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Drapeau tricolore : enfin décomplexés, les Français hissent leurs couleurs

Publié le 27 novembre 2015 par Délis

Aujourd'hui, vous pouvez ressortir le drapeau français de vos placards. Et le dépoussiérer. Cela faisait plusieurs décennies que, socialement, son exhibition était taboue. On ne pouvait le déployer qu'à l'occasion de manifestations sportives ou, éventuellement, pour le 14 Juillet. En s'appropriant les trois couleurs, Vichy les avait durablement entachées. En s'en revendiquant à tous crins, le Front national les avait recolorées politiquement. Et, intuitivement, elles finissaient par avoir un arrière-goût nationaliste. Or, " le nationalisme, c'est la guerre ". En 1995, les paroles d'un François Mitterrand finissant, tel un prophète, résonnaient en écho avec l'ère du temps.

Un drapeau replié, mais jamais rejeté

Ces derniers jours, chaque titre de presse y va de son article, les commentateurs n'en finissant pas de s'étonner, voire de s'extasier, de ce retour en grâce du drapeau. Un retour très visible grâce à l'effet démultiplicateur des réseaux sociaux. Tout était pourtant en germe : le retour d'un drapeau relève davantage du " coming out " que d'un " reset ". Lors du débat sur le référendum constitutionnel de 2005, la Sofres avait réalisé une étude démontrant la vivacité des symboles républicains dans les esprits. Brice Teinturier expliquait alors que la Nation revêtait alors en France " d'un rôle particulier et plus fort que dans d'autres pays. Elle est l'objet d'une mythologie ". Et toute mythologie se doit de disposer d'une iconographie. En France, le " drapeau " était alors déjà, à l'époque, le premier symbole de la Nation (pour 45% des Français, dont 56% des jeunes). Un peu plus tard, en 2009, le débat sur l'identité nationale avait remis la question des symboles nationaux dans l'arène publique. Et confirmé la prégnance des trois couleurs dans " l'identité de la France " : après la " langue française " (98%), la " République " (92%), le " drapeau tricolore " s'imposait comme étant un élément important de son identité pour une immense majorité (88% dont 63% " très important "). Elle arrivait juste devant la " laïcité " (85% dont 61% de " très important ") et la " Marseillaise " (77% dont 50% " très importante). En réalité, les Français n'ont donc jamais dénigré leur drapeau. Seulement, ils s'auto-bridaient, n'osant pas les hisser. Faute d'occasion en dehors du sport. Et parce qu'ils ne souhaitaient pas être associés à l'imaginaire du FN.

Le drapeau renoue avec ses origines révolutionnaires

L'opération de reconquête du drapeau allait pourtant commencer, partant de la droite pour s'achever à gauche. Lors de sa campagne présidentielle de 2012, sachant le drapeau populaire, Nicolas Sarkozy l'avait abondamment brandi. Lors de ses meetings, celui place du Trocadéro par exemple, toute la pompe nationale et républicaine était déployée. La foule était pavoisée de bleu-blanc-rouge. Axel Kahn avait même comparé ces rassemblements aux Congrès de Nuremberg, avant de retirer ses propos. Et trois ans plus tard, c'est maintenant François Hollande, président issu des rangs de gauche, qui appelle à l'agiter. Le drapeau est donc revendiqué par tous les bords politiques. Il plonge son inspiration dans le répertoire républicain : les Français l'associent à la " République " (92%), à la " Révolution française " (88%) ou à la " Résistance " (80%), bien davantage qu'au " Front national " (30%) ou au " colonialisme " (17%).

Demain, un rapport au drapeau à l'américaine ?

Reste à imaginer jusqu'où ira ce " retour du drapeau ". Maintenant que les Français entretiennent un rapport décomplexé avec leur drapeau, peut-on imaginer une attitude équivalente à celle des Américains avec le leur ? 61% des Français jugent " plutôt bonne " l'idée d'afficher le drapeau tricolore aux frontons des maisons et dans les jardins. Quid des écoles ? En janvier 2015, déjà, un sondage Ifop indiquait qu'un Français sur deux (51%) était favorable à des cérémonies régulières de salut du drapeau dans les enceintes scolaires. Cette idée ne fait pas consensus. Mais elle fait son chemin.

On compte une victime collatérale : le drapeau européen. Bien peu songent à le déployer aujourd'hui, en France ou même en Europe.


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