Cinéma brésilien : contre vents et marées

Publié le 25 novembre 2015 par Conte

Par Silvana Conte

Le parcours du cinéma brésilien ressemble au parcours du combatant. Cent ans après les frères Lumière, le cinéma brésilien continue d'exister, malgré les crises politiques, économiques et sociales qui ne cessent d'ébranler le pays tropical.

Mais, malgré son parcours mouvementé et la mainmise de l'industrie cinématographique étrangère sur le marché national, le cinéma brésilien a résité et a traversé les époques en privilegiant les relations entre l'esthétique, la politique et l'imaginaire national.

Avec le Cinéma Novo (1963-1970), les brésiliens découvrent un nouveau cinéma engagé dans la transformation du pays, un mélange de Néo-réalisme avec ses thèmes et ses formes de production et la Nouvelle Vague avec ses ruptures de langage. C'est le cinéaste Glauber Rocha qui défini le mieux les instruments du Cinéma Novo :  "une caméra à la main et une idée dans la tête".

Après le coup d'état militaire de 1964 – qui a plongé le pays sous la dictature pendant 20 ans – les cinéastes s'interrogent sur le futur, leur identité et leur appartenance sociale. En 1968, les médias et les programmes de divertissement public sont noyés par la censure. La persécution politique, la restriction de l'activité syndicale et la pratique de la torture dans les prisons instaurent un climat de peur qui se répercute sur tout le pays.

En dépit de "l'état de siège", le cinéma brésilien résiste. Une nouvelle génération de cinéastes, plus radicale, émerge.Le cinéma underground brésilien fait surface pour faire face à la tempête militaire qui s'abat sur le pays.

Dans les années 70, le mot d'ordre est "le marché est la culture" et le cinéma brésilien connaît alors une période de "calme plat". Le star system télévisuel entre en scène et l'arrivée de la crise économique de 1982 ne fait qu'empirer la situation : pas d'argent pour aller au cinéma et encore moins pour produire des films.

Malgré tout, le cinéma brésilien avance et s'adapte au flux et au reflux des marées. Les courts-metrages et les documentaires font leur apparition. Avec la fin de la ditacture et le retour de la démocratie en 1985, le vent tourne : la Loi de l'Audiovisuel est créée et des nouveaux mécanismes de soutien à la production cinématographique voient le jour.

Le cinéma brésilien connaît alors une bouffée d'air frais et revient sur la scène mondiale. En avant toutes ! L'année 1997 sera marquée par la création de la Globo Filmes, branche cinématographique du géant de l'audiovisuel TV Globo. Un vent de folie souffle sur le scénario tropical et le cinéma national suit, depuis, cette vague déferlante.

2015. Depuis la terre ferme, Inacio Araujo, critique du journal Folha de S.Paulo, affirme : "le cinéma brésilien cherche encore et toujours son public. Et la référence de ce public, aujourd'hui, est soit l'esthétique des programmes de la Globo soit les blockbusters américains. Etant donné que nous ne pouvons pas imiter ces derniers, le cinéma imite, comme il peut, la Globo".

Nous sommes en novembre et c'est la 7è édition du Festafilm. Cette croisière arrive à sa destination. Je vois ainsi passer ce bateau au large de l'océan et je vois apparaître une lueur d'espoir : un phare du bout du monde. Tout un symbole...