple charmant de retraités mélomanes, m'expliquent leur périple depuis Lyon, où ils résident, vers les grandes scènes du Midi. Madame, plus disserte, ne tarit pas d'éloges sur la voix et le côté " nature " de la contralto vedette.

Reprise enlevée avec la célèbre ouverture de " Cendrillon ", immédiatement suivie par le non moins célèbre " Ebben, per mia memoria " extrait de " La pie voleuse ". Nous sommes en terrain de connaissance, " La pie voleuse " ayant fait les beaux jours d'un certain " Orange mécanique " dont la bande son a fait le tour du monde. Le duo entre Pippo (Marie-Nicole) et Ninetta (Patrizia), où les deux voix s'entrelacent dans un succulent cantabile, précède le thème de l'opéra, parfaitement rendu par un orchestre, décidément convaincant.

Pour le dernier morceau, le programme nous gâte avec " L'Italienne à Alger ", premier opéra comique de Rossini. Marie-Nicole Lemieux, elle aussi, nous régale lorsqu'elle rentre en scène dans une splendide robe du soir, d'un lumineux " bleu canard ", mettant en valeur sa chevelure flamboyante, relevée en chignon, et la blancheur de ses épaules au-dessus d'un très généreux décolleté. C'est l'anti-Castafiore dans toute sa splendeur. Après l'ouverture, le rondo d'Isabella, " Amici...Pensa alla patria ", grande aria finale avec chœur, propose, une dernière fois, un " éblouissant feu d'artifice vocal ". On peut, avec Stendhal, s'interroger sur le " où trouver une prima donna d'une poitrine assez robuste pour chanter un grand air à roulades à la fin d'une pièce aussi fatigante ? " et se dire qu'ici on a obtenu la réponse !

Le récital s'achève... mais pas la représentation. Applaudissements, " Bravo ", entraînent de multiples retours des interprètes qui vont nous offrir un dernier cadeau, et quel cadeau !

Un premier bis, inattendu mais combien attachant, nous permet de redécouvrir, délicieusement servi par nos deux divas, le " Duo des chats ". Dégagée des contraintes du programme, libérée des exigences du récital, la connivence entre orchestre, chef et interprètes, fait merveille. On s'amuse et Marie-Nicole, en tête, l'humour fait son entrée. Deuxième bis, avec " Cruda sorte ", du même " Italienne à Alger ", chanté par une contralto enjouée, sensuelle et théâtrale, suivi d'un troisième rappel, pour lequel après avoir remercié Montpellier, Marie-Nicole Lemieux nous avertit que ce sera le dernier. Mais quel dernier, puisque la soirée va s'achever par l'air de Rosine, du " Barbier ", " una voce poco fa ". Un grand moment durant lequel, enjouée, presque espiègle, la contralto fait la démonstration de ses dons d'actrice et de sa chaleur humaine. On a envie de faire nôtre l'appréciation du directeur de distribution de la Scala de Milan " Elle est l'une des meilleures contraltos du monde ".

Sur cette dernière et belle image, il va falloir quitter l'Opéra Berlioz, regrettant que ce " court moment " (presque 2h 30 !) ne dure plus longtemps.
A Samedi prochain pour un deuxième concert, intitulé " Rossini-là ", dont on peut, déjà, savourer les délices à venir !

Les interprètes

- L'orchestre national de Montpellier LR
( http://www.opera-orchestre-montpellier.fr/)
Sous la direction de Enrique Mazzola.

