Dans quelques jours, dans un contexte sécuritaire exacerbé par les récents attentats qui ont frappé Paris le vendredi 13 novembre, s’ouvre ŕ Paris-Le Bourget la conférence mondiale sur le climat, la COP21.
Dčs que vous tournez le bouton de votre radio ou appuyez sur celui de votre téléviseur, vous n’entendez plus parler que de ça et le mot CARBONE revient en boucle comme l’ennemi numéro 1.
Le carbone, je ne suis pas lŕ pour faire un cours magistral, mais il est nécessaire ŕ tout un chacun. Mais selon sa forme il peut ętre nocif. C’est un des trčs nombreux sujets qui seront débattus durant la COP21.
Cela nous ramčne tout naturellement , nous de la communauté aéronautique, ŕ nous poser – ou reposer – la question du carbone dans la construction aéronautique.
Tout d’abord pour le personnel des entreprises qui mettent en œuvre ce matériau qui est issu de la filičre pétroličre. Outre la fibre de carbone, il faut aussi penser au liant – la matrice – qui est une résine issue de la chimie et qui donne corps ŕ ces matériaux composites. Mais c’est la fibre de carbone, pour les applications structurales qu’elles soient primaires ou secondaire, qui confčre au matériau ses caractéristiques mécaniques.
Depuis belle lurette les entreprises veillent ŕ ce que les employés œuvrent dans un cadre de travail exempt de pollution, non seulement vis-ŕ-vis de l’intégrité du produit final, que vis-ŕ-vis de la santé de l’opérateur. Le comité d’hygične, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) est lŕ pour y veiller.
Reste que l’on doit ętre prudent dčs lors que l’on découvre de nouvelles caractéristiques porteuses d’avenir. Ainsi se pose-t-on encore la question des conséquences que pourraient avoir la mise en œuvre ŕ grande échelle des nanotubes de carbone. Le Graphčne également sur lequel repose de nombreux projets futuristes pour la conception de la cellule des avions du futur est un autre casse tęte industriel. On est loin direz vous de la seule préoccupation que semble évoquer la COP21 qui table sur la réduction ou le ralentissement du réchauffement climatique. Mais il est tout de męme question d’environnement.
Et dans ce domaine, l’aéronautique, au-delŕ des travaux menés en vue de réduire l’empreinte sonore mais aussi des émissions de CO2 des avions qui relčvent des travaux menés dans le cadre français du Corac ou européen de Clean Sky, n’est pas en reste. Car les industriels se penchent sur la déconstruction des avions en fin de vie. Une considération qui est arrivée plus tardivement en Europe qu’aux Amériques tout simplement parce que la flotte des appareils commerciaux d’Airbus est plus jeune que celle de Boeing. Aux Etats-Unis, étant donné l’espace disponible dans les déserts (donc dans un climat favorable) de stocker les avions qu’ils soient civils ou militaires. Certains étaient remis en exploitation, mais ces déserts servent surtout de cimetičres ŕ des appareils qui ne répondent plus aux normes économiques ou aux rčgles de la sécurité aérienne.
D ‘une part cette solution est loin d’ętre écologique, et tous les pays ne disposent pas de vastes étendues désertiques pour y loger des cimetičres entiers, et d’autre part les industriels ont pris conscience de l’intéręt qu’il pouvait y avoir ŕ Ť recycler ť ces appareils. D’oů l’apparition d’un nouveau métier : celui du démantčlement. Mais un démantčlement oserais-je dire Ť écologique ť.
En France, la plateforme aéroportuaire de Châteauroux est connue pour ętre un parking ŕ avions en attente d’exploitation lorsqu’une compagnie n’a pas la place de les stocker sur ses propres terrains, mais c’est aussi une plateforme de démantčlement qui adhčre ŕ l’AFRA (Aircraft Fleet Recycling Association) au sein de laquelle sont menées de nombreuses études sur le recyclage des matériaux, qu’il s’agisse des alliages métalliques ou des matériaux composites.
Une autre plateforme a aussi pris de l’ampleur ŕ l’initiative d’Airbus auxquels sont associés Sita France et Safran Snecma. Au-delŕ d’une capacité de stockage allant jusqu’ŕ 250 appareils, Tarmac Aerosave propose des services de maintenance et de déconstruction. C’est tout l’intéręt de ce métier qui permet ainsi de remettre sur le marché, aprčs vérification, réparation éventuelle, validation de la navigabilité d’un sous-ensemble, d’un train d’atterrissage, … jusqu’au moteur, une grande partie d’un avion afin de le valoriser. Et ce qui n’est pas réutilisable Ť en l’état ť telles que les matičres premičres peuvent ętre remise dans un circuit de recyclage si tant est que la traçabilité soit menée de A ŕ Z.
Ce marché du démantčlement attise les services financiers de tous. Qu’ils soient constructeurs (les OEM, avionneurs, motoristes ou équipementiers) autant que compagnies aériennes qui voient lŕ un moyen pour les premiers de proposer des solutions de réparation moins coűteuses que si ils proposaient des éléments neufs, et en plus pour les seconds de valoriser un appareil en fin de vie. Et l’enjeu est de taille puisque si l’on se base sur les analyses des deux principaux avionneurs, dans les vingt années ŕ venir il y aura selon Boeing 15 000 avions de tous types qui seront retirés du service tandis que chez Airbus on affiche 11 00 appareils de plus de 100 places qui seront sortis d’exploitation.
Autrement dit, affirment les analystes d’Honeywell Aerospace Trading, le marché des pičces détachées de seconde main s’établirait (chiffres 2014) entre 3 et 4 milliards de dollars par an et il devrait croître de 5 ŕ 6 % par an. Au vue de ces chiffres on comprend que la déconstruction attise tant de convoitises. Reste justement que si elle est menée selon des rčgles de recyclage, de récupération des liquides qu’ils soient hydrauliques ou énergétiques, elle est non seulement rentable pour les entreprises mais aussi Ť bonne pour l’environnement ť.
Nicole Beauclair pour AeroMorning