3:25 ce matin, mon réveil sonne. J’ai 30 minutes pour m’habiller (un jean, un tshirt, un maillot de bain) et préparer mes affaires (un sarong, un tshirt de rechange, une serviette de bain et mon appareil photo). Aujourd’hui, je passe la journée avec Abang Marwiawan, un guide formidable. Quatre heures du matin à Denpasar, Abang est au rendez-vous emitoufflé dans son sweat
Nous prenons la route. Denpasar est très calme, il fait frais. Les ouvriers travaillent encore sur les routes et ne regardent même plus les voitures pour traverser, quelques rares motocyclistes sont déja en route pour le travail. La route est à nous, direction le coeur de Bali, au plus près de la résidence des Dieux, dans la région de Kintamani pour admirer le lever du soleil.
Aux alentours de 5:00, nous arrivons. Je choisis la vue panoramique qui ne nous oblige pas à faire l’ascension (je n’ai ni l’énergie ni les chaussures pour cela), Abang connait justement un endroit à 1800 mètres d’altitude. Effectivement, je ne peux souhaiter mieux : une grande terrasse donnant sur les 3 volcans Agung, Abang et Agung. Pas un chat autour de nous, tout est fermé et nous sommes seuls au monde. Sur le côté, il y une petite table, nous n’avons rien besoin de plus. La vue est à couper le souffle, c’est immense et majestueux. Le ciel commence déjà à rosir entre les monts Agung et Abang. La forêt tropicale que nous surplompons se réveille doucement, un oiseau chante, les coqs dorment encore. Dans le petit thermos d’Abang, en amoureux de la nature, fervent campeur et très organisé qu’il est, du café encore bien chaud. Dans son sac, une plaque de gaz, un petit pot d’une pâte à crêpes à la canelle qu’il a préparé avec gentillesse la veille chez lui et une petite confiture pour accompagner ce petit déjeuner vraiment parfait. Abang à pensé à tout, la crêpe pour les esprits autour de nous avant la nôtre, le café, sa bienveillance… il est en ce moment même en train de découper une mangue sucrée, juteuse, colorée… délicieuse.
Que peut-on espérer de plus de l’existence dans un moment si parfait…?
Je ne pourrais vous dire combien de temps nous restons ici. Le temps ne compte plus.
Le jour se lève progressivement dans des tons sublimes donnant aux arbres un côté fantastique. Une fois le soleil totalement dans le ciel, le coeur plein de gratitude, nous prenons la voiture pour aller au coeur du village de Batur. J’ai l’impression qu’il est 10 heures du matin mais il est en réalité à peine 6h. Bali dort encore.
A une quinzaine de minutes de là, plus bas, au coeur de la brume, nous rencontrons de nombreux camions remplis de terre et de pierres volcaniques (celles avec lesquelles on fait certains temples à Bali). Un camion peut faire jusqu’à trois chargement par jour et gagner près de 2 millions de roupies (environ 125€) par voyage, un revenu très confortable quand on sait à quel point les balinais sont travailleurs et endurants… Mais à quel prix ? Une fois la brume un peu dissipée et la visibilité meilleure, j’aperçois les petites mains vidant leurs seaux et filtrant la terre dans les camions à l’arrêt. Je découvre aussi des colines complètement fracturées, taillées, cassées à brut. C’est déconcertant. Les travailleurs n’hesitent pas à puiser dans ces ressources naturelles, parfois sans vision à long terme, ni même moyen terme. Pendant la saison des pluies, certaines collines finissent par s’effondrer et causer de gros dégâts.
Nous rejoignons la lumiere et là, jai l’impression d’arriver dans la Grande Vallée !! Le village de Batur est très animé, les enfants sont habillés pour les cérémonies du jour, les parents s’activent déjà pour les amener à l’école, certains déambulent avec de grosses couverture sur le dos, voir des doudoune pour le protéger de la fraîcheur matinale, d’autres attendent tout en blanc le frère, l’ami ou le voisin qui les amènera au grand temple pour célébrer la pleine lune, une effervescence digne des plus grandes capitales européennes ! De part et d’autre de la petite route principale, on cultive ici beaucoup d’oignons, d’ail, de belles tomates et d’autres légumes plus originaux. C’est parfaitement structuré, quasiment industriel. Ici les gens sourient beaucoup, de vrais sourires, sincères. Ils ont le teint des montagnards, une belle mine. Ils semblent vivre heureux avec tout ce dont ils ont besoin (sauf de la 3G !). Cet endroit est, j’imagine, tel qu’on imagine les villages traditionnels asiatiques. Personnellement, j’avais l’impression d’être en Mongolie, étrange vraiment.
Au bout de notre longue exploration, nous garons la voiture d’Abang devant l’un des temples du lac Bratan: le Pura Hulundanu Batur. La randonnée commence, je m’accroche. Nous nous engouffrons dans la forêt et montant des escaliers de pierre de près de 50cm pendant une bonne vingtaine de minutes. C’est ardu. Je manque de faire une vraie chute de tension moi qui n’ai pas l’habitude de faire de l’exercice. Abang prend son temps, il m’attend et m’encourage chaleureusement, ça marche !
Au moment où je pensais avoir oublié mon eau, voilà qu’un vrai warung (avec juste l’essentiel, oubliez les confiseries et autres produits inutiles ici) nous attend à la sortie de la forêt. Amîn. C’est ici que nous rencontrer un Djeru (homme en phase de devenir Mangku) aux yeux rieurs. Il vit ici avec sa femme, enfants et petits enfants depuis toujours et capture des coqs sauvages qui ont la particularité de voler. Il nous raconte comment il capture les bêtes ainsi que quelques anecdotes de son village.
Motivée, je suis Abang plus haut dans la montagne. Nous marchons en plein cagnard avec, à notre droite, le longiligne lac Bratan et les volcans et, à notre droite, la côte nord-ouest avec Tulamben puis Amed notamment. C’est très isolé mais la vue est splendide !
Arrivés presque en haut de la montagne, Abang me voyant fatiguée me propose de descendre en moto. Il interpelle un groupe d’hommes réunis devant une maison qui nous proposent la descente à 50000 IDR, intraitables sur la négo, nous acceptons. La route est très dangereuse, escarpée, glissante parfois, elle tourne à n’en plus finir et est toute en descente à presque 45 degrés (promis je n’exagère pas!). Au milieu de la route, un américain vient de tomber de son scooter, il a eu mal, il a eu peur mais rien n’est cassé visiblement. Si vous décidez d’y aller seul, surtout ne prenez pas vous même le guidon ou le volant, faites appel à un villageois ayant l’habitude de cette route. Ou bien, montez et descendez plutôt à pieds en marchant à votre rythme.
Il est presque midi, cette journée est fantastique !
Vous qui êtes si nombreux à vouloir découvrir Bali « hors des sentiers battus, loin des touristes », le seul moyen est de se lever tôt, très tôt 😉