- Enrique Mazzola

" Spécialiste du bel canto, le chef d'orchestre italien Enrique Mazzola est l'invité des plus grandes maisons d'opéras. Il est Directeur musical et Chef principal de l'Orchestre national d'Île-de-France.
Né en Espagne au sein d'une famille de musiciens, Enrique Mazzola commence très jeune l'apprentissage du violon et du piano, puis est diplômé en direction et composition du Conservatoire Giuseppe Verdi de Milan.
Lors de la saison 2014/2015, il est invité par l'Opéra de Zürich (Le Barbier de Séville), l'Opéra d'Oslo pour Dinorah de Meyerbeer (en version de concert à la Philharmonie de Berlin). A la tête de l'Orchestre national d'Ile de France, Il dirige de nombreux concerts au répertoire très varié dont 2 concerts Philip Glass à la Cité de la Musique à Paris, des concerts salle Pleyel et au Festival de Saint-Denis. Il est l'invité du Brussels Philharmonic (Ars Musica), de l'Orchestre national de Lyon aux Chorégies d'Orange et du London Philharmonic. Il fait ses débuts avec l'Orchestre symphonique de Québec, retourne au Festival de Glyndebourne pour une nouvelle production de Poliuto de Donizetti à l'été 2015.
Dans les saisons à venir, Enrique Mazzola sera l'invité en concert du London Philharmonic, du Brussels Philharmonic et du Wiener Symphoniker et côté opéra, il fera ses débuts au Metropolitan Opera de New-York, au Lyric Opera de Chicago et a de nombreux projets avec l'Opéra de Zürich, le Deutsche Oper de Berlin et Le Festival de Glyndebourne. "

- Marie-Nicole Lemieux

Douée d'une voix et d'un timbre rares, Marie-Nicole Lemieux défend avec passion la mélodie française et l'opéra baroque, mais se montre aussi talentueuse dans l'opéra italien du XIXe siècle.
Ses qualités vocales éclatent lorsqu'elle remporte en 2000 le Prix de la Reine Fabiola et le Prix du Lied au Concours Reine Elisabeth de Belgique. Débute pour elle alors une carrière internationale qui la mène sur les plus grandes scènes du monde : la Scala de Milan, le Royal Opera House de Covent Garden, l'Opéra National de Paris, le Théâtre des Champs-Elysées, la Monnaie de Bruxelles, les Staatsoper de Berlin, Munich et Vienne, l'Opernhaus de Zurich, le Theater an der Wien, le Teatro Real de Madrid, le Liceu de Barcelone, le Festival de Salzbourg, le Festival de Glyndebourne, les Chorégies d'Orange ...
Parmi ses futurs engagements, citons Il Trovatore à Madrid, Falstaff à la Scala de Milan et au Staatsoper de Vienne, Madama Butterfly au Concertgebouw d'Amsterdam et à Orange, Œdipe d'Enesco à Covent Garden, Un Ballo in maschera à Zurich, l'Italiana in Algeri à Montréal, Pelléas et Mélisande et Falstaff au Metropolitan Opera de New-York...

Marie-Nicole LemieuxPatrizia Ciofi (en anglais)
http://ciofi.blogspot.com/
http://www.marienicolelemieux.com/fr/

- Patrizia Ciofi

Soprano lyrique aussi à l'aise dans Monteverdi, Mozart ou Verdi, Patrizia Ciofi est sans doute une des artistes italiennes les plus sincères de sa génération. L'engagement dans son art lui permet d'incarner au plus près ses rôles, recherchant toujours l'expressivité de chaque mot et l'adaptation de sa voix aux différents styles de musique.
La souplesse de sa voix lui permet de chanter un large répertoire allant de la période baroque au XXe siècle, qu'il s'agisse d'opéras ou de récitals. La plupart de ses enregistrements discographiques ont été pris sur le vif, car Patrizia Ciofi pense qu'il n'est pas facile de faire entrer le théâtre dans un disque, sa motivation principale étant de provoquer des émotions à son public.
Parmi ses futurs projets, citons La Traviata à Strasbourg, Maria Stuarda à Avignon, I Capuleti e i Montecchi au Liceu de Barcelone, La Bohème à Liège, Hamlet et Nozze di Figaro (Comtesse) à Marseille, Les Huguenots à Berlin...

Vidéos

N. Lemieux " Cruda sorte " de " l'Italienne à Alger "

P. Ciofi extrait de " La traviata "

Une curiosité : M.-N. Lemieux, " travesti " dans Tancrède, avec P. Ciofi et E. Mazzola